Des signaux contradictoires

Axel Botte, Ostrum AM

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Le marché semble anticiper un statu quo de la Fed mais la volatilité des taux reste vive.

L’été est souvent propice aux mouvements abrupts sur les marchés financiers en raison d’une liquidité moindre. La faiblesse des marchés d’actions jusque mi-août s’est toutefois estompée avec des rachats en fin de mois. La performance des actions est le miroir des taux d’intérêt à long terme. Le sommet de 4,34% a suscité des intérêts acheteurs de Treasuries qui ramènent désormais le 10 ans aux alentours de 4,10%. Le Bund reste ancré autour de 2,50%, les données économiques européennes et allemandes en particulier laissant présager une croissance modeste au 3ème trimestre. Les spreads de crédit ont subi la correction des actions et anticipent déjà le retour du marché primaire. Le niveau bas de la volatilité des actions reste une énigme, mais l’arrêt prochain des hausses de taux réduit une source d’incertitude. Le rebond récent des actions est concomitant avec un léger tassement du dollar. La hausse du pétrole est à surveiller, d’autant que la désinflation reste très lente.

La Fed reste prudente

La situation conjoncturelle reste contrastée. La révision baissière du PIB américain provient d’une contribution moindre des stocks et du commerce extérieur. L’emploi progresse de 187’000 en août avec un taux de chômage en hausse à 3,8% en raison d’une participation plus forte. Des signes avant-coureurs d’une dégradation sont perceptibles dans la réduction des postes à pourvoir ou la baisse de l’emploi temporaire mais la situation du marché du travail reste favorable. La consommation des ménages (1,8% entre avril et juin) a poursuivi son redressement en juillet (+0,6% sur le mois), de sorte que la croissance au 3ème trimestre 2023 devrait avoisiner 3%. Cependant, la baisse du taux d’épargne et le recours au crédit seront des facteurs de fragilité d’autant que les banques sont moins enclines à prêter même en répercutant les hausses de taux de la Fed. L’investissement est mieux orienté. La construction d’usines, favorisée par la loi sur la réduction de l’inflation 2022 (IRA) et le CHIPS Act, et les dépenses en biens d’équipement sont dynamiques. L’investissement logement a probablement enregistré son dernier trimestre de contraction. Les prix du logement s’inscrivent en rebond depuis 6 mois. Les loyers augmentent, ce qui engendre un risque haussier sur l’inflation en 2024. La prudence de Jerome Powell affichée à Jackson Hole est sans doute fondée. En zone euro, la plupart des enquêtes ont fléchi en août. La croissance économique sera sans doute plus faible au 3ème trimestre. Les indices des directeurs d’achat (PMI) manufacturier se situe en effet à 43,5 pour la zone euro et sous le seuil de 40 en Allemagne. Cette inflexion reste sans effet sur l’inflation qui est inchangée en août à 5,3%. La désinflation s’avère très lente. Les prix des services progressent encore de 5,5%. En Chine, le PMI manufacturier de Caixin (51) est une lueur d’espoir après une longue période de faiblesse dans l’industrie.

Aux Etats-Unis, la saison des résultats s’est soldée par 80% de surprises favorables sur les bénéfices.

Les marchés de taux considèrent que la Fed n’augmentera plus ses taux contrairement aux projections du FOMC en juin. La modération de l’emploi et les propos de Raphael Bostic appelant à ne pas en faire trop ont provoqué un mouvement baissier sur le 2 ans vers 4,85% (-23pb) et une pentification de la courbe. La pentification semble une tendance lourde, qui s’accélérerait en cas de récession. Le point haut de 4,34% sur le T-note a certes suscité des intérêts acheteurs et initié une baisse vers 4,15% mais le potentiel baissier semble réduit à court terme. En zone euro, le Bund est plombé par la conjoncture. Le 10 ans allemand oscille autour de 2,5% de sorte que le spread du T-note s’est écarté. Le swap spread à 10 ans s’échange à 63pb. L’inflation reste trop élevée. La situation de la Banque Centrale Européenne (BCE) est des plus difficiles. La BCE devrait néanmoins relever son taux en septembre. Les spreads souverains sont stables et les swap spreads se réduisent marginalement. Les Trésors européens sollicitent largement l’épargne des particuliers comme en Italie, au Portugal et dernièrement en Belgique (20 milliards d’euros placés), ce qui réduit d’autant le besoin d’émissions obligataires.

Le marché du crédit en euros (155pb contre Bund) doit absorber le retour du primaire qui s’accélérera encore cette semaine. Le total d’émissions atteint 35 milliards d’euros sur l’investment grade avec une vingtaine de milliards d’emprunts d’entreprises non-financières bien notées (luxe) qui rencontrent une bonne demande. La majorité des spreads se resserrent après l’émission. La performance des bancaires se distingue, les programmes d’émissions annuels étant bien avancés. Sur le high yield, les spreads obligataires (456pb contre Bund) sont stables alors que le crossover s’inscrit en net resserrement de l’ordre de 20pb sur la semaine.

Les marchés d’actions ont rebondi en fin de mois après une entame du mois d’août en nette baisse. Les indices européens et américains reprennent 2-3%. Aux Etats-Unis, la saison des résultats s’est soldée par 80% de surprises favorables sur les bénéfices malgré les baisses enregistrées dans les secteurs de l’énergie et des ressources de base notamment. Les marges restent globalement meilleures qu’attendu. En Europe, les cycliques et les financières (foncières) surperforment les défensives.

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