Que faire face à un semestre riche en incertitudes?

François Savary, Prime Partners

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L’année n’est de loin pas mauvaise en termes de performance pour un portefeuille diversifié.

A l’heure où j’écris ces lignes, l’Europe n’a pas encore accouché d’un compromis sur la question du fonds de relance. Une nouvelle fois, les institutions de l’Union ont démontré leur capacité à générer des tensions, des rebondissements, des portes qui claquent ou encore combien l’esprit de compte centime des hollandais a vite pris le relais de celui tout aussi pingre des britanniques. En un mot comme en cent, le sommet européen du week-end peut conforter tout un chacun dans ses certitudes: l’Europe reste incapable d’accoucher facilement du moindre projet d’envergure et ne peut s’empêcher d’afficher des tensions, souvent bien inutiles et certainement néfastes pour la crédibilité du projet. C’est d’autant plus regrettable que beaucoup reprochent légitimement aux leaders européens de ne pas être à la hauteur de l’enjeu. Merci monsieur Rutte!

Alors que l’été bat son plein, dans des circonstances particulières il faut bien le dire, le sentiment diffus que le feu couve sous la cendre ou que les incertitudes abondent de toutes parts pour les marchés n’est pas une vue de l’esprit. On a coutume de dire que l’être humain n’aime pas le vide, ce que l’on peut également étendre aux incertitudes. A cet égard force est de constater que le second semestre qui s’ouvre risque de nous tenir en haleine, à un moment où les bourses internationales ont retrouvé passablement de hauteur après le choc du premier trimestre.

Évidemment que la question de la maîtrise de la crise sanitaire est au cœur des interrogations, d’autant plus que de celle-ci dépendra la forme que prendra la reprise conjoncturelle mondiale au cours des prochains trimestres. Dans ce contexte, si le marché peut surmonter, le cas échéant, des déceptions au cours de la saison des bénéfices qui va dominer l’actualité au cours des prochaines semaines, tout fléchissement des perspectives économiques serait difficilement supportable pour des indices dont l’évaluation a retrouvé (beaucoup) de hauteur; les bourses ont intégré le scénario d’une reprise durablement forte, ce qui pourrait être un peu «présomptueux» , tout comme l’était les prévisions catastrophistes du printemps 2020!

Incertitudes macroéconomiques donc, mais pas seulement! Il y a aussi le fléchissement récent de la devise américaine; certes, le mouvement reste modéré pour l’instant, mais il pourrait prendre de l’ampleur au cours des prochains dans le sillage d’une prise de conscience plus marquée de la position budgétaire dégradée des USA, à un moment où chacun doit garder «ses ressources d’épargne» pour financer une indispensable relance. Il ne faudrait pas que le billet vert se mette à vaciller trop rapidement, ce que l’on ne peut pas complètement exlure. En effet, le billet vert est sujet aux doutes que peut susciter l’élection présidentielle américaine. Tout est désormais incertain entre un Président, dont le bilan frise chaque jour le pathétique mais qui dispose d’une cohorte de supporters à ne pas négliger, et un candidat démocrate qui ne semble guère presser d’exposer un programme dont l’accouchement est bien compliqué. Y-a-t-il un résultat capable de créer de la stabilité et de la visibilité sur le rôle que l’Amérique entend jouer sur la scène internationale d’une part et sur le modèle économique qu’elle entend promouvoir de l’autre? De la réponse à cette question dépendra beaucoup le comportement de la devise de l’Oncle Sam et des conséquences que l’on peut attendre pour les marchés et les perspectives conjoncturelles mondiales. La marche au protectionnisme des dernières années est-elle irrépressible? La concertation a-t-elle définitivement vécu dans la gestion des relations internationales? Le projet de certains élus démocrates de briser les FAANG peut-il devenir une réalité? Autant de questions dont l’issue du «pugilat» de novembre devrait nous permettre d’y voir un peu plus clair.

Nous disions plus haut que l’être humain n’aime pas les incertitudes. Il faut se résigner, elles ne sont pas évitables et d’autant moins dans le contexte qui se dessine pour les prochains mois.
Être audacieux dans un tel contexte est une chose mais il faut certainement éviter d’être trop téméraire. Pour celui qui a résisté aux pires oracles du printemps, l’année n’est de loin pas mauvaise en termes de performance pour un portefeuille diversifié.

Il n’en demeure pas moins que si se montrer contrariant en mars pouvait faire sens, on voit mal comment on pourrait conseiller à quelqu’un de prendre des risques marqués dans le contexte actuel.
Trop de bonnes nouvelles sont pricées. Voilà pourquoi le mieux que nous espérons au cours des prochains mois est une évolution latérale des marchés dans des marges relativement larges, le temps d’y voir un peu plus clair sur les éléments susmentionnés et d’ajuster le tir en conséquence.

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