BCE: après la nouvelle hausse des taux en mars, stop ou encore?

AWP

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L’unanimité affichée jusqu’à présent par les gardiens de l’euro sur le durcissement monétaire devrait céder la place à un «débat très animé» jeudi sur «ce qui va se passer après», selon Carsten Brzeski d’ING.

La Banque centrale européenne devrait selon toute attente relever ses taux jeudi d’un demi-point de pourcentage pour la troisième fois d’affilée, les observateurs spéculant sur la suite du resserrement monétaire face à la persistance de l’inflation.

La présidente de l’institution Christine Lagarde avait annoncé le mois dernier qu’une hausse de 0,50 point de pourcentage était quasi certaine pour mars.

Elle a depuis réitéré cette intention, alors que l’inflation en zone euro continue d’évoluer à des niveaux bien au-delà de la cible de 2% visée à moyen terme.

Si le Conseil des gouverneurs de jeudi entérine cette hausse, le taux rémunérant les liquidités bancaires non distribuées en crédit sera porté à 3,0%, au plus haut depuis octobre 2008.

Face à l’envolée des prix dans le sillage de la guerre russe menée en Ukraine, la BCE a entamé en juillet un cycle inédit de hausses des taux, mettant fin à près d’une décennie d’argent pas cher.

Discours «offensif»

Or, l’unanimité affichée jusqu’à présent par les gardiens de l’euro sur ce durcissement monétaire devrait céder la place à un «débat très animé» jeudi sur «ce qui va se passer après», selon Carsten Brzeski, économiste chez ING.

L’heure est-elle venue de passer à une approche prudente sur le coût du crédit, dont le niveau pèse déjà sur l’économie, comme suggéré par des «colombes» siégeant au Conseil?

En face, les «faucons» majoritaires autour de la table plaideront pour de nouvelles hausses significatives du loyer de l’argent car il faut briser la dynamique de l’inflation.

Mme Lagarde a promis mercredi dernier de faire «tout ce qu’il faut» pour rétablir la stabilité des prix.

Aux Etats-Unis, où le cycle de relèvement des taux a débuté il y un an, le président de la Réserve fédérale Jerome Powell a dernièrement affirmé que «le niveau final des taux d’intérêt» de l’institution est «susceptible d’être plus élevé que prévu» compte-tenu de données économiques dépassant les attentes.

A Francfort, les gardiens de l’euro «devraient garder un discours offensif» mais «ne seront probablement pas en mesure de s’accorder sur des orientations chiffrées» concernant la courbe future des taux, selon Jack Allen-Reynolds, analyste chez Capital Economics.

Les pronostics des observateurs varient sur le niveau du taux de dépôt qui sera atteint d’ici l’été: ils le voient atteindre entre 3,5% et 4,0%, pour y camper ensuite un certain temps.

Inflation sous-jacente record

L’inflation en zone euro a reculé en février pour le quatrième mois de suite, à 8,5% en glissement annuel, après 8,6% en janvier, selon Eurostat.

Mais une fois corrigée des prix instables de l’énergie et de l’alimentation, l’inflation «sous-jacente», plus représentative des tendances de long terme, a progressé au niveau record de 5,6% en février, n’arrangeant pas les affaires de la BCE.

L’institution s’inquiète aussi de voir les salaires augmenter en réponse aux revendications des travailleurs, au risque d’alimenter durablement les hausses de prix.

Les nouvelles prévisions d’inflation et de croissance publiées jeudi par la BCE l’aideront à réévaluer la situation et définir le cap monétaire.

En décembre, la BCE avait prévu une inflation moyenne de 3,4 % et 2,3 % en 2024 et 2025, et une inflation sous-jacente de 2,8% et 2,4%. Ces prévisions devraient être revues à la baisse compte-tenu du repli des prix de l’énergie ces derniers mois.

La BCE aura moins de scrupule à serrer encore la vis monétaire s’il se confirme par ailleurs que la zone euro évitera la récession en 2023.

L’autre levier pour remonter les taux, à savoir la réduction du stock de dette au bilan de la BCE («QT» pour quantitative tightening), a démarré en mars et doit se poursuivre jusqu’en juin au rythme mensuel de 15 milliards d’euros.

«Tant que les conditions de marché resteront favorables, la BCE accélérera probablement le QT en juillet», selon M. Allen-Reynolds.

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