La microfinance, un champ résistant aux virus

Aleksandr Eryomin, Mikro Kapital Management

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La flexibilité des petites et microentreprises s’est avérée un atout dans la crise COVID.

A la fin du premier trimestre 2021, les retards de remboursement des prêts dans nos portefeuilles avaient diminué de moitié par rapport à ceux de la même période de 2020 alors que dès le mois de juin 2020, ils étaient déjà revenus à leurs niveaux d’avant la pandémie. Ce résultat découle de la combinaison de plusieurs facteurs. En premier lieu, les petites et microentreprises sont, par nature, habituées à vivre dans l’instabilité: rester viables est souvent une question de survie. Elles possèdent donc des capacités d’adaptation et de résilience bien supérieures à la moyenne des entreprises.

En second lieu, la proximité vis-à-vis des débiteurs permet de minimiser les risques. Grâce à une stratégie de construction et d’acquisition d’un réseau d’établissements de microfinance locaux, il est possible de contrôler toute la chaîne de valeur et donc de réduire les risques, de maximiser les synergies, d’adapter l’offre au plus près des besoins réels des entreprises. De plus, le fait d’éviter les intermédiaires permet de limiter les coûts et d’accroître d’autant les performances des investissements.

L’activité n’est pas cantonnée aux prêts. Elle englobe de nombreux services tels que le leasing, l'affacturage ou encore le financement participatif.
Diversification tous azimuts

En troisième lieu, la diversification est un puissant outil de réduction du risque débiteur. Ainsi, à l’heure actuelle, nos portefeuilles de prêts sont répartis sur quelque 150’000 entrepreneurs! Ces derniers sont localisés dans les nombreux pays traversés par les routes de la Soie : de l’Italie à la République tchèque, ils englobent également la Roumanie, la Moldavie, la Biélorussie, la Russie, le Kazakhstan, l’Arménie, l’Ouzbékistan et vont jusqu’au Tadjikistan et au Kirghizstan.

A cette diversité géographique s’ajoute une vaste palette de secteurs qui vont du domaine manufacturier (en particulier au travers des prêts aux artisans) à l’agriculture, laquelle est prépondérante dans nombre de pays de cette zone, en passant par la logistique et la construction.

En outre, l’activité n’est pas cantonnée aux prêts. Elle englobe de nombreux services tels que le leasing, l'affacturage ou encore le financement participatif. Les besoins de la clientèle entrepreneuriale de ces pays en fort développement vont en effet bien au-delà des services financiers traditionnels. Constatant par exemple que bon nombre de clients n’ont pas besoin de prêts destinés à l’achat de véhicules, mais plutôt de services ponctuels ou à long terme de location de véhicules, nous avons développé des solutions d’autopartage. Elles ont rencontré un tel succès qu’en moins de six ans, notre entreprise d’autopartage, Delimobil, se classe parmi les plus importantes au niveau mondial.

La crise du COVID a également servi d’accélérateur au processus de numérisation de la microfinance.

Outre ces différents garde-fous, la gestion des risques tient une place cruciale dans notre activité. Les risques sont analysés en continu et en mettant en œuvre des processus reconnus, notamment ceux qui ont été développés dans le cadre des projets de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) destinés aux PME. Toutes les décisions d’octroi de prêts sont prises de manière collective et, selon les cas, avec les experts du service responsable de la gestion du risque débiteur. Chaque crédit doit être assorti de garanties importantes fournies par l’emprunteur et, dans le cas du microleasing, les biens loués appartiennent à la société de leasing.

La crise du COVID a permis de mettre en évidence la résilience de la microfinance et elle a également servi d’accélérateur au processus de numérisation de l’activité. Les produits et les services, ainsi que les canaux de distribution seront les premiers concernés. Les systèmes de gestion des ventes et les fonctions de contrôles feront ensuite l’objet d’une automatisation. La numérisation permettra aussi d’étendre la palette des services dédiés aux petites et microentreprises. A l’heure actuelle, le débat porte sur la question de savoir si, dans le monde de la finance, l’avenir appartiendra aux «super-apps»1 ou au «super-service». L’idéal serait sans doute d’intégrer les deux.

 

1 Une super-app combine trois caractéristiques: un point d’entrée unique pour l’utilisateur, un écosystème de services intégrés et une solution de paiement pour faciliter les transactions des utilisateurs vers ces services.

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