Gonet: l'actualité des marchés au 8 août

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

4 minutes de lecture

Dow +0,23%, S&P 500 -0,16%, Nasdaq -0,50%, Russell 2000 +0,81%, SOX -0,91%, Eurostoxx -0,78%, SMI -0,71%.

Les ours, à l’odeur d’un marché du travail américain en pleine forme alléchés, sortent du bois vendredi, pour y retourner fissa, chassés par des taureaux décidément en pleine forme.

Le très attendu rapport sur l’emploi montre que l'économie américaine a créé 528’000 emplois en juillet, récupérant le nombre de salariés perdus à la suite de la pandémie. Les économistes s’attendaient à 250'000 nouveaux jobs. Le taux de chômage se prend aussi les pieds dans le tapis, il recule à 3,5%, un plus bas depuis 50 ans. Le taux de participation de la population active – ou la proportion d'adultes travaillant ou cherchant un emploi – recule à 62,1% en juillet contre 62,2% un mois plus tôt. Le salaire horaire moyen augmente de 5,2% en juillet par rapport à l'année précédente, une légère accélération par rapport au mois précédent. Si l’on décortique la statistique, on constate que les gains d'emplois ont été généralisés le mois dernier. Les employeurs des loisirs et de l'hôtellerie ont ajouté des emplois à un rythme soutenu, alors que les restaurants et les bars ont continué de se redresser. La masse salariale a également augmenté dans les soins de santé et les services professionnels et commerciaux, qui comprennent de nombreux emplois de cols blancs.

Vous souvenez-vous de la notion «good news is bad news»? Et bien nous voici à nouveau en plein dedans. Rappelons-nous, les indices d’actions américains ont relevé la tête depuis le 17 juin et ils viennent de boucler leur troisième semaine consécutive de hausse. La principale raison de cette reprise réside dans un changement graduel de perception dans le marché quant aux prochaines actions de la Fed. Les deux dernières réunions de la Réserve Fédérale ont accouché de hausses de taux historiques, 75 points de base à chaque occasion (c’est littéralement énorme), et le marché de s’auto convaincre progressivement que le rythme de ces hausses allait décélérer. On le sait, il en faut peu pour être heureux, surtout lorsqu’on est un taureau frustré, encore plus dans le cas d’un taurillon qui n’avait jamais goûté à un marché baissier dans sa courte vie de trader. Le marché des actions s’est donc accroché à cette idée optimiste que les taux d’intérêts finiraient bien par ne plus monter un jour, pour repartir vers le sud ensuite.

Or, le rapport sur l’emploi de vendredi, qui constitue sans aucun doute possible une bonne nouvelle pour l’économie des Etats-Unis, fait prendre une douche froide aux joyeux optimistes qui pensaient que la Fed allait redevenir accommodante dans un futur proche. On peut probablement parler à nouveau d’atterrissage en douceur potentiel de la croissance, en revanche la pression augmente singulièrement sur la Fed, qui a dû détester, mais alors à un de ces points, ce rapport. Un marché de l’emploi en apparence aussi solide pourrait instiller de l’inflation par les salaires, c’est probablement le pire cauchemar de tout banquier central.

La réaction du marché obligataire est d’ailleurs significative, la courbe des taux US s’inverse encore plus, le 2/10 ans évolue à -40 points de base. En résumé, le très mature marché des bonds nous dit que la Fed reste «behind the curve», il reste inquiet. Pendant ce temps, au joyeux royaume des actions, la séance de vendredi commence sur une note orageuse, le sentiment du marché est mis au défi comme rarement, on s’apprête à une séance compliquée, voire très pénible. L’indice S&P500 (SPX) abandonne rapidement 1%, ses compères le Dow Jones et le Nasdaq100 (NDX) ne font guère mieux, on se dit dans les salles de marchés que l’aversion au risque va reprendre la main. Cette ambiance mortifère dure exactement deux heures, le temps d’envoyer les indices de la vieille Europe au dodo, puis de repartir vers le nord comme un seul homme. On peut l’affirmer, vendredi le sentiment du marché franchit un cap supplémentaire, il semble de plus en plus solide et cela se voit. Alors certes, le SPX clôture en territoire légèrement négatif, mais le Russell2000 (RTY) progresse de près de 1% pour sa part, les petites et moyennes capitalisations poursuivent leur marche vers le haut, l’armée montre le chemin aux généraux vers la colline, les généraux qui boudent (AAPL -0,14%, MSFT -0,26%, AMZN -1,24%, GOOGL -0,61%, NVDA -1,18%, AMD -1,57%, META -2,03%). Ce désamour passager pour les mastodontes de la cote est à mettre au «crédit» des taux obligataires, qui remontent logiquement après la publication du rapport sur l’emploi.

Le secteur des services de communication souffre des résultats décevants de Warner Bros Discovery (WBD -16,5%) et de Western Digital (WDC -5,7%). Les titres de la réouverture sont en pleine forme pour leur part (EXPE +0,31%, LYFT +16,62%, TRIP +18,94% et YELP +18,38% qui publient tous de solides résultats). Les volumes d’échange du jour sont limités avec 9,78 milliards de titres traités sur le NYSE. La volatilité recule légèrement, le VIX abandonne 1,3% à 21,15. Le marché des Fed Funds prévoit désormais une hausse de 75 points de base lors de la réunion de la Fed du 21 septembre.

Liz Truss pourrait demander à la Banque d’Angleterre d'abandonner son objectif d'inflation de 2% en faveur d'une relance de l'économie si elle devient Premier ministre, selon le Telegraph. Elle s'empresserait également de faire adopter des réductions d'impôts, notamment en annulant immédiatement l'augmentation des cotisations d'assurance nationale prévue cette année. Le PIB s'est probablement contracté de 0,2% au deuxième trimestre, selon les économistes, la première contraction depuis le début de 2021.

La Fed devrait continuer à réfléchir à des hausses importantes similaires à celle de 75 points de base des deux dernières réunions jusqu'à ce que l'inflation ralentisse fortement, selon Michelle Bowman. «Mon point de vue est que des augmentations de taille similaire devraient être sur la table jusqu'à ce que nous voyions l'inflation décliner de manière cohérente, significative et durable», déclare la gouverneure. La cheffe de la Fed de San Francisco, Mary Daly, indique à CBS que «l'accent doit être mis sur la réduction de l'inflation», elle tenait un propos similaire la semaine passée.

Berkshire Hathaway achète la baisse…prudemment. Le conglomérat a été un acheteur net d'actions au deuxième trimestre avec 3,8 milliards de dollars d’emplettes. Il était vendeur net l'année dernière. L'appétit de Warren Buffett pour ses propres actions a diminué avec des rachats pour 1 milliard de dollars.

Le Sénat adopte le projet de loi démocrate sur la fiscalité, le climat et la santé, ouvrant ainsi la voie à l'adoption du programme de Joe Biden. Le projet de loi est voté par 51 démocrates pour et 50 républicains contre, la vice-présidente Kamala Harris ayant tranché. Le projet va maintenant aller à la Chambre des représentants, où il devrait être adopté vendredi.

L'Ukraine annonce que les forces russes ont bombardé pour la deuxième journée la zone autour de Zaporizhzhia, la plus grande centrale nucléaire d'Europe. La nouvelle tombe quelques heures après que le chef de l'agence de sécurité atomique des Nations unies a mis en garde contre des «conséquences potentiellement catastrophiques». Moscou nie avoir pris la centrale pour cible et rejette la responsabilité des incidents sur Kiev, mais les attaques montrent «le risque très réel d'une catastrophe nucléaire», déclare Rafael Grossi de l'AIEA.

Pékin prolonge ses exercices militaires près de Taïwan et prévoit davantage d'activités de troupes le long de sa propre côte cette semaine.

Presque rien à se mettre sous la dent aujourd'hui sur l'agenda macro. La Chine a annoncé hier une hausse de ses exportations et de ses importations en juillet. L'export est plus dynamique que prévu et l'import un peu moins.

Volkswagen: Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif relevé de 191 à 197 euros. Les familles Porsche et Piech veulent renforcer leur emprise sur Volkswagen. Pfizer négocie le rachat de Global Blood Therapeutics pour 5 milliards de dollars, selon le Wall Street Journal. Amazon va acquérir iRobot pour 1,7 milliard de dollars en numéraire. United Parcel Service négocierait le rachat de l'italien Bomi. Credit Suisse affirme qu'il n'a pas de grosse exposition au Credito Real mexicain.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent globalement en hausse. Tokyo grappille 0,26% à la cloche, Hong Kong recule de 0,81%, Shanghai avance de 0,29% et Séoul gagne 0,09%. Le future SPX progresse de 7 points et l’Europe va récupérer son retard à l’ouverture en progressant de 0,6%. Le dollar est un peu plus fort ce matin que vendredi, la paire EUR/USD évolue à 1,0183, le baril de WTI Light Crude reste plutôt faible, à 89,76 dollars tandis que l’or se stabilise à 1775 dollars l’once.

Cette semaine sera marquée par un net ralentissement des publications de résultats d’entreprises et surtout par le très important rapport américain sur les prix à la consommation, ce mercredi.

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