
Le budget américain alimente les tensions sur les taux longs mondiaux (le T-bond à 30 ans s’échange à 5%), y compris au Japon où le 30 ans dépasse les 3,10%. Les spreads ignorent néanmoins la pression haussière alors qu’un calme précaire prévaut sur les actions, bientôt remis en cause par la communication erratique de Trump sur les tarifs.
Après la trêve tarifaire, l’attention des investisseurs se tourne de nouveau vers la situation des finances publiques aux Etats-Unis. La dérive budgétaire induit une pression à la hausse sur les taux longs sans impact démesuré, à ce stade, sur les actifs risqués. Les spreads souverains et de crédit sont stables. La question essentielle est de savoir quel niveau de taux long provoquerait une récession et élargirait les primes de risque. Le dollar a repris le chemin de la baisse. Le seul levier restant pour Donald Trump pour influer sur les taux à long terme est… de relancer la menace tarifaire tous azimuts, sur Apple à hauteur de 25% ou sur l’UE qui pourrait subir une taxe de 50% à partir du 1er juin. Bref, la toile de fond budgétaire se trouve entrecoupée d’injonctions trumpiennes vectrices de volatilité.
États-Unis, Europe, Chine: fragilités à tous les étages
Les publications américaines dépeignent un ralentissement. L’indicateur de la Fed de Chicago, intégrant 85 publications, fléchit en avril tout en restant supérieur au niveau de récession (-0,25 vs. -0,70). L’immobilier résidentiel reste faible avec un nombre de transactions limité à 4,7 millions au total. Les premiers signes d’un ralentissement des prix du logement apparaissent. Par ailleurs, la qualité de crédit du consommateur inquiète. Le moratoire sur la dette étudiante étant terminé, les défauts remontent à 8% au premier trimestre. Les retards de paiement de 90 jours et plus sur les cartes de crédit (12%) ou les prêts automobiles (5%) atteignent des niveaux inconnus depuis 2011… alors que le chômage est de 4,2% et que les salaires réels progressent. En zone euro, la croissance allemande a été révisée à 0,4% au premier trimestre grâce à la bonne tenue de la consommation et de l’investissement. Le solde extérieur s’améliore aussi. En revanche, les enquêtes de mai (IFO, PMI, INSEE) sortent en ordre dispersé, ce qui préfigure une croissance moindre au 2ème trimestre. En Chine, l’allégement monétaire se poursuit. La consommation a déçu en avril (+5,1%) alors que la production industrielle augmente de 6,1%. L’investissement direct étranger en Chine ne s’est pas encore redressé (-10,9% sur la période janvier-avril par rapport à 2024).
Les discussions budgétaires entretiennent une forte pression haussière sur les rendements réels longs. Les swap spreads intègrent aussi ce risque de crédit américain (-90pb à 30 ans). Le 30 ans japonais est au sommet depuis les années 90. La communication de Trump semble encore déclencher des retournements à la baisse des taux mais, en général, l’arme s’use quand on en abuse. Le T-note a pointé au-delà de 4,60% après les adjudications du Trésor difficiles avant de replonger sous 4,50% vendredi. Le Bund touche son sommet hebdomadaire proche de 2,70%. Les spreads souverains s’avèrent peu sensibles à la volatilité des taux. Sur le crédit, l’iTraxx crossover sera le premier à réagir à la remontée de la volatilité actions. Les spreads sur le crédit IG en euros sont plus stables autour de 90pb. Les actions terminent la semaine sur une note très négative. Seuls les services publics surnagent. La politique tarifaire affecte davantage les marges bénéficiaires que la qualité de crédit.