Pourquoi les marchés d’actions battent-ils leurs records?

Wilfrid Galand, Montpensier Finance

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Malgré la montée des inquiétudes, les records s’enchaînent sur les marchés qui apprécient l’équilibre monétaire et économique actuel. Seul un choc externe pourrait tout remettre en cause.

7000 points pour le CAC40, 16'000 pour le Dax et 36'000 pour le Dow Jones, portés par une vague d’optimisme, les indices actions s’envolent des deux côtés de l’Atlantique. Pourtant, entre rebond épidémique en Europe, ralentissement économique et début de retrait des banques centrales, les incertitudes restent réelles. Mais rien ne semble troubler la sérénité des investisseurs.

La très belle saison des résultats du troisième trimestre a constitué un catalyseur de premier plan à ce dynamisme: des banques américaines aux GAFAM – peut-être à l’exception d’Amazon et Apple, entravés temporairement par les pénuries de composants et les difficultés d’approvisionnement – en passant par les géants du luxe, de la santé et de l’énergie, les soutiens de la cote n’ont pas manqué. Et, cerise sur le gâteau, la COP26 a relancé l’intérêt pour les entreprises en pointe dans les solutions climatiques. Les entreprises ont, une fois encore, montré leurs capacités à s’adapter à un environnement qui change de plus en plus vite.

Mais au-delà de ces performances d’entreprises, les marchés saluent aussi un nouvel équilibre monétaire et économique favorable à l’investissement.

Sur le plan monétaire, l’annonce par la Fed, le 3 novembre, d’une première réduction des montants mensuels d’achats d’actifs, ne les a pas inquiétés outre mesure. D’abord parce que le mouvement était annoncé depuis le séminaire des banquiers centraux fin août à Jackson Hole dans le Wyoming; ensuite car les volumes injectés sur les marchés restent conséquents: 105 milliards de dollars par mois dont 70 milliards en bons du trésor.

Même la remontée récente des inquiétudes épidémiques participe aussi de ce nouvel équilibre.

Mais surtout parce que cette diminution s’est accompagnée d’un engagement clair de ne pas remonter les taux avant que «le marché de l’emploi ne soit totalement revenu à un niveau optimal». Ce dernier étant défini non seulement par le taux de chômage mais aussi par le nombre de personnes se déclarant actives sur ce marché, ainsi que par des éléments d’homogénéité par catégorie de population (âge, genre, appartenance ethnique, lieu de vie…). Autant dire que l’atteinte de ce critère repousse à plusieurs trimestres la possibilité de voir s’amorcer un début de normalisation des taux!

Et l’évolution de l’environnement économique devrait aider la Fed à rester patiente encore longtemps: le ralentissement en Chine se prolonge dans le sillage des restrictions sanitaires, de la crise du secteur immobilier et de la baisse du volume de crédit disponible dans l’économie du pays.

Ceci pèse sur le secteur des matières premières industrielles comme le cuivre ou l’aluminium et sur le prix du fret maritime qui a nettement corrigé depuis ses plus hauts de début octobre: le tarif «standard» d’un container de Shanghai à Los Angeles a ainsi baissé de 25% depuis le 1er octobre dernier, à moins de 10'000 dollars. La Chine est évidemment loin d’entrer en récession mais le moteur inflationniste mondial a perdu un de ses carburants les plus explosifs et la pression sur les banques centrales devrait de ce fait diminuer.

En fin de compte, la croissance mondiale, même si elle a clairement passé son pic, n’inspire pas d’inquiétude majeure. En effet, l’Europe, qui attend fébrilement les résultats des discussions allemandes pour un gouvernement de coalition, continuera quand même à dépenser sans compter en 2022, et les États-Unis viennent – enfin – de valider le premier volet à 550 milliards de dépenses additionnelles dans les infrastructures… tout repoussant le plan de soutien social de 1750 milliards de dollars qui aurait pu, à l’inverse, inquiéter les marchés par son gigantisme: «juste comme il faut» selon l’expression de Boucles d’Or dans le conte des frères Grimm!

Même la remontée récente des inquiétudes épidémiques participe aussi de ce nouvel équilibre. Rassurés par les exemples israéliens et surtout britanniques, les investisseurs parient que la nouvelle vague qui se dessine n’engorgera pas les hôpitaux en Europe de l’Ouest et aux États-Unis grâce aux avancées médicales et poussera parallèlement à la poursuite des soutiens budgétaires et monétaires massifs, tant appréciés des marchés.

Évidemment, un choc externe pourrait bouleverser ce bel ordonnancement: émergence d’un nouveau variant plus résistant aux vaccins, diffusion incontrôlée de l’épidémie en Chine, «accident» géopolitique dans le golfe de Taiwan ou dans une des zones instables de la planète (Moyen-Orient, marches de l’empire russe…), aggravation des perturbations dans les chaines d’approvisionnement, la liste des incertitudes est longue. En attendant, les marchés apprécient… et les investisseurs aussi!

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