Sur le front des émergents, les risques de crédit se sont accrus sur les marchés frontières.
La dynamique conjoncturelle reste peu sensible à la guerre en Ukraine. Depuis avril, l’indice de l’activité économique hebdomadaire du Seco est en hausse, et l’emploi atteint de nouveaux sommets. Après une révision à la baisse en mars, nous maintenons notre prévision de croissance du PIB pour 2022 inchangée pour la quatrième fois de rang. De même, nous prévoyons toujours un ralentissement, traduit par une prévision bien plus prudente que celle du consensus pour 2023.
A l’exception de la BCE et de son homologue nipponne, toutes les banques centrales se sont mises à durcir les conditions-cadres financières, réduisant la demande de biens manufacturés suisses à l’exportation. En outre, les perspectives d’exportation pâtissent également du fait que la BNS ne va plus protéger le franc contre l’appréciation.
L’évolution de l’économie domestique va être à plusieurs vitesses: les services restent très demandés, également en raison du besoin de rattrapage après deux ans de restrictions. La solidité du marché de l’emploi soutient également la demande des consommateurs. En revanche, la hausse des coûts de financement a induit un repli dans l’activité de construction et la propension des entreprises à investir.
Outre le retrait de la politique de taux négatifs, la BNS peut réduire la pression inflationniste par une plus grande tolérance à l’appréciation du franc. Selon certains modèles, notamment ceux axés sur la parité de pouvoir d’achat des prix à la production, le franc est actuellement largement sous-évalué.
Les prix à l’importation pèsent un quart de l’indice suisse des prix à la consommation. L’effet d’une baisse de ceux-ci sur l’inflation peut donc être considérable.
L’environnement externe se dégrade rapidement pour les pays émergents. Lors de l’effondrement de la conjoncture dû à la pandémie, la Fed a considérablement assoupli sa politique monétaire et introduit un plan de relance global. Ce dernier a contribué à l’essor du commerce mondial, soutenu la disposition au risque et avec elle les marchés émergents.
Mais la page est tournée. La hausse de l’inflation oblige la majorité des banques centrales à durcir leur politique monétaire. La demande extérieure de biens s’essouffle progressivement et la guerre en Ukraine crée une incertitude géopolitique. Le tout sur fond de nette dégradation des données fondamentales de nombreux pays émergents. En dix ans, les déficits budgétaires et de la balance des paiements courants se sont fortement creusés.
Désormais, la hausse des taux exerce une pression considérable au refinancement dans une majorité de ces pays. Certains marchés plus petits et plus risqués, les «marchés frontières» sont particulièrement exposés, en Afrique, au Moyen-Orient et en Amérique latine, comme le Sénégal, la Jordanie, l’Egypte ou le Salvador.
Dans le scénario le plus défavorable, les défauts de crédit de ces pays pourraient renforcer l’aversion au risque vis-à-vis des autres grandes économies et fragiliser des Etats lourdement endettés comme le Brésil ou l’Afrique du Sud.