Gonet: l'actualité des marchés au 30 octobre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -1,12%, S&P 500 -0,48%, Nasdaq +0,38%, Russell -1,21%, SOX +1,21%, Eurostoxx -0,87%, SMI -0,42%.

Le marché américain des actions célèbre Halloween un peu en avance. La nervosité gagne un peu plus les parquets de trading la semaine passée, on punit les moindres déceptions sans trop de discernement et on peine à se réjouir des bonnes nouvelles. Les investisseurs n’en peuvent plus d’attendre que Jerome Powell et ses amis décrètent la fin du cycle de hausses de taux, ils doivent en parallèle digérer les nombreux résultats trimestriels de sociétés, tout en gardant un œil attentif sur le conflit entre Israël et le Hamas. Même les cadors de la cote sont sévèrement punis en cas de moindre déception, voyez Alphabet qui perd environ 10% sur la semaine, ou encore Meta, qui abandonne 3,9% sur la période. Chevron chute de 13% sur 5 séances après avoir manqué les attentes des analystes. Si l’on prend un peu de recul, on constate que la moitié des entreprises du S&P500 (SPX) ont déjà publié leurs chiffres trimestriels et que ces derniers dépassent les estimations dans des proportions plus élevées que d’habitude. Sur la semaine, le SPX recule de 2,5%, le Nasdaq de 2,6% et le Russell2000 (les 2'000 plus petites capitalisations de la cote américaine) de 2,6%. En Europe on limite nettement la casse, l’Eurostoxx recule de 0,3%, le SPI de 0,4%. Je note que Hong Kong et Shanghai relèvent la tête et progressent de 1% respectivement de 2,9%.

La volatilité du SPX a rebondi ces derniers temps, le VIX évolue à 21, niveau qui n’indique pas de stress majeur dans le marché mais plutôt un retour d’une certaine aversion au risque. Sur le front des rendements obligataires, ça bouge beaucoup sur la courbe US la semaine passée avec un 10 ans qui tente de casser les 5% sans succès et traite ce matin à 4,83%. Au final il ne progresse que de 2 points de base sur la semaine. La fin du vaudeville du speaker de la chambre américaine des représentants a probablement soulagé les marchés, en revanche le dernier délai pour adopter le budget 2023 – 2024 et éviter un shut-down est fixé au 15 novembre. Le niveau des rendements obligataires reste probablement la clé de la direction que prendront les actions ces prochains jours. Au-delà de l’adoption du budget fédéral, la macro US reste solide et la Fed annonce sa décision sur les taux ce mercredi soir. Les investisseurs semblent de plus en plus enclins à investir dans les obligations, notamment les bons du Trésor US, ou encore dans le marché monétaire. S’ils recherchent des actions, ils privilégient les sociétés supposées insensibles à la conjoncture économique, présentant une bonne visibilité, peu endettées et disposant d’un bon cash-flow, les secteurs de l’aéronautique, du pétrole et de la santé semblent attirer les intervenants en cette période peu visible.

Au chapitre des matières premières, le pétrole reste plutôt calme, le baril de WTI Light Crude traite à 84,20 dollars. Les préoccupations économiques semblent reléguer au second plan les frictions géopolitiques, tandis que les stocks hebdomadaires ont augmenté aux Etats-Unis. Ajoutez à cela les prévisions de l’agence internationale de l’énergie d’un pic de la demande mondiale en 2030 et vous obtenez un baril bien amorphe.

L’or vit une nouvelle lune de miel avec le marché, l’once teste 2'000 dollars ce matin, traite actuellement à 1993 dollars et, si elle casse les 2’000 dollars, visera 2063 dollars. Ne cherchez pas bien loin, le métal jaune joue parfaitement son rôle de valeur refuge depuis le 7 octobre.

Le SPX a cassé sa moyenne mobile à 200 jours la semaine passée, il traite nettement en-dessous (4117 points à la cloche de vendredi contre la 200 dma à 4240 pts). L’indice est presque survendu, je note qu’il réagit systématiquement à un tel état, à suivre de près. Le Nasdaq100 (NDX) reste au-dessus de sa 200 jours (14180 points en clôture contre la 200 dma à 13926 pts). Le Russell2000 (RTX) teste actuellement un support horizontal important, il est tout proche d’entrer en territoire survendu, à suivre de près. Je note que le SMI est lui entré en territoire survendu et qu’il réagit systématiquement à cette configuration depuis 2020.

Je vous le disais, le marché est tendu comme une corde de violon, voyez ce qu’il fait subir à Sanofi vendredi. Le géant pharmaceutique français plonge de 18% après avoir dévoilé des objectifs prudents pour 2024 et 2025 et des résultats trimestriels timides. Sanofi annonce son intention de se séparer de son activité grand public (Doliprane, etc) pour se concentrer sur les médicaments et vaccins innovants, le marché n’en a cure, c’est pourtant une décision stratégique saluée par quasiment tous les analystes, dossier à suivre. Du côté lumineux de la cote, notre bonne vieille Logitech se rappelle à notre bon souvenir et décolle de 13% sur la semaine. Le fabricant suisse d'équipements numériques se porte bien! Au cours du dernier trimestre, le bénéfice d'exploitation est en hausse de 17% et le repli du  chiffre d'affaires (-8%) est compensé par une nette réduction des dépenses (-9%). Le groupe dévoile également des perspectives encourageantes: il revoit à la hausse ses prévisions de ventes annuelles et de résultat d'exploitation. Dans la foulée, certains analystes ont rehaussé leur recommandation ou leur objectif de cours sur le titre.

Arrêt sur image, on prend des nouvelles du franc suisse, qui s’est dangereusement approché de 0,9410 le 20 octobre (0,9417 au plus bas de la séance). Pourquoi 0,9410? C’est le bas en séance du 26 septembre 2022, si ça casse une forme de vide sidéral technique se profile, n’y pensons plus, la paire a rebondi depuis à 0,9528, ouf donc mais il faut avoir conscience que la BNS a commencé à réduire son bilan qui avait, un moment, dépassé les 1'000 milliards de CHF. Elle a donc racheté 40 milliards de CHF il y a deux semaines. Or, la BNS est toujours intervenue afin de freiner la force du franc. La crise au Moyen-Orient l’a, au contraire, fortement renforcé et particulièrement contre l’euro. Dans ce contexte, le problème du franc fort revient progressivement à la une et va inévitablement se traduire par une érosion des marges et, plus généralement, de l’économie suisse. En revanche, elle limite l’inflation. Dossier à suivre donc, dur dur le métier de banquier central suisse…

Israël élargit son offensive terrestre à Gaza, alors que Benjamin Netanyahu est critiqué pour son refus d'accepter la responsabilité de n'avoir apparemment pas su anticiper l'attaque meurtrière du 7 octobre menée par le Hamas. La campagne devrait durer de six semaines à six mois, selon l’agence Bloomberg. Les États-Unis considèrent qu'il existe un «risque élevé» de débordement régional et répondront à toute attaque de leurs troupes par des mandataires iraniens, déclare Jake Sullivan. Après avoir passé des années à développer son pouvoir d'attraction, le Qatar est mis à l'épreuve dans son rôle d'intermédiaire au Moyen-Orient.

L'UAW prolonge sa grève contre GM, qui est désormais le seul constructeur automobile de Detroit à ne pas avoir conclu d'accord avec le syndicat. Les travailleurs ont quitté les usines du Tennessee samedi. Plus tôt, Stellantis a conclu un accord de principe pour mettre fin à une grève de six semaines, suivant l'exemple de Ford.

Au menu macro-économique du jour, le marché s’intéressera en premier chef à l’estimation de l’inflation allemande d’octobre, qui sera publiée à 14h00.

HSBC publie sous les attentes au troisième trimestre et lance un rachat d'actions de 3 milliards de dollars. Siemens Energy n'a pas besoin de soutien financier de l'Etat et les discussions avec le gouvernement fédéral portent uniquement sur la possibilité de fournir des garanties, déclare le patron Joe Kaeser, pour tenter d'éteindre l'incendie sur le titre. Google va investir jusqu'à 2 milliards de dollars dans la startup d'intelligence artificielle Anthropic, selon le WSJ. Clariant rachète Lucas Meyer Cosmetics pour 810 millions de dollars. Boeing évalue la menace de fuite de données sensibles brandie par le gang de pirates Lockbit. Novartis dépose  plainte aux Etats-Unis contre Takeda, estimant qu’un ex-employé a transmis des secrets d'affaires au Japonais, selon Nikkei. L'Italie maintient le plan de KKR pour Telecom Italia. Asos, en difficulté, cherche à vendre Topshop à un détaillant américain, selon le Telegraph. Walt Disney repousse la sortie de Blanche-Neige à 2025.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en hausse, hormis Tokyo qui perd 0,95%. Hong Kong grappille 0,04%, Shanghai prend 0,12% et Séoul avance de 0,34%. Le future SPX récupère 25 points et l’Europe ouvre en progression de 0,45%.

C’est une semaine passionnante qui s’annonce pour les observateurs du marché. La banque centrale américaine revient au centre du jeu mercredi soir avec une décision de politique monétaire. Le marché ne croit pas du tout à une nouvelle hausse de taux à cette occasion, ni même lors de la prochaine réunion de décembre. Il s'attend en revanche à ce que Jerome Powell maintienne un discours légèrement menaçant sur l'évolution de la politique. Menaçant à quel point? C'est sans doute ce qui déridera ou crispera les investisseurs. Il faut aussi noter que la presse américaine écrit beaucoup sur l'annonce que doit faire le Trésor US mercredi, concernant la taille de ses prochaines émissions de dette. A l'heure où le déficit budgétaire fédéral redevient une source de tension majeure, le cocktail Fed + dette pourrait créer de la volatilité sur le marché obligataire, donc sur celui des actions par ricochet. Nous aurons aussi droit à la décision de la Banque d’Angleterre et, vendredi au rapport mensuel sur l’emploi américain, tout en digérant chaque jour les nombreuses publications de résultats de sociétés.

Les Etats-Unis ne sont pas encore passés à l’heure d’été, il feront cela dans une semaine, Wall Street ouvrira donc à 14h30 CET toute la semaine, pour clôturer à 21h30.

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