Un scénario «Anti-boucles d’or»

Joachim Fels & Andrew Balls, PIMCO

3 minutes de lecture

Principaux enseignements des perspectives cycliques de PIMCO.

L'invasion de l'Ukraine par la Russie, la mise en place des sanctions et les fluctuations des marchés des matières premières ont ajouté une couche d'incertitude encore plus épaisse à des perspectives économiques et financières déjà incertaines avant le début de cette horrible guerre.

Dans l'édition mars 2022 de nos Perspectives conjoncturelles, intitulée 'Anti-Goldilocks', nous examinons le large éventail de scénarios possibles et le potentiel de non-linéarité et de changements de régime abrupts dans l'économie et les marchés financiers. Ce billet de blog résume notre point de vue.

Perspectives économiques: un environnement radicalement incertain

Malgré les nombreuses inconnues, nous tirons cinq conclusions principales concernant les perspectives cycliques à 6 ou 12 mois qui nous semblent les plus pertinentes pour les investisseurs à ce stade. Nous partageons ici trois conclusions. Lire le document complet pour les autres.

1) Un scénario économique 'Anti-boucles d’or' - L'économie mondiale et les responsables politiques sont confrontés à un choc de l'offre stagflationniste qui est négatif pour la croissance et qui aura tendance à pousser l'inflation à la hausse. Certes, cette économie ‘Anti-boucles d’or', c’est à dire à la fois trop chaude en termes d'inflation et trop froide en termes de croissance, ne fait pas partie de notre scénario de base préliminaire, qui prévoit toujours une croissance supérieure à la moyenne et une atténuation progressive des pressions inflationnistes à partir des pics atteints dans l'ensemble des économies développées. Toutefois, les risques d'une inflation plus élevée et d'une croissance plus faible, voire d'une récession, ont augmenté.

2) Des réactions non linéaires en termes de croissance et d'inflation sont plus probables - Les perspectives de croissance et d'inflation sont assombries par des non-linéarités potentielles liées à des conditions initiales déjà fragiles. Les perturbations de la chaîne d'approvisionnement étaient déjà largement répandues en raison du COVID-19, pesant sur la production et poussant les coûts et les prix à la hausse dans de nombreux secteurs. La guerre de la Russie en Ukraine et les sanctions qui en découlent ont entraîné de nouvelles perturbations. En outre, les récents blocages liés au COVID dans certaines parties de la Chine sont susceptibles de créer de nouveaux goulets d'étranglement dans la chaîne d'approvisionnement mondiale.

3) Un choc asymétrique entraînera une plus grande divergence - La guerre en Ukraine entraînera probablement une plus grande dispersion des résultats économiques et inflationnistes entre les pays et les régions. L'Europe sera la plus touchée, tandis que l'économie américaine semble relativement isolée des effets directs de la guerre en Ukraine. La Chine et la plupart des autres économies asiatiques ont des liens commerciaux directs moins importants avec la Russie, mais seront probablement affectées par la hausse des prix de l'énergie et le ralentissement de la croissance en Europe. Dans les marchés émergents, les exportateurs de produits de base devraient en profiter, même si la hausse des prix des produits de base aura tendance à accroître les pressions inflationnistes déjà élevées dans la plupart de ces économies.

Conséquences en matière d'investissement

Dans cet environnement difficile et incertain, un élément clé de notre stratégie d'investissement consistera à mettre l'accent sur la flexibilité et la liquidité du portefeuille afin de réagir aux événements et de tirer parti d'éventuelles opportunités.

Duration

Nous prévoyons de sous-pondérer légèrement la duration, compte tenu des niveaux actuels, des risques d'inflation à la hausse et de la perspective d'un nouveau resserrement des banques centrales. Nous prévoyons de réduire les positions sur la courbe de taux, le vaste cycle de resserrement mondial étant en cours. Nous continuons à considérer les titres du Trésor américain protégés contre l'inflation (TIPS) comme un moyen raisonnable d'atténuer les risques de hausse de l'inflation.

Crédit

Le positionnement du crédit dans les portefeuilles doit se concentrer sur la résilience, la liquidité et la préservation du capital pour un large éventail de scénarios. Nous chercherons à sous-pondérer le crédit d'entreprise générique, car nous pensons que plusieurs secteurs du marché des produits titrisés offrent une meilleure qualité de crédit ou des alternatives plus éloignées du risque de défaut que le crédit d'entreprise. Au sein du crédit d'entreprises, nous prévoyons de continuer à privilégier la dette financière senior. Sur le plan géographique, nous continuerons probablement à privilégier les États-Unis par rapport à l'Europe et aux marchés émergents.

Devises et marchés émergents

En ce qui concerne les devises, dans les portefeuilles où ces positions à risque correspondent aux directives et aux attentes de nos clients, nous prévoyons de surpondérer certaines devises du G10 et des marchés émergents par rapport au dollar américain et à l'euro, en mettant l'accent sur le bêta des matières premières et les valorisations bon marché. Nous maintiendrons ces positions à un niveau relativement faible dans l'environnement incertain actuel. En ce qui concerne les pays émergents, plus généralement, nous prévoyons une exposition limitée mais continuons à rechercher des opportunités intéressantes dans cet environnement difficile.

Matières premières

Compte tenu de l'importance de l'énergie dans les coûts de production des autres matières premières, l'impact des événements en Ukraine sur l'inflation générale pourrait entraîner une hausse significative des prix, les acheteurs de matières premières cherchant à réduire leur dépendance vis-à-vis des exportations russes. Les indices de matières premières affichant un portage positif à des niveaux rarement atteints, nous pensons que les matières premières peuvent également jouer un rôle dans l'atténuation des risques d'inflation à la hausse.

Actions

Nous prévoyons d'être globalement neutres sur le risque bêta global des actions dans nos portefeuilles d'allocation d'actifs. Nous sommes désormais en fin de cycle, avec une dynamique de croissance sous-jacente encore forte mais de plus en plus vulnérable au risque de baisse. L'environnement actuel favorise les entreprises de grande qualité, plutôt que cycliques, selon nous. Nos portefeuilles d'allocation d'actifs - tout comme nos portefeuilles de titres à revenu fixe - auront tendance à privilégier la conservation de liquidités (‘dry powder’) afin de tirer parti des perturbations des marchés actions lorsqu'elles se produisent.

A lire aussi...