Cinq grandes questions en ce début d’année 2022

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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En ce début d’année, la volatilité s’est emparée des marchés en raison de l’inquiétude suscitée par le resserrement de la politique de la Fed et de la propagation rapide du variant Omicron.

Les investisseurs se posent de nombreuses questions. Tour d’horizon des cinq interrogations récurrentes.

1. La Fed mettra-t-elle un terme au rebond des actions?

La Recherche d’UBS table désormais sur trois relèvements de 25 points de base (pb) des taux directeurs aux Etats-Unis, le premier intervenant dès le mois de mars. Au second semestre, la Fed pourrait également amorcer la réduction de son bilan. En effet, elle semble désireuse de ramener le curseur de sa politique monétaire en terrain neutre plus rapidement que prévu jusqu’ici.

Toutefois, cette normalisation ne devrait pas miner les perspectives concernant la croissance des bénéfices des entreprises. Cette dernière reste soutenue par la solide croissance économique, la bonne tenue de la consommation des ménages, ainsi que par un accès toujours aisé aux capitaux.

Cette année, la croissance économique aux Etats-Unis devrait rester supérieure à sa tendance. On peut s’attendre à une progression de 12% des bénéfices du S&P 500 en 2022 et de 9% en 2023. Par le passé, l’amorce d’un cycle de resserrement monétaire aux Etats-Unis n’a pas nui à la performance des actions. Depuis 1983, le S&P 500 a grimpé de 5,3% en moyenne lors des trois mois qui précèdent le premier relèvement des taux de la Fed et de 5,3% supplémentaires dans les six mois qui suivent.

Les prix de l’énergie devraient se stabiliser et l’atténuation des frictions sur le marché de l’emploi limitera sans doute la pression à la hausse des salaires.
2. L’inflation est-elle là pour rester?

En décembre, les prix à la consommation aux Etats-Unis sont ressortis en hausse de 7% sur un an, du jamais vu depuis 1982. Les données ont mis en évidence des difficultés d’approvisionnement persistantes dans certains secteurs tels que l’automobile, où la production insuffisante de voitures neuves a fait grimper les prix des véhicules d’occasion de 53% depuis le début de la pandémie.

La pression inflationniste devrait rester marquée dans l’immédiat. Le nombre de cas de Covid-19 est historiquement élevé, ce qui accentue la pénurie de main-d’œuvre et retarde la normalisation de la conjoncture économique. Toutefois, l’inflation globale devrait culminer au premier trimestre avant de retomber vers les 2% d’ici la fin de l’année. A mesure que la croissance se normalisera, la flambée de la demande s’atténuera.

Lorsque les ruptures de chaînes d’approvisionnement seront résolues, la baisse de certains prix en surchauffe, par exemple ceux des véhicules d’occasion, devrait favoriser une décrue de l’inflation. En outre, les prix de l’énergie devraient se stabiliser et l’atténuation des frictions sur le marché de l’emploi limitera sans doute la pression à la hausse des salaires.

3. Le variant Omicron fera-t-il dérailler le rebond des actions?

Probablement pas. Les données disponibles suggèrent que le variant Omicron deviendra prépondérant et que malgré sa contagiosité très élevée, il est moins virulent que le variant précédent (Delta). Le lien entre le nombre de cas et celui des hospitalisations/décès s’est affaibli. La contagiosité plus importante se traduit par une augmentation des hospitalisations en valeur absolue, mais la vague pourrait s’avérer éphémère. Le nombre de nouveaux cas de Covid-19 a amorcé une décrue dans les pays touchés en premier par le variant Omicron, comme l’Afrique du Sud et le Royaume-Uni.

En dehors de la première vague, les actions ont rebondi en période de recrudescence des cas de Covid-19. Lors des trois mois qui ont suivi le début de la première vague (de février à avril 2020), les actions mondiales et les actions américaines ont généré un rendement total de respectivement -13,4% et -11,3%.

En revanche, à compter de l’amorce de la deuxième vague en juin 2020, elles ont généré, sur trois mois toujours, un rendement total de 6,6% pour les actions mondiales et de 9,4% pour les actions américaines. Lors de la vague liée au variant Delta, qui a débuté en mai 2021, leur rendement total sur la même durée s’est élevé à 7,8% (actions mondiales) et à 10,1% (actions américaines).

4. Quand faut-il acheter des valeurs technologiques?

Miné par le spectre de la hausse des taux d’intérêt, l’indice Nasdaq des valeurs technologiques accuse un repli de 7,4% depuis son sommet historique de novembre. L’indice FANG+ est en baisse de 9% sur la même période. Les valeurs technologiques pourraient encore céder 5 à 10% en raison de la hausse des taux d’intérêt. Mais il convient de relativiser ceci par la croissance des bénéfices des entreprises technologiques, qui devrait, à l’échelle mondiale, avoisiner 15% cette année.

Les six segments du secteur technologique (semi-conducteurs, matériel, médias digitaux, e-commerce, logiciels et services) représentent un tiers de la capitalisation boursière des actions mondiales. Les investisseurs surexposés par rapport à cet indice de référence feraient bien de réduire leur exposition au profit de secteurs plus cycliques comme l’énergie et la finance.

Le gros de l’impact de ces dernières est certainement déjà reflété dans les cours.

A ceux dont l’allocation est conforme à celle de l’indice de référence, un rééquilibrage est recommandé pour éviter le risque de concentration sur des segments qui restent sur une performance éblouissante, comme les méga-capitalisations et les semi-conducteurs. A la place, il serait judicieux d’investir dans les petites et moyennes capitalisations, ainsi que dans l’intelligence artificielle (IA), dans le big data et dans la cybersécurité.

Les investisseurs sous-exposés peuvent mettre à profit la volatilité actuelle pour constituer graduellement une exposition stratégique à des valeurs technologiques de qualité qui ont été malmenées.

5. Les actions chinoises ont-elles touché le fond?

Après avoir atteint un sommet historique en février 2021, l’indice MSCI China a décliné pendant le reste de l’année. Il est plombé par un durcissement de la réglementation des entreprises technologiques et du secteur immobilier, par la pénurie d’énergie, ainsi que par le ralentissement de l’économie.

Depuis le début de l’année, il est en hausse de 1,7% tandis que le MSCI World et le S&P 500 sont en repli respectivement de 1,8% et de 2,2%. Cela est dû à l’inquiétude suscitée par le resserrement de la politique de la Fed et à la propagation du variant Omicron en Europe et aux Etats-Unis.

Il y a dix jours, le MSCI China s’est adjugé 2,9%. Depuis le pic de février 2021, la valorisation des titres de la nouvelle économie a baissé substantiellement. Et, même si l’on ne peut exclure une persistance de la volatilité à court terme, le temps que les entreprises se plient aux nouvelles réglementations, le gros de l’impact de ces dernières est certainement déjà reflété dans les cours.

Les investissements dans les infrastructures et ceux nécessaires à l’atteinte de la neutralité carbone sont soutenus par des politiques favorables. On peut également s’attendre à une augmentation des dépenses des entreprises dans les domaines de la cybersécurité et de la fabrication intelligente. Le rebond de la consommation devrait s’accélérer, notamment au second semestre, avec l’assouplissement des restrictions sanitaires. En 2022, la Recherche d’UBS table sur une performance de l’ordre de 15%.

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