N’aurions-nous pas assisté à l’un des plus beaux «bear trap» de l’histoire boursière? Un superbe piège à ours, qui a sorti du marché une importante cohorte de petits porteurs, les pauvres doivent encore se demander ce qui leur est arrivé, tandis que la caravane des taureaux a déjà repris sa route depuis un bail.
Plus la poussière retombe sur Wall Street, plus il apparait que la poussée de fièvre du lundi 5 août est due à une combinaison toxique rare: trop de carry trade via le yen, des débouclements en masse qui forcent les intervenants à vendre des positions, notamment en actions américaines. En parallèle de très nombreux acteurs du marché des options sont shorts en calls sur la volatilité (le VIX), qui doivent racheter leurs positions et envoient le fameux indice de la peur à un niveau stratosphérique et artificiel de 65, artificiel car dans les faits la volatilité n’aurait probablement pas dû dépasser le niveau de 35, ce qui reste élevé certes, mais on constate lundi 5 août que les market makers ont fait un gros pas en arrière et n’assurent guère plus de marché, notamment en matière de produits structurés, les modèles de volatilité ont perdu le nord ce jour-là.
Aujourd’hui le marché semble avoir débouclé une grande partie des positions de carry trade et réalise que les raisons de s’inquiéter au sujet de la bourse américaines (craintes de récession) ont peut-être été exagérées il y a neuf jours. Hier les actions poursuivent leur reprise, elles ont déjà nettement dépassé leur niveau d’avant le 5 août, c’est l’indice des prix à la production aux Etats-Unis (PPI) qui sert d’excuse pour continuer d’appuyer sur les boutons d’achat. Le PPI, qui mesure les prix perçus par les entreprises pour leurs biens et services, a augmenté de 0,1% en juillet par rapport au mois précédent, ce qui est inférieur aux prévisions des économistes. Du coup les investisseurs se disent que le CPI (l’indice des prix à la consommation, qui sera publié cet après-midi) pourrait bien sortir lui aussi en-dessous des attentes. Le secteur de la tech mène la charge hier, porté par Nvidia et la plupart des autres sept magnifiques. Eli Lilly est aussi recherchée (LLY +2,61%). Starbucks décolle de 24,5%, son plus grand gain en pourcentage en une journée, après que la chaîne de cafés ait remplacé son directeur général par le patron de Chipotle. Les actions de Chipotle chutent de 7,5%. Trump Media & Technology Group, la société mère de la plateforme de médias sociaux de Donald Trump, Truth Social, perd 3,6%.
Le débat autour de la politique monétaire de la Fed se poursuit. Raphaël Bostic, président de la Fed d’Atlanta, indique qu’il souhaite voir plus de statistiques macro-économiques avant de soutenir une réduction des taux d’intérêts. Monsieur Bostic insiste de dire qu’il veut être absolument sûr de ne pas démarrer un cycle de coupes trop tôt. On sait que le patron de la Fed d’Atlanta est un faucon avéré, ses propos vont donc plutôt vers une Fed plus accommodante. Le marché obligataire va dans ce sens hier, j’y reviens, si le CPI de cet après-midi poursuit sa route vers le sud, cela constituerait un pas de plus vers un premier mouvement de la Fed à l’occasion de sa réunion du 18 septembre.
Le 10 ans US recule significativement hier après le PPI, il revient à 3,84%, son prochain support se situe à 3,67% (le bas en séance du 5 août), sa principale résistance à 4,00%. Sur le front des monnaies le dollar s’affaiblit, la paire EUR/USD se lance à l’attaque de la muraille des 1,1000, niveau actuel 1,1004. Le marché des Fed Funds continue de prévoir 3 à 4 baisses de 25 points de base par la Fed cette année encore.
On se penche sur les niveaux techniques des indices et du VIX, qui montrent tous une nette amélioration de la situation. L’indice S&P500 (SPX) renforce ses canaux haussiers de mars 2020 et octobre 2022. Il est sur le point de réintégrer celui d’octobre 2023, sa prochaine résistance se situe à 5451 pts (moyenne mobile à 50 jours) puis 5453 pts (bas du canal haussier d’octobre 2023), clôture hier soir à 5434 pts. Sur le front de la tech, c’est encore plus net avec un Nasdaq100 (NDX) qui réintègre son canal haussier d’octobre 2023 comme une fleur, récupère sa 100 jours, le niveau de 19'000 points au passage et voit sa prochaine résistance à 19'412 points, niveau à la cloche hier 19'006 points. Et que dire du VIX qui réintègre son canal baissier entamé en janvier 2022, perd 12,5% à 18,12 hier et voit son prochain support à 15,54, c’est par là que passe sa moyenne mobile à 50 jours.
Au menu macro-économique du jour, on commence avec les chiffres de l'inflation au Royaume-Uni (sortis en-dessous des attentes) et en France (un tick au-dessus des estimations). La production industrielle de la zone euro sera annoncée à 11h00. Aux Etats-Unis, l'inflation de juillet (14h30) et les stocks de brut DOE (16h30) viendront compléter le tableau.
Carlsberg revoit à la hausse ses perspectives de croissance organique pour 2024, mais les ventes du deuxième trimestre sont inférieures aux prévisions. UBS Group enregistre une forte baisse de ses bénéfices au deuxième trimestre. Straumann revoit ses perspectives à la hausse et prévoit de vendre DrSmile. Selon Bloomberg News, le département de la justice des Etats-Unis songerait à forcer une scission de Google. Google qui a dévoilé de nouveaux téléphones et d'autres gadgets alimentés par l'IA.
Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en hausse hormis en Chine où Hong Kong rend 0,59% tandis que Shanghai perd 0,60%. Tokyo grimpe de 1,11% à la cloche. Le premier ministre Fumio Kishida, aux commandes depuis la fin de l'année 2021, a annoncé qu'il quittera ses fonctions le mois prochain. Kishida n'est plus très populaire et son parti est miné par des affaires. Séoul prend 0,88% et le Nifty50 grappille 0,06%. Le future SPX traite à l’équilibre et l’Europe a ouvert en progression de 0,5%. L’or reste demandé, l’once traite à 2469 dollars, le pétrole recule très légèrement à 78,85 dollars le baril de WTI Light Crude.
En Chine, les dernières statistiques publiées indiquent que les prêts bancaires à l'économie réelle se sont contractés au mois de juillet, du jamais vu depuis 19 ans.