Craintes de stagflation – Flash boursier Bonhôte

Julien Staehli, Françoise Mensi, Pierre-François Donzé, Karine Patron et Mickaël Gonçalves, Banque Bonhôte & Cie SA

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Un 5e round de sanctions pourrait être décidé par l’Union européenne envers Moscou. Les Etats-Unis vont puiser dans leur réserve stratégique de pétrole.

L’incertitude sur le plan géopolitique couplée à la persistance de l’inflation diffusent dans les esprits un scenario macro-économique de stagflation, avec les prix qui explosent et la croissance du PIB en berne. Les rendements obligataires se sont fortement tendus, à cause du discours récent des officiels de la Fed mettant l’accent sur des hausses de taux courts potentielles de 50 points de base ces prochains mois si nécessaire. Les perspectives économiques de l’Europe se retrouvent notamment modifiées vers le bas, et surtout en Allemagne, qui repose sur la production et l’exportation.

Mais les principaux marchés boursiers ont malgré tout enregistré un rally impressionnant depuis le creux de mi-mars. En ce début de semaine, force est de constater que les négociations concernant un cessez le feu entre la Russie et l’Ukraine n’ont guère réussi à décoller ce qui tend à freiner la performance des indices. Un cinquième round de sanctions pourrait être décidé par l’Union européenne envers Moscou suite au massacre de civils ukrainiens par l’armée russe.

Pour les actions européennes, la semaine écoulée a été caractérisée par la remontée des titres du secteur automobile alors que pour les autres classes d’actifs toute l’attention s’est à nouveau portée sur la volatilité des cours de l’énergie. Le prix du pétrole brut, suite à la décision des Etats-Unis de puiser dans la réserve stratégique et compte-tenu de l’augmentation des cas de contagion au Coronavirus en Chine, a reculé d’environ 13%. Le cours du gaz a par contre été plus mouvementé à cause du bras de fer entre Moscou et l’Europe sur la question du paiement en roubles de sa fourniture. L’hypothèse d’un blocage des importations de gaz russe est désormais à l’ordre du jour.

Aux Etats-Unis, la croissance de l’emploi (+431’000 mars, +739’000 février révisée) a concerné tous les secteurs, notamment les services, contribuant à la création de près de 1,5 million de postes au premier trimestre 2022. Le marché du travail reste tendu car la main d’œuvre manque ce qui a fait grimper les salaires de 5,6% sur un an et peut faire craindre une spirale prix-salaires. Mais cette hausse est cependant inférieure à l’inflation et, vue du côté positif soutient le moral et les dépenses des ménages.

L’indice des directeurs d’achats PMI manufacturier chinois s’est contracté à 48,1 en mars, affecté par les retombées de la guerre en Ukraine et les mesures de confinement suite à la résurgence des cas de COVID-19. Mis à part le creux de mars 2020, il se situe au plus bas depuis 2016, avec une faiblesse de la demande interne et une chute des commandes à l’exportation. Ceci renforce les attentes de mesures de soutien à l’économie par Pékin.

L’essentiel en bref

 

Réserve stratégique américaine de pétrole

Les Etats-Unis prévoient d’utiliser 1 million de barils par jour de leur réserve stratégique de pétrole pendant 6 mois à partir de mai. Il s’agira de la plus importante libération jamais réalisée de la réserve stratégique américaine et de la troisième fois que Washington puise dedans en 6 mois. Ces 180 millions de barils représentent environ deux jours de la demande mondiale mais ne suffiront pas à couvrir les pertes du pétrole russe. Le président américain a demandé aux compagnies pétrolières de forer davantage pour lutter contre la hausse des prix de l’essence et par conséquent contre l’inflation galopante qui nuit aux consommateurs.

L’Opep+ de son côté a décidé de s’en tenir à son accord et d’augmenter sa production de mai de seulement 432’000 barils par jour, s’appuyant sur l’annonce du président américain ainsi que sur les confinements en Chine dus à la recrudescence de cas de COVID-19 pour ne pas l’accroître davantage.

L’administration Biden appelle les autres pays membres de l’Agence internationale de l’énergie à également libérer des barils. Cela ajouterait 30 à 60 millions de barils pour compenser les exportations russes perdues et ainsi réduire le déficit structurel d’approvisionnement et par la même occasion la flambée des prix de l’or noir.

Cette décision aiderait le marché pétrolier à trouver son équilibre en 2022, mais n’est pas une solution permanente. En effet, dès que cela sera possible, les Etats-Unis voudront reconstituer leur réserve, qui se trouve au plus bas depuis mars 2020.

Les prix de l’énergie vont continuer d’être secoués en fonction des aléas du conflit entre l’Ukraine et la Russie, ce qui nous remémore la guerre du Kippour en 1973, où les pays arabes avaient coupé les vannes aux pays alliés d’Israël, ce qui avait fait quadrupler le cours du brut.

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