Un tiers des Suisses prêts à investir via un robo-advisor

Yves Hulmann

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Selon Legg Mason, les clients helvétiques restent toutefois réticents à travailler avec des acteurs extérieurs au secteur financier.

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La majorité des Suissesses et les Suisses admettent ne pas savoir grand-chose des conseillers robots, ou «robo-advisor» en anglais. Malgré tout, un tiers (34%) d’entre eux seraient disposés à confier une part de leur argent à des services de ce type durant les cinq prochaines années. C’est l’une des observations, quelque peu paradoxale, qui ressort de la dernière étude globale sur les investissements de Legg Mason («Legg Mason Global Investment Survey 2018») publiée en décembre. L’enquête a été réalisée en août 2018 auprès de 17’000 «investisseurs» issus de 17 pays à travers le monde, y compris en Suisse. Sont considérés comme «investisseurs» des personnes qui s’apprêtent à placer au moins 10'000 euros, ou le montant équivalent sur le plan local, au cours des douze prochains mois, le seuil minimal étant fixé à 50'000 dollars en ce qui concerne les Etats-Unis.

Seul un Suisse sur sept comprend ce qu’est un robo-advisor.

Dans le détail, seule une personne sur sept (14%) interrogée en Suisse indique «comprendre entièrement» ce qu’est un robo-advisor – contre 22% pour l’étude globale -, alors que 54% des sondés admettent ne rien comprendre à ce sujet et 32% qui indiquent comprendre «un peu» quelque chose à leur sujet. A titre de comparaison, 23% des sondés en Suisse indiquent comprendre entièrement ce qu’est un ETF. 

Pour autant, les Suisses ne sont pas frileux à l’idée de confier leur argent à une plateforme d’investissement entièrement automatisée. A la question de savoir dans quel domaine ils prévoient d’augmenter leurs investissements au cours des cinq prochaines années, 34% des Suisses citent les robo-advisors, soit presque autant que les sondés sur le plan global (37%). La première motivation à recourir à des services de gestion de fortune automatisé en ligne concerne le niveau des prix et des frais, un facteur mentionné par un quart des investisseurs suisses.

Faible confiance envers les acteurs extérieurs au secteur financier.

L’étude s’est aussi intéressée à l’avis des investisseurs à propos des acteurs non bancaires qui sont susceptibles de proposer des services financiers à l’avenir. Ici, les investisseurs se montrent très réticents à confier leur argent à des acteurs issus d’autres secteurs, à l’exemple de celui des technologies. A la question de savoir s’ils seraient prêts à acheter des fonds auprès d’une entreprise en ligne, comme Amazon, et en supposant que toutes les conditions proposées soient satisfaites, seuls 35% des investisseurs suisses seraient disposés à franchir le pas, soit nettement moins qu’à l’étranger (53%). 

En Suisse, les rares exemples de robo-advisors non liés à une banque, à l’exemple de la plateforme TrueWealth, attestent de ce phénomène: après avoir débuté en solo, le robo advisor alémanique a finalement conclu un partenariat avec une banque cantonale, relève Andreas Dietrich, professeur à l’institut IFZ rattaché à la Haute Ecole de Lucerne, et spécialiste des questions de numérisation dans le secteur financier.

Les clients suisses restent très loyaux envers leur banque.

Présentée dans le même cadre, une étude réalisée par l’institut IFZ montre que la tâche reste ardue pour les acteurs non issus du secteur financier souhaitent proposer des services bancaires. D’une part, car les Suissesses et les Suisses sont de manière générale peu enclins à changer d’établissements. D’autre part, car la numérisation des services financier ne progresse qu’à petits pas. A titre d’exemple, seules 2% des PME helvétiques ont changé de relation bancaire principale au cours des douze derniers mois et seules 3% d’entre elles envisagent de faire durant les douze prochains mois. 

L’étude de l’IFZ, qui porte sur l’année 2017, relève ici des différences en fonction du type d’établissements: ainsi, la proportion des sondés qui indiquent qu’ils «réfléchissent» à changer de banque principale et ceux qui veulent le faire n’atteignait qu’environ 3% chez Raiffeisen, 5% chez les banques cantonales et 11% en ce qui concerne les deux grandes banques. Le degré de satisfaction des clients atteignait chez Raiffeisen plus 8,2 points sur un maximum de 10, tandis qu’il se situait à 7,2 points sur 10 s’agissant des deux grandes banques. «Les clients suisses des banques sont non seulement loyaux envers leur établissement principal mais aussi satisfaits de celui-ci», conclut Andreas Dietrich, professeur à l’institut IFZ.

Vers la numérisation? Oui, mais à petits pas. 

Plus généralement, les nouveaux acteurs qui misent sur une offre de services financiers purement numérique se heurtent à un rythme d’adoption encore relativement lent. Prenant l’exemple d’UBS, l’institut IFZ observe par exemple que le nombre de transactions effectuées au bancomat n’a diminué que de 6% durant la dernière décennie. Durant cet intervalle, la quantité de papier utilisée par la grande banque, par exemple pour l’envoi des décomptes de carte de crédit ou des extraits de compte, a à l’inverse même progressé de 6%! 

La même tendance est observée dans le domaine des paiements: selon des données émanant de la BNS datant de 2018, les applications de paiement mobile ne représentent toujours que 0,5% du nombre de transactions, comparé à une part de 5% pour les cartes de crédit et de plus de 20% pour les cartes de débit. «Tout n’est pas encore numérique, loin s’en faut», relativise Andreas Dietrich.

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