Les investissements en Chine sont à considérer dans le long terme

William Chuang, AXA Investment Managers

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Les modifications réglementaires survenues en Chine ne devraient pas faire paniquer les investisseurs. Les perspectives de croissance à long terme restent intactes.

Les récentes mesures sévères prises par la Chine à l’encontre des sociétés technologiques et des programmes éducatifs privés ont pris les marchés à contre-pied. La démarche adoptée par Pékin est toutefois en adéquation avec la stratégie que le gouvernement poursuit dans le long terme et qu’il a esquissée à la mi-août 2021 dans son plan quinquennal: les contrôles réglementaires seront renforcés dans les domaines tels que la sécurité nationale, l’économie numérique et le système de santé publique.

Ces importantes modifications réglementaires ont engendré de l’insécurité et conduit à une perturbation des marchés. Depuis la suspension de l’introduction en bourse de Ant Group, en novembre 2020, des sociétés technologiques de premier plan ont subi d’importantes pertes de cours. Or, les géants de la haute technologie remplissent un rôle essentiel dans l’encouragement des innovations dans leur propre pays et attirent des capitaux étrangers. Pékin doit adopter une approche qui garantisse une concurrence équitable tout en préservant la capacité d’innovation et la vitalité de ces entreprises, de même que l’intérêt qu’y portent les investisseurs. Cela requiert des réformes et une communication qui laissent présager d’une approche plus modérée et d’une plus grande transparence.

L’équité sociale et la prospérité se retrouvent en avant-plan.
Ne pas perdre de vue l’avenir

Cependant, les investisseurs feraient bien de porter leur regard au-delà des récentes mesures prises par Pékin, car il existe trois bonnes raisons de rester engagé sur le long terme dans la vision chinoise.

1. Le changement de politique indique que le développement économique et social de la Chine sont des objectifs prioritaires de long terme.

Les restrictions prévues dans les domaines de la technologie et de la formation, quoique surprenantes pour les investisseurs, peuvent être vues comme des initiatives visant à soutenir les efforts entrepris pour réduire les inégalités dans le pays. L’équité sociale et la prospérité se retrouvent en avant-plan. Dans la conception de Pékin, ces objectifs peuvent être atteints grâce à des mesures énergiques, appliquées à brève échéance et destinées à s’avérer fructueuses à long terme. Ainsi, une meilleure qualité de la formation scolaire obligatoire permettrait, par exemple, d’éviter que les parents se voient contraints de recourir à des cours de soutien privés, ce qui conduit à des inégalités.

2. Les restrictions touchant les domaines technologique et éducatif ont pour but d’ajuster les conditions de concurrence par le truchement de corrections apportées aux dispositions comparativement moins strictes de la législation antitrust.

Cela fait plus de 20 ans que la Chine dispose d’une législation en matière de protection des données. La loi sur la sécurité des données, adoptée récemment, ainsi que la future loi pour la protection des données personnelles, contribueront à clarifier la situation quant à la responsabilité des entreprises en la matière. En même temps, la législation antitrust en vigueur en Chine est moins stricte que les dispositions correspondantes aux Etats-Unis ou en Europe. On serait donc en droit de faire valoir qu’en matière de contrôle des géants de la Toile, qui connaissent une croissance fulgurante, Pékin ne fait que rattraper son retard.

Restreindre des secteurs représentant un intérêt stratégique pourrait conduire à ce que de futurs investisseurs se montrent plus productifs.

Or, restreindre des secteurs représentant un intérêt stratégique pourrait conduire à ce que de futurs investisseurs se montrent plus productifs, par exemple en engageant davantage de ressources dans la recherche et le développement et moins dans les activités de commercialisation.

Par ailleurs, la recherche de meilleures prestations et innovations - en lieu et place d’une concurrence néfaste ou d’abus de puissance de marché - offre aux entreprises de bonnes perspectives dans les secteurs qui soutiennent la vision globale de Pékin en matière d’indépendance technologique: intelligence artificielle, composants semi-conducteurs, 5G, robotique, technologie de fabrication avancée et énergie propre.

3. En Chine, la politique emprunte rarement la voie directe, et se mettre au diapason des perspectives de Pékin peut aider les investisseurs étrangers à se focaliser sur un développement à long terme.

Les événements récents ne modifient pas les perspectives économiques de la Chine, globalement positives. Le cadre réglementaire saura mûrir avec le développement économique. L’objectif déclaré du gouvernement chinois est une croissance durable, de qualité - et en substance, le gouvernement fait savoir aux entreprises concernées: «Vous pouvez continuer à croître, tant que vous ne mettez pas en péril la sécurité nationale.»

Regagner la confiance des investisseurs 

Tant qu’il n’existera pas de cadre plus clair ou plus fiable pour les secteurs stratégiques, l’humeur des investisseurs restera sans doute plutôt morose. Les investisseurs devraient malgré tout s’efforcer de ne pas mal interpréter les interventions de régulation et de ne pas y réagir de façon excessive. En outre, il est également utile d’engager un processus actif d’allocation d’investissement de type «bottom up» au lieu d’opter pour une approche «top down».

A long terme, il est vraisemblable que la confiance des investisseurs se renforcera - à condition que le gouvernement communique mieux sur sa politique et que les diverses mesures prises viennent former un ensemble plus lisible. Les risques de nature réglementaire ne sont pas une nouveauté en Chine. Par conséquent, ils doivent être évalués en gardant à l’esprit les chances de croissance, qui demeurent excellentes.

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