Peut-on attendre une embellie pour la dette émergente en 2019?

Diliana Deltcheva, Candriam

2 minutes de lecture

Dans un environnement mondial précaire, les fondamentaux des marchés émergents restent globalement stables.

©Keystone

Après deux années de performances remarquables, l’année 2018 a été difficile pour la dette émergente. Tous les segments ont enregistré des performances négatives: Dette émergente corporate (-2,9%), dette émergente souveraine en devise forte (-6,5%), dette émergente en devises locales (-8,3%) et devises émergentes (-9,6%). 

Les nombreux vents contraires (différentiels de taux d’intérêt avec les Etats-Unis, dollar américain plus fort, guerre commerciale, décollecte …) qui ont soufflé sur les marchés en 2018 pourraient disparaître en 2019. A ce titre, nous sommes prudemment optimistes sur les perspectives de la dette émergente pour l’année prochaine.

Il est probable que le dollar efface partiellement ses gains de 2018.

L’économie américaine devrait poursuivre son expansion durant le premier semestre avant de ralentir dans la seconde partie de l’année, lorsque les effets des mesures de relance budgétaire se seront estompés et que les taxes douanières commenceront à peser sur l’économie du pays. La Fed devrait continuer à durcir sa politique monétaire.

Il est probable que le dollar efface partiellement ses gains de 2018, au fur et à mesure que le différentiel de croissance entre les Etats-Unis et le reste du monde diminue.

La croissance au sein de la zone euro devrait se stabiliser, ou tout du moins, son différentiel avec les Etats-Unis devrait cesser de s’accentuer. Les risques sont principalement politiques : solution pour le Brexit avant mars, avancées à moyen terme sur le budget italien, transition au sein de la présidence de la BCE au 1er trimestre, élections au parlement européen en mai. 

La croissance chinoise continuera de ralentir pour s’établir un peu au-dessus de 6% en 2019, contre environ 6,5% en 2018. Si les Etats-Unis devaient relever les droits de douane de 25% sur l’ensemble de leurs importations en provenance de Chine (504 Mds $ en 2017), cela retirerait environ 1 % à la croissance chinoise. Pour l’instant toutefois, une trêve a été décidée à Buenos Aires. De plus, le gouvernement chinois n’hésitera pas, si besoin, à décider de nouvelles mesures de soutien budgétaire.

Les tensions commerciales alimentées par l’administration américaine
devraient s’atténuer après une forte escalade en 2018.

Les prix des matières premières, et notamment du pétrole, devraient se stabiliser autour de leurs niveaux actuels et s’apprécier de 0-10% en 2019, soutenus par une demande accrue liée à la relance budgétaire en Chine et au rétablissement de contraintes sur l’offre.

Les tensions commerciales alimentées par l’administration américaine sont difficiles à anticiper en l’absence d’un objectif de long terme ou d’une stratégie de sortie de crise, mais elles devraient néanmoins s’atténuer après une forte escalade en 2018. 

Dans cet environnement précaire, les fondamentaux des marchés émergents restent globalement stables. La croissance des pays émergents se stabilise autour de ses niveaux de 2018, avec une dispersion plus importante entre l’Europe de l’Est et l’Asie, qui ralentissent, et l’Amérique Latine, qui se redresse à la marge. L’inflation dans les marchés émergents reste modérée en raison des écarts de production et des vents contraires qui freinent la croissance. Les données de soutenabilité de la dette émergente n’indiquent pas de problèmes de solvabilité à court terme. 

Le fort endettement du secteur privé chinois
est une problématique de moyen terme.

Depuis la crise financière mondiale, les niveaux de dette dans les pays émergents se sont dégradés; cependant, si la dette publique moyenne s’élève à 51% du PIB, elle reste bien inférieure à celle observée dans les pays développés autour de 100% du PIB. La dette privée au sein des pays émergents est élevée, à 113% du PIB ; mais en excluant la Chine, ce chiffre retombe à un niveau plus raisonnable de 76% du PIB. Le fort endettement du secteur privé chinois est une problématique de moyen terme qui ne sera pas résolue en 2019.

De nombreux risques pourraient venir impacter ces hypothèses - notamment sur nos perspectives de croissance Etats-Unis/Chine, l’évolution des taux américains et les tensions sur le commerce mondial. Nous continuerons de les suivre très attentivement. 

L’accumulation de vents contraires en 2018 a entraîné les primes de risque sur les devises fortes et les devises locales vers des niveaux particulièrement élevés. Compte tenu de nos perspectives relativement positives, les valorisations offrent des points d’entrée sur la dette émergente en devise locale et en devise forte bien plus attrayants que fin 2017; par ailleurs, les facteurs techniques sont favorables. Nous attendons des performances de l’ordre de 5% pour la dette émergente en devise forte et locale, sur un horizon d’un an.

A lire aussi...