Faut-il craindre une guerre commerciale des vaccins?

Steven Bell, BMO Global Asset Management

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Les chiffres attendus cette semaine devraient confirmer le boom économique américain et montrer les premiers signes d'un boom britannique.

La campagne de vaccination en Europe ne se déroule pas comme prévu et les récentes tensions entre le Royaume-Uni et Bruxelles l’illustrent bien. Cette semaine, la Commission envisage de restreindre les exportations de vaccin vers les pays tiers, principalement à cause des différends qui l’oppose avec AstraZeneca. Or, même si tous les vaccins de l’entreprise suédo-britannique destinés au Royaume-Uni sont fabriqués dans le pays, la chaîne d'approvisionnement est mondiale et certains ingrédients clé proviennent du marché européen. En procédant ainsi, l’UE souhaite faire pression sur AstraZeneca, accusée de ne pas honorer ses engagements, afin que l’entreprise pharmaceutique adresse en priorité son marché, et non pas seulement le marché britannique. Les Etats-Unis ont discrètement adopté une mesure similaire en interdisant les exportations américaines de vaccins et d'ingrédients vaccinaux, justifiant en partie le retard de l’Inde dans l'envoi de 5 millions de doses destinées au Royaume-Uni.

La stratégie européenne pourrait-elle sauver une campagne de vaccination jusqu’ici décevante? C’est peu probable au vu des résistances persistantes sur l’utilisation du vaccin AstraZeneca dans certains Etats membres accumulant les stocks.  

Les chiffres nous montrent que l’avance du Royaume-Uni et des Etats-Unis dans la vaccination est réelle, et les mesures de l’UE ne devraient pas changer la donne. Les deux pays seront probablement en mesure de proposer un vaccin à l'ensemble de leur population adulte avant l'été, un stade que l’UE n’atteindra sans doute pas avant septembre. Les implications pourraient être profondes.

Bloomberg as at 22nd March 2021
Les bonnes nouvelles se confirment aux Etats-Unis et au Royaume-Uni

Cette semaine, les nouveaux indices des directeurs d'achat (PMI) seront surveillés de près. Le PMI américain est déjà en plein essor grâce aux aides budgétaires massives et au fait qu'ils ont déjà assoupli les restrictions sanitaires. En moyenne, les consommateurs américains ont épargné l’équivalent d’une année de salaire, prête à être dépensée dès que la course à la vaccination laissera la place à un retour à la normale.

Le Royaume-Uni est dans la même course mais semble mieux placé. Le pays sort d’une période marquée par des mesures sanitaires très strictes et devrait connaître un regain d'activité économique au deuxième trimestre si les indicateurs restent au beau fixe. L'indice non manufacturier devrait, quant à lui, faire un grand bond en avant, passant de moins de 50 à plus de 60 d’ici le mois de mai. En revanche, l'UE restera embourbée dans la récession.

Quels impacts sur les marchés financiers?

Avec une économie américaine en plein essor, le risque de déséquilibre entre un marché des obligations baissier et un marché des actions haussier est à craindre. Mais il pourrait être compensé dans les semaines à venir. En effet, plusieurs milliers de milliards de dollars de fonds de pension et autres fonds similaires se trouvent dans des portefeuilles équilibrés, avec des pourcentages fixes en obligations et en actions. Les prix des obligations ayant fortement baissé jusqu'à présent ce trimestre, et celui des actions ayant augmenté, des ventes importantes d'actions et des achats d'obligations seront à anticiper. L’effet ne sera peut-être pas assez puissant pour compenser les forces contraires. Mais cela incite à la prudence quant à la vente d'obligations, en particulier aux États-Unis, à court terme. En parallèle, il est probable que l’euro se déprécie, car les troubles politiques et la récession sont rarement positifs pour une monnaie.

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