Quoi qu’il arrive…

Valérie Plagnol, Vision & Perspectives

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En ce jour d’élections américaines, les marchés privilégient une victoire nette et sans bavure. Au-delà du résultat, certaines réalités perdureront.

Trop tard pour se livrer au jeu des paris, et trop tôt pour se faire une idée du résultat de cette journée électorale américaine du 3 novembre 2020, qui semble encore bien incertaine. A tel point que même les observateurs les plus avertis n’osent se fier aux sondages, qui depuis de nombreuses semaines, donnent pourtant une avance claire à Joe Biden, le challenger Démocrate du Président sortant.

Quel que soit le résultat, de dures réalités économiques s’imposeront au vainqueur. A court terme, le spectaculaire rebond de l’activité du troisième trimestre ne suffira pas à panser les plaies ouvertes par la pandémie du COVID-19. D’abord parce qu’en dénombrant déjà plus de 230'000 morts, le bilan humain de la pandémie aux Etats-Unis est l’un des pires pour un pays aussi avancé. Ensuite, parce que la reprise, aussi forte soit-elle, ne compensera pas totalement les pertes du trimestre précédent. L’économie américaine devrait se contracter d’au moins 5% cette année. Enfin parce que le rebond a encore laissé de nombreux américains plus pauvres et sans emploi.

Il semble que les marchés et les investisseurs soient résolus à se satisfaire
d’un résultat présidentiel rapide et sans équivoque.

Alors que le pays affiche cette année1 un déficit de 3300 milliards de dollars, soit plus de 16% du PIB, le prochain mandat présidentiel sera marqué par des dépenses supplémentaires. D’un côté comme de l’autre, ce ne sont que promesses de nouvelles dépenses, et en premier lieu sous la forme d’un nouveau plan de soutien à l’activité et aux revenus. Un plan d’autant plus urgent que la deuxième vague de la pandémie s’amplifie. Seuls le montant et la destination du budget dépendront de la majorité au pouvoir ou de la capacité de l’exécutif à faire émerger un consensus. A cela s’ajouterait un plan d’investissement massif dans les infrastructures. Le camp Démocrate semble plus crédible sur ce point, parce que plus déterminé. A condition toutefois de disposer d’une majorité au Congrès. Du côté Républicain, Donald Trump promet de nouvelles baisses d’impôts. Mais ses arguments ne sont pas aussi porteurs qu’auparavant. Les marchés paraissent même désormais moins inquiets d’une remontée de la fiscalité des plus riches et des entreprises, dont ils pensent qu’elle sera modeste de toutes façons. Une chose est sûre, la dette du pays continuera sa progression inexorable. Quand les marchés s’en inquiéteront-ils? Au plus haut depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, la dette publique pourrait-elle finir par amoindrir le statut du dollar? Face à une Chine plus conquérante, comment ne pas s’en alarmer?

Sur le plan extérieur, même si l’on s’attend à ce qu’un Joe Biden à la Maison Blanche cherche à rétablir des relations plus stables avec les principaux leaders du monde, la question chinoise fait désormais consensus entre les deux Partis au Congrès. De même, le retrait de l’Amérique des théâtres d’opérations extérieurs est l’un des domaines de grande continuité depuis le Président Obama. Peu de changements à attendre sur le fond, sinon dans la forme.

A l’instar du Président sortant Trump, qui promet la prolongation de sa politique – baisses d’impôts, dérèglementations en matière climatique, mur du Mexique etc… Le candidat Biden – aujourd’hui favori – s’inscrit lui aussi dans la continuité … Celle de sa propre Vice-Présidence.

Mais pour l’un comme pour l’autre, les temps ont changé. Il semble que les marchés et les investisseurs soient résolus à se satisfaire d’un résultat présidentiel rapide et sans équivoque, et d’un Congrès capable de fonctionner dès l’investiture de janvier.

Plus que la continuité ou la rupture dans la politique, c’est la stabilité et la solidité des institutions qu’ils attendent désormais de cette élection, et cela, quoi qu’il arrive.  

 

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