L’imbroglio allemand

Axel Botte, Ostrum AM

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La semaine de Thanksgiving est souvent peu animée, mais le budget allemand a entretenu une certaine volatilité sur les taux.

La semaine financière, écourtée par Thanksgiving, s’est traduite par des volumes d’échange réduits. Le T-note s’affichait à 4,40% en clôture mercredi, avant une remontée vendredi attribuable à des prises de profit et aux perspectives budgétaires en Allemagne et au Royaume-Uni. Une hausse des emprunts publics se profile en 2024. Les spreads de crédit profitent de la faible volatilité. Les flux reviennent sur les actions dans l’espoir d’un allègement monétaire, pourtant hypothétique. Le resserrement pourrait en fait s’accélérer, les réinvestissements du PEPP étant au programme du Conseil de la BCE de décembre. Les spreads de crédit se réduisent, notamment sur le high yield. L’iTraxx Crossover s’est rétréci de plus de 80pb en un mois. La baisse du dollar continue: l’euro cote au-dessus d’1,09 dollars. Le Renminbi s’adjuge aussi 0,8% à 7,15 pour un billet vert.

Négociation difficile en Allemagne

La situation conjoncturelle reste préoccupante en zone euro. L’économie allemande s’est contractée de 0,1% entre juillet et septembre, selon la deuxième estimation. La consommation publique et privée reste un élément de fragilité, alors que l’investissement surnage, malgré la contraction du logement. La politique budgétaire est au cœur des débats, en Allemagne. La cour constitutionnelle a rejeté la décision de Berlin de réaffecter 60 milliards d’euros de prêts Covid (logés dans des fonds spéciaux) aux investissements de transition énergétique inscrits dans le budget. L’arrêt de la Cour a repoussé d’une semaine le vote du budget. Les négociations entre les différents membres de la coalition sont difficiles. Le ministre des Finances a d’ailleurs suspendu la limite d’endettement inscrite dans la constitution. Les dernières enquêtes laissent toutefois envisager une stabilisation de l’activité. La première partie de l’année restera médiocre, avant une embellie dans le sillage d’une reprise de la consommation. Aux États-Unis, la publication de l’indice de confiance des ménages (Université du Michigan) révèle une hausse forte des anticipations d’inflation à 12 mois, à contre-courant de l’amélioration significative des prix de l’essence. La baisse du pétrole s’est d’ailleurs accélérée après le report d’une semaine de la réunion de l’OPEP. L’Arabie Saoudite n’arrive pas à convaincre ses partenaires de réduire leurs quotas de production.

Le marché du crédit a consolidé sa bonne dynamique récente. Les trois-quarts des émissions de novembre se sont resserrés après leur lancement.

Les marchés financiers restent globalement bien orientés. Les marchés d’actions ont progressé de près d’1% en Europe. Le S&P est en passe d’afficher un des meilleurs mois de novembre de son histoire. Au plan mondial, on observe un net redressement des flux sur les actions depuis deux semaines, selon les données d’EPFR avec 40 milliards dollars de collecte. Le niveau des taux courts entretient les flux vers les fonds monétaires après 1’200 milliards dollars alloués en 2023. Sur le marché des Treasuries, le T-note à 10 ans se rapproche de 4,50% dans des volumes limités. L’anticipation d’un budget plus expansionniste en Allemagne a porté le Bund au-delà de 2,60%. La BCE laisse aussi entendre qu’une discussion va s’ouvrir sur la politique de réinvestissements du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (PEPP) en 2024. Il convient également de tempérer les attentes en termes d’allègement monétaire. Le rendement du Schatz remonte au-dessus de 3%. Les swap spreads ont diminué de 2pb supplémentaires la semaine passée. L’agence de dette allemande a annoncé l’arrêt des émissions d’emprunts indexés à partir de 2024. L’encours de 66 milliards d’euros est valorisé 82 milliards d’euros actuellement, compte tenu de la hausse des prix, ce qui peut être problématique vis-à-vis du frein constitutionnel sur la dette. Cette décision s’est traduite par une baisse instantanée de 9pb du taux réel allemand à 10 ans et une hausse concomitante des points morts. La demande va sans doute se reporter sur les emprunts indexés français et italiens. Les spreads souverains ont bénéficié du rebond des taux allemands, notamment la Grèce qui s’échange sous 120pb (10 ans). Sur les marchés émergents, l’élection de Milei a finalement été bien accueillie par les marchés. La nomination de l’ancien ministre des Finances du gouvernement Macri est un signal positif.

Le marché du crédit a consolidé sa bonne dynamique récente. Les trois-quarts des émissions de novembre se sont resserrés après leur lancement. Le marché du primaire totalise encore 13 milliards d’euros cette semaine, concentrés avant Thanksgiving. Les primes à l’émission se situent entre 5 et 10pb et les carnets d’ordre sont assez fournis, grâce à la reprise des flux vers les ETFs et fonds de crédit (+ 1,3 milliards d’euros sur une semaine). Le spread moyen ressort à 97pb contre swap. Les spreads high yield se réduisent dans le sillage du crossover sous 380pb.

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