Plus de postes de direction pour les femmes

Audrey Kaplan, Robeco

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L'égalité hommes-femmes permettrait d'accroître le PIB par habitant de l'UE de 9,6%.

À la fin de l'année dernière, le Parlement européen a imposé à toutes les entreprises cotées sur les marchés boursiers de l'UE de veiller à ce qu'au moins 40% des membres de leur conseil d'administration ou à ce qu'au moins un tiers des administrateurs soient des femmes d'ici 2026. Les entreprises qui ne se conforment pas à cette obligation doivent «communiquer et expliquer»  en quoi le processus de sélection est objectif et non discriminatoire. Si les entreprises n'atteignent pas les objectifs et ne fournissent pas d'explications satisfaisantes, elles encourent des amendes et le rejet des candidats élus au conseil d'administration. Bien que certains États membres aient déjà mis en place des quotas, cette nouvelle loi est la première exigence unifiée et contraignante de l'histoire de l'UE.

Une chance d’accroître le PIB

Le taux d'emploi des femmes en âge de travailler dans l'UE est de 66% et les femmes représentent 60% des nouveaux diplômés universitaires. Pourtant, en dépit de leurs compétences et de leur présence dans la population active, la part des femmes dans les conseils d'administration des sociétés cotées en bourse de l'UE n'est que de 31,5%. Dans certains États membres, ce chiffre est inférieur à 10%. Selon l'Institut européen pour l'égalité entre les hommes et les femmes, l'amélioration de l'égalité entre les hommes et les femmes permettrait d'accroître le PIB par habitant de l'UE de 9,6% (soit 3000 milliards d'euros) d'ici à 2050, ce qui contribuerait davantage au PIB par habitant que les réformes du marché du travail et de l'éducation.

Un puissant levier

Aussi, Les quotas ont été un puissant levier pour promouvoir l'égalité des sexes et améliorer la diversité, du moins dans les conseils d'administration. Les entreprises des pays de l'UE qui disposent d'une forme de mandat pour l'égalité des sexes ont une représentation féminine plus importante dans leurs conseils d'administration que celles qui n'en ont pas (30,4% contre 16,6%). En outre, les politiques plus strictes, assorties de sanctions en cas de non-respect, sont plus efficaces que les mesures plus souples et volontaires. La Norvège, la France et l'Italie - pays qui combinent des quotas plus élevés et des sanctions contraignantes - peuvent se targuer d'une représentation des femmes dans les conseils d'administration de 45%, 44% et 36% (contre 4%, 7% et 10%), respectivement. L'expérience de l'UE se reflète dans les marchés développés du monde entier: sans quotas, les salles de conseil d'administration sont largement inaccessibles aux femmes.

En 2021 et 2022, les femmes représentaient environ 5% des PDG dans le monde. Les chiffres de l'UE n'étaient que légèrement meilleurs, avec 7 à 8%.

En outre, les quotas de genre sont également appréciés par les investisseurs. Aux États-Unis, en l'absence de mandats fédéraux, les investisseurs sont intervenus pour exiger plus de femmes dans les conseils d'administration. Les campagnes menées par les «trois grands» gestionnaires d'actifs, Blackrock, Vanguard et State Street, ont contribué à multiplier par 2,5 le nombre de femmes administrateurs dans les entreprises américaines cotées en bourse entre 2016 et 2019. Même le Nasdaq a instauré des exigences en matière de diversité des conseils d'administration pour toutes les entreprises cotées à la bourse.

Des statistiques qui donnent à réfléchir

Ainsi, les législateurs européens espèrent que le fait de donner aux femmes une voix unifiée devrait réduire les inégalités de salaire, de rémunération et d'avancement pour les femmes au-delà de la salle du conseil d'administration. Mais les recherches menées jusqu'à présent révèlent que si les quotas sensibilisent le public et améliorent la gestion et l'engagement des conseils d'administration, ils ne contribuent guère à renforcer l'égalité entre les sexes en dehors des salles de conseil. En Norvège, le premier pays à avoir adopté une législation nationale radicale, la part des femmes dans les conseils d'administration a bondi de près de 40%; pourtant, les ratios et les salaires des cadres supérieurs restent inchangés.

C'est essentiel, car pour maximiser les avantages de la diversité des sexes, davantage de femmes devraient siéger aux postes de direction. McKinsey estime que les entreprises qui se situent dans la tranche supérieure de 25% pour la diversité des sexes aux postes de direction ont 15% plus de chances d'obtenir de meilleurs résultats. Une étude de Crédit Suisse a montré que les entreprises comptant au moins 20% de femmes parmi leurs dirigeants généraient un «dividende de genre», qui se traduit par des marges d'exploitation et des flux de trésorerie plus élevés.

Malgré les avantages, la situation des femmes dans les postes de direction est préoccupante. En 2021 et 22, les femmes représentaient environ 5% des PDG dans le monde. Les chiffres de l'UE n'étaient que légèrement meilleurs, avec 7 à 8%.

Quels sont les résultats de la Suisse?

En Suisse aussi, les progrès sont lents, même si les Suisses ont beaucoup progressé en termes d'égalité des sexes depuis que les femmes ont obtenu le droit de vote en 1971. La plupart des indicateurs montrent une amélioration progressive, mais il reste encore beaucoup à faire, notamment en ce qui concerne les quelques facteurs pour lesquels la Suisse fait partie des pays les moins performants d'Europe, comme l'équilibre entre les sexes dans les conseils d'administration ou le nombre de femmes cadres supérieurs ou dirigeants.

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