Les bienfaits de l’investissement contracyclique

Bruce Crochat, BCGE

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Certaines entreprises ont continué d’investir malgré la pandémie accroissant leurs parts de marché.

©Loris von Siebenthal

Malgré des «plus haut» historiques, le marché suisse des actions continue d’offrir d’excellentes opportunités d’investissement. En effet, la hausse récente ne résulte pas d’un optimisme excessif, mais repose sur de solides fondamentaux qui se sont encore améliorés malgré la pandémie. La performance de l’indice SPI, se monte à 20,5% sur 1 an (au 23 juillet 2021) et se décompose de la manière suivante: le réinvestissement du dividende a eu un impact positif de 3,2%, le multiple de valorisation P/E s’est contracté de -2,3% et la croissance des bénéfices a contribué pour 19,6%. Cette performance boursière va donc de pair avec la performance économique des entreprises suisses. 

Certaines de ces performances étaient attendues, comme Roche avec son activité de diagnostic, Lonza et ses capacités de production de la substance active du vaccin Moderna, Logitech avec ses périphériques permettant le télétravail ou moins connu, Interroll, leader mondial de l’intralogistique, qui a été porté par la forte accélération du commerce en ligne. D’autre l’étaient moins, comme Straumann qui a bénéficié d’un certain Zoom Boom (augmentation de la demande de soins esthétiques, y compris dentaires, faisant suite à l’utilisation plus importante de vidéoconférence et donc au fait de se voir plus souvent) ou encore Geberit, les gens ayant profité d’être plus souvent à leur domicile et d’y rénover leurs sanitaires. Les gagnants de la crise sont pourtant beaucoup plus nombreux. 

La pandémie a souligné la flexibilité et l’habilité des entreprises suisses
à faire preuve d’une grande discipline de coûts tout en continuant d’investir.

En effet, la pandémie a surtout souligné la flexibilité et l’habilité des entreprises helvétiques à faire preuve d’une grande discipline de coûts tout en continuant d’investir tant en recherche et développement que dans leurs capacités de production. La haute valeur ajoutée de leurs produits et services, couplée à des bilans très sains et riches en liquidités expliquent très certainement cette vision à long terme d’investissements au travers du cycle. Cette stratégie contraste avec des concurrents qui, face à l’importante incertitude, ont coupé certaines dépenses critiques et retiré des capacités de production afin de protéger leurs liquidités. 

De nombreuses entreprises suisses ont ainsi gagné des parts de marché durant la pandémie, comme par exemple Sika et VAT Group. La société zougoise, leader mondial de la chimie de la construction (matériaux, étanchéité, collage), a largement surperformé ses concurrents en 2020 en affichant une croissance de +3,4% alors que ces derniers ont accusé un recul de -5,1% de leur chiffre d’affaires. Ce dynamisme s’est également accompagné d’une forte progression de la rentabilité, la marge opérationnelle gagnant 1,4 point de pourcentage à 14,4%. Cette excellente performance s’est accélérée en 2021, avec une croissance organique de 22,4% des ventes sur la première moitié de l’année et une marge qui continue de progresser, en dépassant pour la première fois la barre des 15% (15,4%). Fort de ce premier semestre, la société a relevé ses perspectives annuelles et a confirmé ses objectifs à horizon 2023. 

VAT Group, leader mondial des vannes à vide, essentielles dans la production notamment de semi-conducteurs, est également un parfait exemple d’entreprise ayant su tirer son épingle du jeu dans un environnement difficile et imprévisible. En 2020, la société a affiché une croissance de 21% de ses ventes et une marge opérationnelle record à 31,4%. Bien que déjà 10 fois plus important que le numéro 2 du secteur, la société saint-galloise a encore renforcé sa position de leader en augmentant sa part de marché de 49% à 55%, surtout grâce à ses capacités de production et à une chaîne d’approvisionnement diversifiée et performante. Pour VAT également, le premier semestre 2021 accélère fortement et affiche une progression de la profitabilité, avec des ventes en hausse de +30% et une marge opérationnelle supérieure à 33,5% soit une augmentation de 3.8 points de pourcentage par rapport au premier semestre 2020. 

Il y a bien quelques nuages à l’horizon
mais qui semblent aujourd’hui surmontables.

Tout comme Sika et VAT Group, de nombreuses entreprises continuent de bénéficier de leurs investissements durant la crise. Nous assistons ainsi depuis le début juillet à des avertissements positifs sur résultats, ces derniers se révélant bien meilleurs que précédemment communiqués au marché. C’est surtout vrai dans le riche secteur industriel des petites et moyennes capitalisations, ou récemment des sociétés comme Comet, Komax, Huber+Suhner, Bossard, SFS, Belimo ou encore u-blox ont annoncé un très bon premier semestre et ont revu leurs perspectives pour l’année entière à la hausse. 

La grande majorité des entreprises auront au moins retrouvé les niveau pré-crise de 2019 déjà cette année, soit largement plus tôt que ce qu’elles prévoyaient encore l’année passée à la même époque. Cette excellente performance devrait se confirmer sur le deuxième semestre ainsi qu’en 2022. Il y a bien quelques nuages à l’horizon mais qui semblent aujourd’hui surmontables, tant sur la gestion des hausses de prix des matières premières (compensées par des hausses de prix) que sur la pénurie de certains composants électroniques (neutralisée grâce à une gestion des stocks prudente et d’excellent rapport avec les fournisseurs). Reste enfin le scénario d’une régression pandémique, qui pourrait tant mettre un frein à cette reprise qu’à nouveau offrir une opportunité de différenciation pour les sociétés helvétiques.

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