Gonet: l'actualité des marchés au 16 juin

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +1,26%, S&P 500 +1,22%, Nasdaq +1,15%, Russell 2000 +0,81%, SOX -0,85%, Eurostoxx -0,25%, SMI +0,22%.

Dans le monde de la finance, les ours sont un peu comme les dieux de la mythologie grecque, lorsque plus personne ne croit en eux ils disparaissent.

C’est peu ou prou ce qui est en train de se passer à Wall Street depuis six séances, durant lesquelles l’indice S&P500 (SPX) n’a fait que prendre de la hauteur. Les personnes rationnelles et instruites que vous êtes toutes et tous me diront alors: «mais que se passe-t-il donc pour que la pression acheteuse augmente à ce point dans les salles de marchés?». Sortons du rationnel voulez-vous? La hausse récente s’explique probablement par un acronyme: FOMO (Fear Of Missing Out). Personne de bonne foi ne peut justifier 32% de hausses de l’indice Nasdaq cette année. En parallèle, les annonces de la Fed de mercredi soir sont plus restrictives que prévu et Jerome Powell est clair, il n’y aura pas de baisses de taux avant la Saint Glin-Glin. Mais hier, il semble bien que le joyeux royaume des actions décide de célébrer l’absence de hausse de taux par la Réserve Fédérale mercredi soir, e basta…

On clôture près des plus hauts du jour sur les principaux indices, en revanche les semi-conducteurs (SOX) boudent, ou marquent une pause c’est selon. Tous les secteurs du SPX terminent leur séance dans le vert, l’indice casse aisément le niveau de 4400 points. Clôture à 4425 pts et prochaine résistance dans la zone de 4495 – 4505 points. Le SPX est entré en territoire suracheté depuis deux ou trois séances, il semble que tout le monde s’en fiche sur les parquets de trading, tout comme de la volatilité qui se languit à la cave et fait les yeux doux aux traders investisseurs rationnels, qui savent bien eux que le moment est venu d’acheter des options, des calls ou des puts qu’importe, le moment est venu d’acheter des options c’est ainsi, elles coûtent si peu ces jours, on se croirait chez Manor (qui lance une opération -50% avant l’été). On revient à la notion de marché suracheté, le Nasdaq100 (NDX) s’aventure dangereusement et profondément dans ce territoire obscur, que les taureaux abhorrent et ignorent bien souvent jusqu’à ce que la réalité les rattrape. Regardons un peu arrière. Depuis le premier janvier 2020, lorsque le NDX s’est retrouvé dans une telle configuration, il a soit corrigé rapidement, soit l’a fait quelques semaines plus tard. Et c’est un perma-bull qui écrit ça…

La fièvre autour de l’IA semble toujours présente, ça maintient les taureaux en forme, même papi Dow Jones est proche d’entrer en bull market. Le NDX est au plus haut depuis mars 2022, tout cela défie la logique de base, mais quelle logique anime donc les marchés m’opposerez-vous? La hausse d’hier est généralisée, 438 actions du SPX terminent leur séance dans le vert, on ressort le cash de dessous le matelas de grand-père pour l’injecter dans la bourse, ça sent le melt-up rallye à plein nez Downtown Manhattan ces jours. Le marché des options bruisse de volumes en forte hausse, les traders se positionnent notamment dans le call SPX juin 4400, qui échoit donc ce soir à 22 heures. On peut comprendre que des intervenants recherchent ce genre de stratégie à si court terme, avec un VIX à 14,50 et des RSI (Relative Strength Index) indiquant des indices en rare surchauffe.

Hier les indices US sont aussi soutenus par un décrochage du dollar, la faute à Christine Lagarde qui relève ses taux directeurs comme prévu, et refuse d’adopter une posture colombe. Résultat des courses, la paire EUR/USD monte à 1,0936. L’or tente d’en profiter et remonte péniblement à 1959 dollars par once (vendre sur la force?), le pétrole s’en sort mieux, le baril de WTI Light Crude repasse au-dessus des 70 dollars, une maigre consolation pour l’Arabie Saoudite.

Du côté des rendements obligataires US, la courbe se replie, le 2 ans traite ce matin à 4,69%, le 10 ans est à 3,75%, le spread 2 / 10 ans s’établit donc à -93 points de base, ce qui semble avoir autant d’effet sur la psyché des acteurs du marché des actions qu’une chanson de William Sheller sur Donald Trump. Tentons de revenir un minute dans un monde un tantinet rationnel: l'inversion des courbes de rendement américaines et allemandes s'accentue donc. Elle atteint des niveaux observés pour la dernière fois au début du mois de mars, juste avant la crise bancaire régionale américaine, ce qui indique des craintes croissantes dans le marché obligataire que les hausses de taux n'anéantissent les économies et n'obligent à des revirements de politique précipités. C’est la théorie, que les intervenants du marché des actions devraient considérer à nouveau lorsqu’ils reviendront sur terre.

Et puis il y a Cava Group Inc, une chaine de restauration rapide basée à Washington DC, qui se lance en bourse hier et décolle de… 99%! Précision insignifiante pour un taureau en extase, cette firme n’a jamais réalisé de bénéfices de son histoire, a creusé sa perte nette l’an passé, ne publie aucun objectif tout en indiquant que ses coûts augmentent et que sa rentabilité est en danger. Et donc +99% d’un coup, logique non? 1999 sort de ce marché!

La farandole des banques centrales se poursuit. La Banque du Japon maintient ses taux au plancher, comme le prévoyaient les économistes. Avec une inflation qui s'est enfin réveillée dans l'Archipel après des années de marasme, un marché boursier local qui a le vent en poupe et une croissance qui s'affermit, la banque centrale n'a pas vraiment intérêt à abandonner sa politique ultra-accommodante.

Au chapitre de la macro-économie, hier aux Etats-Unis les ventes au détail dépassent une fois de plus les attentes, avec un chiffre d'affaires de 0,3% m/m contre un consensus de -0,2%. Quelques révisions marginales à la baisse par rapport au mois dernier, mais cela reste cohérent avec des dépenses de consommation assez solides. Dans le même temps, les demandes d'allocations chômage maintiennent leur taux légèrement plus élevé de la semaine dernière. Ce chiffre reste faible par rapport à l'histoire (surtout si l'on tient compte de la taille de la population active), mais la tendance est désormais clairement à la hausse.

Un conflit militaire au sujet de Taïwan est probable dans les années à venir si les tensions entre les États-Unis et la Chine continuent sur leur trajectoire actuelle, déclare Henry Kissinger, bien qu'il continue à espérer un dialogue qui conduira à une désescalade. En ce qui concerne l'Ukraine, M. Kissinger inidque que Vladimir Poutine pourrait avoir du mal à se maintenir au pouvoir si la Russie était contrainte d'abandonner l'agression militaire et d'accepter un accord de paix avec l'Europe.

Au menu macro-économique du jour, la seconde estimation de l'inflation dans la zone euro sera publiée à 11h00. Aux Etats-Unis, c'est l'indice du sentiment des consommateurs de l'université du Michigan qui focalisera l'attention, à 16h00.

Fitch relève la note crédit d'Airbus de «BBB+» à «A-», perspective stable. Adobe: le titre gagne 3,5% hors séance après la publication de bons trimestriels. L'italien Generali rachète l'espagnol Liberty Seguros pour 2,3 milliards de dollars. First Quantum rejette la proposition informelle de rachat de Barrick Gold. Nissan confirme le prochain départ de son numéro deux, Ashwani Gupta. La directrice financière de Walt Disney va démissionner.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices attrapent une Wallstreetite, tout monte avec Tokyo qui progresse de 0,66% à la cloche, Hong Kong qui avance de 1,27%, Shanghai qui gagne 0,63% et Séoul qui progresse de 0,66%. Le future SPX rend 6 points et l’Europe ouvre en très légère hausse.

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