Pourquoi la croissance va ralentir aux Etats-Unis

Marc Brütsch, Swiss Life Asset Managers

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L’inflation sous-jacente se maintiendra à son niveau actuel de 2,4% avec l’entrée en vigueur de nouveaux droits de douane.

©Keystone

Nous avons récemment revu en baisse de 1,8% à 1,5% notre estimation de PIB américain pour 2020, dans l’attente d’un tassement progressif de la croissance à partir de son rythme trimestriel actuel. Deux raisons à cela: premièrement, nous ne souscrivons pas à l’optimisme récent quant à l’issue du conflit commercial sino-américain. Le «mini-accord» imminent élimine certes certains risques extrêmes d’escalade du conflit, mais nous sommes plus pessimistes quant à la conclusion ultérieure d’un accord plus complet en 2020, qui supprimerait les droits de douane existants. Si l’on ajoute l’incertitude politique alors que se rapproche l’élection présidentielle américaine de 2020, il semble évident que les «instincts animaux» (et donc l’investissement) resteront au plus bas. Deuxièmement, nous tablons sur un tassement de la croissance de la consommation privée par rapport à son haut niveau actuel en raison du ralentissement des créations d’emplois. Le processus a déjà commencé et on peut déduire des composantes liées à l’emploi des enquêtes auprès des entreprises que le ralentissement se poursuivra ces prochains mois. Cela dit, nous n’attendons pas de réelle récession sachant que les conditions financières restent favorables suite aux dernières mesures de détente de la Réserve fédérale.

L’attitude à l’égard du Brexit s’est complètement
retournée en quelques semaines.

Après trois mois de sursaut, l’inflation sous-jacente est de nouveau retombée de manière inattendue en septembre. Nous pensons toutefois qu’elle se maintiendra à son niveau actuel de 2,4% avec l’entrée en vigueur de nouveaux droits de douane en septembre et une croissance des salaires toujours correcte. Avec l’atténuation des effets de base négatifs des prix de l’énergie, nous attendons une inflation totale en hausse, jusqu’à un pic local en février 2020 aux alentours de 2,3%.

Sortie sans accord improbable au Royaume-Uni

L’attitude à l’égard du Brexit s’est complètement retournée en quelques semaines. De manière tout à fait inattendue, le Royaume-Uni et l’UE ont élaboré une solution pour la question irlandaise qui pourrait, en principe, être validée par une majorité de députés britanniques. L’existence d’un projet acceptable a considérablement réduit le risque d’une sortie sans accord et donc fortement tiré la livre à la hausse. Nombre d’obstacles demeurent toutefois avant l’adoption de la législation requise outre-Manche et la ratification effective de l’accord d’ici au 31 janvier, échéance de la nouvelle prolongation. A ce jour, ce calendrier n’est pas tenable avec la composition actuelle du Parlement, ce qui signifie que le pays s’achemine vers des élections anticipées en décembre. Idéalement, des élections renforceraient la légitimité du gouvernement actuel ou futur à donner le cap. L’incertitude reste donc forte pour les semaines qui viennent mais il nous semble improbable que le spectre de la sortie sans accord revienne hanter les investisseurs, qui pourront de nouveau se concentrer sur l’économie, en piètre état et qui ne repartira sans doute pas l’an prochain. Le moral des entreprises restera déprimé tant qu’elles n’en sauront pas plus sur le cadre réglementaire à long terme avec l’UE et que les exportations resteront pénalisées par le rebond de la livre.

L’inflation totale et sous-jacente est ressortie à 1,7% en septembre, un peu en dessous de nos attentes, ce qui a de quoi surprendre compte tenu de la dépréciation passée de la livre et d’une croissance des salaires très soutenue, toujours proche de 4% sur un an. Quoique le rebond récent de la livre doive atténuer certaines pressions inflationnistes à court terme, nous prévoyons toujours un retour de l’inflation totale et sous-jacente vers l’objectif de 2% fixé par la Banque d’Angleterre pour le premier trimestre 2020.

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