Gonet: l'actualité des marchés au 8 avril

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +0,80%, S&P 500 +1,11%, Nasdaq +1,24%, Russell +0,47%, SOX +1,33%, Eurostoxx -1,1%, SMI -1,67%.

On l’avait quasiment oubliée tellement elle s’était faite petite dans un coin. La semaine passée la volatilité pointe le bout de son nez à nouveau, oh pas de quoi se ruer aux abris mais elle administre une petite piqûre de rappel au marché, bien aidée par plusieurs membres de la Fed qui gâchent la fête des taureaux en préconisant la patience avant de voir la Réserve Fédérale entamer son cycle de baisses de taux. On mesure ces temps combien le processus de désinflation est long, que l’économie américaine reste vigoureuse (par exemple l’ISM manufacturier en mars qui repasse en territoire d’expansion pour la première fois en 16 mois) et que la hausse récente du pétrole ne participe pas vraiment à rassurer tout un chacun quant à l’inflation. Les banquiers centraux font leur travail, pourquoi donc grilleraient-ils une cartouche inutilement en baissant les taux rapidement, alors que le marché semble se satisfaire de l’idée que ces baisses vont intervenir un jour ou l’autre, tout en appréciant de plus en plus que l’économie se porte bien. On revient ici au concept de «boucles d’or», qui indique une économie où la croissance n’est ni trop forte (écartant ainsi le risque d’inflation), ni trop faible (excluant toute récession). Une telle situation est dite «boucles d’or» en référence au conte «Boucles d’or et les trois ours», où une petite fille préfère la bouillie d’avoine ni trop chaude, ni trop froide.

Ça, c’est pour la théorie. L’équation boursière ne s’en satisfait pas, elle comprend une variable ô combien déterminante: le sentiment. Prenez vendredi passé, jour de publication de l’indice américain sur l’emploi du mois de mars. Les investisseurs attendent ce rapport en espérant secrètement qu’il décrira un marché de l’emploi moins solide que prévu, afin d’inciter la Fed à s’y mettre (les fameuses baisses de taux). Or, les points clés du rapport confirment tous la vigueur du marché du travail: les créations d’emplois sont supérieures aux prévisions des économistes, le taux de chômage reste bas alors que les salaires horaires moyens ont augmenté au rythme le plus lent depuis juin 2021. Résultat des courses, le rendement de l’emprunt US à 10 ans grimpe de 4,30% à 4,43% ce matin, il en profite pour casser à nouveau sa résistance de 4,35%. Pas très «boucles d’or» ce rapport n’est-il pas? Ne dit-on pas que la plus pernicieuse des inflations est celle provenant des salaires? Et donc le marché des actions de piquer du nez? Mais pas du tout bien au contraire et c’est là que le sentiment prend le pouvoir une fois de plus. Le marché obligataire, considéré comme plus mature que son petit-frère des actions, a beau dire à qui veut l’entendre que quelque chose semble pourri au Royaume du Danemark, les indices d’actions n’en ont cure et repartent vers le nord, malgré le fait que les Fed Funds ne s’attendent guère plus à une première baisse de taux de la Fed avant septembre. Alors on cite l’approche imminente des résultats de sociétés au premier trimestre comme une des raisons de la hausse de vendredi, quoi qu’il en soit force est de constater que le sentiment actuel du marché des actions est solide (et aussi bien aidé par les mastodontes de la tech, qui montent tous vendredi, sauf Tesla).

En résumé, il semble que tant que l’économie des Etats-Unis va (et que la Fed laisse la porte entrouverte à des baisses de taux), tout va. Le fameux «Fed Put» semble encore et toujours ancré dans les esprits.

La hausse de vendredi n’empêche pas les indices de reculer sur la semaine, le S&P500 (SPX) et le Nasdaq100 (NDX) abandonnent environ 1% sur 5 séances, le Russell2000 (petites capitalisations) sous-performe et rend 3%, il est sensible aux fluctuations des taux d’intérêts. On notera au passage que les bourses européennes reculent également, tandis que Hong Kong et Shanghai tentent un rebond. Sur le front obligataire, les rendements remontent de 10 points de base aux Etats-Unis, ils font de même en Allemagne. Sur la semaine le pétrole rebondit de 4%, l’or ne s’arrête plus et traite ce matin à 2333 dollars par once. On tente à grand peine de comprendre ce phénomène dans les salles de marchés, d’ordinaire lorsque le métal jaune grimpe on évoque la faiblesse du dollar, son rôle de valeur refuge ou encore la baisse des taux d’intérêts. Or ces derniers jours, les responsables de la politique monétaire de la Chine et de l’Inde confirment être acheteurs en or, ce qui relève de tout sauf de l’anecdote. Les tensions géopolitiques et les déficits publics de certains états pourraient participer de cette pression acheteuse rare sur l’or. Notons enfin que les sorties récentes des ETF adossés à l’or suggèrent qu’un groupe important d’investisseurs est en train de passer à côté, ou d’encaisser ses profits. 

Bon an mal an, le pétrole avance d’environ 18% depuis le 1er janvier. L’OPEP+ a tenu sa réunion du Comité ministériel conjoint de suivi (JMMC) la semaine passée et sans surprise, l’organisation élargie n’a pas modifié ses quotas de production et maintient son étreinte sur l’offre mondiale. En parallèle, l’Arabie Saoudite a augmenté ses prix de vente officiels pour les acheteurs asiatiques. Enfin, les tensions géopolitiques restent importantes au Moyen-Orient après les frappes israéliennes en Syrie ciblant les intérêts iraniens.

Janet Yellen et He Lifeng ont convenu de discuter d’une «croissance équilibrée» pour remédier à ce que les États-Unis considèrent comme une surcapacité industrielle croissante de la Chine. Les relations entre les deux pays sont «plus stables», déclare-t-elle au premier ministre Li Qiang lors d’une visite qui est restée cordiale malgré les critiques sévères sur le commerce. Mme Yellen rencontre aujourd’hui Pan Gongsheng de la PBOC avant de conclure sa visite par une conférence de presse dans l’après-midi.

La Chine renforce son soutien à la guerre menée par la Russie en Ukraine, notamment par le biais d’images satellite, indiquent les États-Unis à leurs alliés. Pékin fournit également de la microélectronique, des machines-outils pour les chars, de l’optique et des propulseurs de missiles, selon l’agence Bloomberg.

Au menu macro-économique du jour, la production industrielle allemande de février a été publiée à 8h00, nettement au-dessus des attentes. 

Les Pays-Bas s’apprêtent à se conformer aux exigences américaines en matière d’exportations d’ASML vers la Chine. Glass Lewis dénonce les risques d’UniCredit en Russie et l’augmentation excessive de la rémunération de son PDG. AstraZeneca obtient l’approbation des Etats-Unis pour Enhertu, un traitement de tumeur solide. Le groupe espagnol Puig serait proche de déposer un dossier d’IPO. Tesla renoncerait à son véhicule bas de gamme, selon Reuters. Par ailleurs, le groupe compte présenter son robotaxi début août. Meta demande à un juge américain de mettre fin aux poursuites de la FTC pour pratique anticoncurrentielles. Selon Microsoft, la Chine utilise l’IA pour semer la discorde, notamment aux Etats-Unis. Apple va permettre aux applications de streaming musical en Europe de renvoyer vers leurs propres sites web pour les achats. En outre, le groupe demande à une cour d’appel américaine d’annuler l’interdiction d’importation de l’Apple Watch. Le président sortant de Boeing a reçu une rémunération totale de près de 33 millions de dollars en 2023. 

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en hausse, hormis Shanghai qui recule de 0,51%. Tokyo progresse de 0,91% à la cloche, Hong Kong monte de 0,22%, Séoul grappille 0,13% et le Nifty50 gagne 0,62%. Le future SPX recule de 7 points et l’Europe ouvre autour de l’équilibre. La paire EUR/USD traite à 1,0834.

Cette semaine nous suivrons l’inflation américaine mercredi et la décision de la BCE jeudi mais aussi les minutes de la Fed (mercredi), l’inflation chinoise et les prix à la production américains (jeudi). Puis vendredi ce sera le tour de la confiance des consommateurs aux Etats-Unis, accompagné par le début de la saison des résultats de sociétés au premier trimestre, traditionnellement lancée par les banques (JP Morgan, Wells Fargo, BlackRock et Citigroup). 

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