Mr Too Late contre TACO

Michel Saugné, La Financière de l’Echiquier (LFDE)

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La dernière réunion de la Fed a donné lieu à une nouvelle passe d’armes entre le président américain et le président de la Fed.

La dernière réunion de la Fed a donné lieu à une nouvelle passe d’armes entre le président américain, récemment affublé du surnom de TACO pour «Trump Always Chicken Out»1 et le président de la Fed, rebaptisé par Donald Trump, «Mr Too Late» pour sa supposée incapacité à baisser les taux rapidement. L’affrontement des deux hommes les plus puissants des Etats-Unis prend peu à peu les allures d’un match de catch.

D’un côté du ring, on retrouve ainsi Donald Trump, dans une tactique d’attaquant, multipliant les prises spectaculaires. Ainsi, lors d’une interview donnée dans les jardins de la Maison Blanche le 18 juin dernier, il a de nouveau qualifié Jerome Powell «d’idiot», lui reprochant la posture attentiste de la Fed, et l’enjoignant à baisser immédiatement ses taux d’au moins 1% et jusqu’à 2,5%, afin d’alléger le fardeau des intérêts sur la dette américaine. Il est allé jusqu’à se poser ouvertement la question de savoir s’il était possible de candidater personnellement à la tête de la Fed, la fin de mandat de J. Powell étant prévue en mai 2026.

De l’autre côté du ring, Jerome Powell adopte une stratégie défensive se gardant de commenter les effets de manche de Trump. Farouche gardien de l’indépendance de l’institution qu’il préside, il s’adonne à l’art de l’esquive face aux assauts répétés de son adversaire. Mais son temps est compté, son mandat s’achevant dans moins d’un an.

La perspective de la nomination d’un nouveau président de la Réserve fédérale ouvre la voie aux spéculations. Les sites de paris en ligne américains offrent déjà une idée des prétendants crédibles. Et, Kevin Warsh, ancien membre de la Fed, fait pour le moment figure de favori. Son nom avait déjà circulé en 2017, mais Trump avait finalement choisi Jerome Powell. Pourtant réputé hawkish, c’est-à-dire penchant du coté restrictif sur l’échiquier des gouverneurs, il avait d’ailleurs claqué la porte de la Fed dans un contexte d’hostilité face à l’ampleur des rachats d’achats d’actifs. 

Pour le moment, le marché de taux anticipe une réduction progressive et linéaire d’environ 4 baisses de 0,25% sur un an. Mais il y a fort à parier que la transition à la tête de l’institution marquera une rupture. D’abord sur l’indépendance de la Fed face au pouvoir exécutif. Ensuite sur la trajectoire des taux qui pourrait, au moins partiellement, suivre les directives de la Maison Blanche. Reste à savoir comment les marchés financiers réagiront dans pareil cas de figure. Seront-ils soulagés si la politique monétaire devenait radicalement accommodante à l’été 2026? Ou au contraire, se détourneront-ils un peu plus des actifs américains face à la perte d’indépendance?

D’ici là, comme dans tout combat de catch bien scénarisé, les revirements de situations spectaculaires pourraient être nombreux.

 

Opinion rédigée le 20 juin 2025

 

1 Trump se dégonfle toujours

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