2022: annus horribilis ou mirabilis pour l’obligataire?

Yvan Roduit, Raiffeisen

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Depuis 8 ans, chaque début d’année amène le même refrain: ce sera un annus horribilis pour l’obligataire.

Ce mois de janvier n’a pas dérogé à la règle, même si jusqu’il y a peu, presque tout le monde pensait que les taux d'intérêt négatifs allaient durer encore longtemps. En effet, depuis la crise financière, le rendement des obligations d'Etat à plusieurs échéances est passé d'une valeur nettement positive à une valeur négative. La situation est bien claire: Depuis fin 2014, ces obligations ne rapportent plus rien. Et un simple coup d'œil au-delà de la frontière montre que ce problème n'est pas propre à la Suisse. L’obligation à 5 ans de l’Allemagne n’a que très rarement entraperçu le territoire positif depuis cette date, même si elle se rapproche de son plafond de verre.

Le consensus dans les marchés financiers table sur quatre hausses des taux directeurs qui pourraient survenir en 2022.
Retour (relatif) en grâce des obligations

Néanmoins, l’évolution récente des taux d'intérêt montre que le marché des placements à revenu fixe est en ébullition. En raison de difficultés d'approvisionnement persistantes et de la hausse des prix des matières premières et de l'énergie, le spectre d'une inflation plus élevée et même persistante a refait surface et continue de peser sur les taux d'intérêt. De leur côté, les obligations d'Etat américaines semblent intéressantes au premier coup d'œil car elles offrent un rendement plus élevé. Ces rendements devraient continuer à augmenter avec le tapering, la Réserve fédérale américaine (Fed) achetant moins d'obligations depuis la mi-novembre. La réduction de la demande devrait entraîner une baisse des prix et faire augmenter les rendements. Cet effet ne se ressent cependant pas encore en plein. Les obligations d'Etat à 10 ans se négociaient par exemple à un niveau de rendement légèrement inférieurs il y a moins d’une année. La Fed a ainsi atteint son objectif jusqu'à présent et évité un nouveau taper tantrum, à savoir une réaction violente du marché. Elle y est surtout parvenue en préparant les marchés financiers à une politique monétaire plus restrictive. Quant à elle, les obligations d'entreprises de haute qualité ont affiché des écarts de rendement au mieux constants au cours de la période. Les obligations d'entreprises de moindre qualité ont réussi à se maintenir dans un environnement relativement volatil. Toutefois, cela n'a de loin pas suffi à compenser la hausse des taux d'intérêt qui en a résulté. Dans cet environnement, les obligations de haute qualité de crédit sont celles qui ont le plus à perdre.

Alors, annus horribilis ou annus mirabilis?

Aux Etats-Unis, le programme d'achat obligataire doit être réduit progressivement de 120 milliards de dollars à zéro d'ici peu. En plus de cela, le consensus dans les marchés financiers table sur quatre hausses des taux directeurs qui pourraient survenir en 2022. La situation reste complexe pour les investisseurs avec, d'une part, l'inflation actuelle qui se situe à un niveau record et qui pèse sur les rendements réels, et d'autre part, la perspective d'une hausse des taux d'intérêt pèse sur les cours des obligations. Annus horribilis ou mirabilis? La situation pour l’investisseur obligataire s’apparentera à une marche sur une ligne de crête ou au jonglage entre plusieurs composantes du risque obligataire: le risque de taux et le risque de crédit. Pour ces deux composantes, la prudence sera de mise, laquelle devrait se traduire par une faible exposition au risque de taux d’intérêt (duration) et une recherche de rendement supplémentaire par le biais du risque de crédit, mais de manière sélective.

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