Face à la menace d’un «no deal», la chancelière allemande Angela Merkel a déclaré: «Nous avons demandé au Royaume-Uni de rester ouvert aux compromis».
Angela Merkel a appelé jeudi soir à Bruxelles à des compromis de part et d’autre pour débloquer les négociations commerciales post-Brexit entre Londres et l’UE, avant une prise de position du Premier ministre britannique Boris Johnson attendue vendredi.
Face à la menace d’un «no deal», la chancelière allemande, dont le pays occupe la présidence tournante de l’UE, a déclaré: «Nous avons demandé au Royaume-Uni de rester ouvert aux compromis (...). Bien entendu, cela signifie également que nous devons accepter des compromis», alors même que «chaque camp a ses lignes rouges».
Angela Merkel s’exprimait à l’issue de la première journée d’un sommet des Vingt-Sept dont «les résultats» étaient attendus par Boris Johnson pour se prononcer sur la suite des pourparlers.
Sur le sujet explosif de la pêche, le négociateur européen, Michel Barnier, avait auparavant déclaré: «nous savons bien que nous allons devoir faire un effort».
Dans des conclusions adoptées jeudi soir, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE «constatent avec inquiétude que les progrès réalisés sur les questions clés qui intéressent l’Union ne sont toujours pas suffisants pour qu’un accord soit conclu». Et ils réclament que Londres fasse «le nécessaire pour rendre un accord possible».
Par la voix de son négociateur, David Frost, le Royaume-Uni s’est dit «déçu» par ces demandes et même «surpris que l’UE ne s’engage plus à travailler de manière intensive», au vu de ces conclusions.
Michel Barnier a ensuite annoncé en conférence de presse qu’il souhaitait continuer à négocier la semaine prochaine à Londres, puis la suivante à Bruxelles, et ce de manière «intensive».
«J’ai proposé à l’équipe britannique de négocier dans le bref espace de temps qu’il nous reste, de façon à discuter d’un accord jusqu’à fin octobre», a-t-il expliqué, se disant «absolument déterminé à trouver un accord juste».
Les pourparlers achoppent toujours sur trois sujets: la pêche, les garanties réclamées aux Britanniques en matière de concurrence - malgré de récents progrès - et la manière de régler les différends dans le futur accord.
La pêche est particulièrement sensible pour une poignée d’Etats membres (France, Irlande, Danemark, Belgique, Pays-Bas) qui veulent continuer à pouvoir accéder comme aujourd’hui aux eaux britanniques, très poissonneuses.
Les pêcheurs «ne sauraient être les sacrifiés du Brexit», a d’ailleurs prévenu le président français Emmanuel Macron, assurant que Paris était «prêt» à une absence d’accord.
Michel Barnier a cependant déclaré, pour la première fois, que l’UE était ouverte à «un effort raisonnable» sur le sujet, à condition qu’il «préserve les activités de pêche de l’UE».
Il a mis en parallèle les demandes d’accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques et celles du Royaume-Uni pour l’accès de ses entreprises au marché unique.
Depuis que le Royaume-Uni a officiellement quitté l’UE le 31 janvier, les pourparlers entre Londres et Bruxelles pour un accord de libre-échange --qui entrerait en vigueur début 2021 à la fin de la période de transition -- patinent.
Les deux parties s’accusent mutuellement de laisser planer le risque d’un «no deal» potentiellement dévastateur pour leurs économies, déjà fragilisées par la pandémie.
«Quand nous prenons en compte à quel point le Royaume-Uni, d’une part, l’Union européenne, d’autre part, seraient affectés par une situation de non-accord, il est, on ne peut plus clair, qu’il doit y avoir un accord», a d’ailleurs souligné la présidente de la Banque centrale européenne (BCE) Christine Lagarde sur la chaîne CNBC.
Les discussions entre Londres et Bruxelles ont aussi été affectées par le projet de loi du gouvernement britannique revenant en partie sur le traité du Brexit, qui encadre le départ britannique le 31 janvier dernier.
«L’accord de retrait et ses protocoles doivent être entièrement mis en oeuvre, point final», a tranché le président du Conseil européen Charles Michel.
C’est la première fois que les dirigeants européens se retrouvaient entre eux pour évoquer spécifiquement le Brexit depuis le début en mars des négociations commerciales.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a quitté le sommet peu après le début de la réunion pour se placer en quarantaine à cause d’un cas de Covid-19 dans son équipe.
Le dossier climatique était également au programme de la soirée: les Vingt-Sept ont décidé de repousser à un prochain sommet en décembre toute décision sur leur nouvel objectif de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre pour 2030, objet de vives divergences entre les Etats.
Le second jour du sommet vendredi sera dédié aux relations extérieures, notamment au regain de tensions avec la Turquie en Méditerranée orientale et au Nagorny Karabakh.