Le négociateur de l’UE Michel Barnier qualifie sa rencontre avec son homologue britannique Stephen Barclay de «constructive» tout en appelant à «la patience».
Londres et Bruxelles se sont mis d’accord vendredi pour lancer des négociations intensives, afin de tenter de sortir de l’impasse du Brexit, à 20 jours du divorce.
Les 27 Etats membres ont donné leur feu vert à leur négociateur, Michel Barnier, qui avait rencontré dans la matinée son homologue britannique, Stephen Barclay, un entretien qualifié de «constructif» par le Français.
Un bilan de ces discussions sera fait lundi, à la veille d’une réunion des ministres des Affaires européennes à Luxembourg, où Michel Barnier sera également présent. Leur résultat sera décisif pour le sommet européen des 17 et 18 octobre, théoriquement le dernier avant le divorce du 31 octobre.
Après une semaine de pourparlers sans annonce concrète mais marquée par de vives tensions entre Londres et les Européens, un vent d’optimisme s’était levé jeudi après une rencontre entre Boris Johnson et son homologue irlandais Leo Varadkar.
Les deux hommes ont assuré entrevoir un «chemin» vers un compromis sur la question clé de la frontière irlandaise. Sans cependant dire concrètement comment ils comptaient sortir les négociations de l’ornière. L’Irlande, très soutenue par les Européens, sera en première ligne en cas de divorce sans accord et ses conséquences économiques potentiellement dévastatrices.
Le Brexit, c’est «comme gravir une montagne. Nous avons besoin de détermination, de vigilance et de patience», a prudemment commenté vendredi le Savoyard Michel Barnier, après son petit-déjeuner avec M. Barclay.
«Il y a eu des idées échangées entre Barnier et Barclay et c’est pourquoi il a été décidé d’intensifier les discussions, mais il y a encore beaucoup de questions en suspens», a commenté vendredi un diplomate européen.
Les Britanniques seraient prêts à évoluer sur la question épineuse des contrôles douaniers sur l’île d’Irlande «avec en tête l’économie de toute l’Irlande», a indiqué une source européenne sans donner davantage de détails.
Il s’agit de la principale pierre d’achoppement des discussions. Londres exige la suppression du filet de sécurité («backstop») prévu dans le traité de retrait, estimant qu’il porte atteinte à son indépendance commerciale.
Ce dispositif a été prévu pour empêcher le retour d’une frontière dure entre l’Irlande du Nord, province britannique, et la République d’Irlande, membre de l’UE, afin de préserver la paix sur l’île, tout en protégeant les intérêts du marché unique européen.
Le plan de Boris Johnson prévoit de sortir l’Irlande du Nord de l’union douanière européenne tout en refusant des contrôles des biens à la frontière ou à proximité, une perspective inacceptable en l’état pour les Européens qui refusent ces «trous dans le gruyère» dans l’espace douanier.
«Ce qui nous est demandé est d’accepter un système qui n’est pas développé, pas testé, de contrôles dispersés sur l’île d’Irlande», a fustigé cette semaine Michel Barnier, soulignant l’importance de contrôles «rigoureux à chacune des limites du marché unique et de notre union douanière».
Autre point de blocage dans le plan Johnson soulevé par les 27: le droit de veto qui serait donné aux institutions d’Irlande du Nord sur l’accord de Brexit. «Il y aurait eu un rapprochement sur ce point» jeudi entre Londres et Dublin, selon la même source européenne.
La possibilité que ces négociations intensives débouchent sur un accord d’ici fin octobre demeure néanmoins très incertaine.
«La Commission va explorer de façon intensive ce qui est faisable. Mais attention, il y a une grande possibilité pour que ça ne débouche sur rien ou que ce soit insuffisant» pour donner lieu à un accord, a-t-on averti de source européenne.
Le traité de divorce conclu en novembre 2018 entre les 27 et l’ancienne Première ministre britannique Theresa May, rejeté par trois fois par la Chambre des communes, avait nécessité 18 mois de négociations.
Dans ces conditions, l’hypothèse d’un report, le troisième, pourrait être relancée.
Faute d’accord d’ici au 19 octobre, une loi adoptée par le Parlement britannique impose au Premier ministre de demander un report de trois mois, bien que Boris Johnson ait promis un Brexit «coûte que coûte» le 31 octobre.
«Le traité n’impose pas à Boris Johnson de demander une prolongation. Ce sont les deux parties qui doivent être d’accord. Si nous proposons un report, cela lui permet de sauver la face», suggère un diplomate européen.