Les implications pour les obligations à haut rendement. Avec Jonathan Butler de PGIM.
Après une décennie de taux d’intérêt à zéro, la Fed a normalisé sa politique monétaire plus agressivement que prévu afin de combattre le renchérissement. La BCE lui a rapidement emboîtè le pas. Que signifie la fin de l’argent gratuit pour les obligations à haut rendement? Garderont-elles leur attractivité alors que leurs écarts de crédit se détériorent? L’avis de Jonathan Butler, responsable de l'équipe européenne de prêts bancaires et à haut rendement chez PGIM Fixed Income.
Face à une inflation record de 7,5% pour l’Europe en avril, la Banque centrale européenne a décidé, jeudi 9 juin, de stopper ses mesures de soutien monétaire en mettant fin à des années de rachats d’actifs et a annoncé qu’elle relèverait en juillet puis en septembre ses taux directeurs pour lutter contre l’inflation. Selon Jonathan Butler, cela signifie la fin des taux négatifs. «Les risques sont là aujourd'hui, avec une faible visibilité et une forte probabilité de profits warnings et une baisse de la dynamique de croissance, voire pire», estime-t-il.
Les titres à haut rendement européens, dont les performances évoluent dans le rouge depuis le début de l’année (Euro HY -8,7% au 20.05.2022), devraient être épargnés par le resserrement monétaire de la BCE: «Les taux vont rester plus bas que ce que les marchés craignent. La baisse semble exagérée. En revanche, nous attendons davantage de volatilité», prédit Jonathan Butler qui souligne que le segment à haut rendement européen est très corrélé au high yield américain. Néanmoins, l’inflation et la perturbation de la chaine logistique pourraient élargir les écarts de crédit. «Nous restons prudents à court terme sur le crédit», tempère-t-il.
Dans l'ensemble, Jonathan Butler anticipe des baisses sur tous les marchés en raison d’une mauvaise saison à venir des publications des résultats des sociétés: «Les performances des entreprises au premier trimestre étaient satisfaisantes, mais leurs profits seront mis à rude épreuve par l’inflation au second trimestre. De plus, le conflit en Ukraine ne permet aucune visibilité sur le futur». En attendant l'incertitude de l'évolution macroéconomique dans les semaines et les mois à venir, le gérant a allégé les risques dans son portefeuille en vendant les obligations liées aux matériaux de construction, à la chimie et aux biens de consommation discrétionnaires dans un contexte de ralentissement conjoncturel mondial. En revanche, «le coût de l’argent à 1% n’affectera pas trop les consommateurs et les stimulus fiscaux ainsi que les plans de dépense énergétique des États devraient soutenir l’économie», conclut-il sur une note plus positive.