En confirmant les annonces précédentes, la réunion de jeudi devrait acter la modification de la forward guidance de la BCE.
Le discours de Mario Draghi à Sintra le 18 juin a constitué un tournant majeur dans la politique monétaire de la zone euro. Le président de la Banque centrale européenne y a clairement affirmé la volonté de la BCE de se tenir prête à prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la croissance et se rapprocher de son objectif d’inflation de 2%. Ces déclarations ont conduit à un rallye sur l’ensemble des marchés, un aplatissement de la courbe des taux, et un resserrement des spreads périphériques et de crédit.
Depuis, le contexte a peu évolué :
- les tensions commerciales sont plus fortes que jamais,
- le risque d’un hard Brexit est toujours plus probable,
- l’inflation reste anémique. Malgré un léger rebond de l’inflation cœur en juin à 1,1% yoy après un point bas en mai, elle devrait évoluer autour de 1% dans le prochains mois,
- la croissance a ralenti au deuxième trimestre,
- enfin, les anticipations d’inflation restent basse.
Par ailleurs, Ollie Rehn, membre du Conseil des gouverneurs de la BCE et gouverneur de la Banque centrale de Finlande, a depuis réaffirmé les prises de position de Mario Draghi, confirmant la nécessité d’intervenir face à un ralentissement de la zone euro, et rappelant les outils à la disposition de la BCE, à savoir une baisse du taux de dépôt et un nouveau programme d’achat d’actifs.
avant la réunion de septembre.
La réunion du 25 juillet est donc importante. En confirmant les annonces précédentes, désormais assumées par le Conseil des gouverneurs, elle devrait acter la modification de la forward guidance de la BCE. Celle-ci devrait donc préparer le terrain pour ses prochaines mesures concrètes soit, dans notre scénario, une baisse du taux de dépôt de 10pb en septembre, et un redémarrage du programme d’achat de titres en fin d’année. La mise en place d’un système de tiering, discuté en début d’année, pourrait revenir dans les discussions: dans un contexte d’érosion de la rentabilité des banques par la taxation de leurs réserves excédentaires, un système différencié avec des paliers, à l’instar de celui mis en place par les banques centrales en Suisse, Japon, Danemark et Suède, pourrait être envisagé. Dans ce schéma, la taxation au taux de dépôt négatif des réserves excédentaires des banques se déclencherait au-delà d’un seuil propre à chaque établissement.
Le 25 juillet, il sera également intéressant d’observer si les nouvelles mesures envisagées font l’objet d’une unanimité au sein du Conseil des gouverneurs: de possibles dissensions pourraient affaiblir la portée du message. La récente annonce du changement de leadership à la tête de la BCE, avec la nomination de Christine Lagarde, ne devrait en revanche pas affecter la stratégie suivie.
de guerre des changes non avouée.
Pour les investisseurs, la réunion du 25 juillet devrait avoir peu d’impact. Même si les marchés anticipent à 40% une baisse du taux de dépôt de 10pb en juillet et de 15bp d’ici la fin de l’année, et pourraient être légèrement déçus, la confirmation officielle d’une politique encore plus accommodante devrait être bien perçue et favoriser l’ancrage des taux sur des niveaux extrêmement bas.
Il faut toutefois noter que nous sommes entrés dans une phase de guerre des changes non avouée. Malgré les dénégations de Mario Draghi à Sintra, il est évident que l’impact sur le dollar des baisses des taux attendue aux Etats-Unis constitue un élément à prendre en compte par la BCE, même si celle-ci n’a pas d’objectif de change: dans une phase de ralentissement conjoncturel et de baisse de l’inflation, une appréciation de l’euro serait malvenue. Nul doute que l’évolution de la politique monétaire de la BCE nourrira les accusations du président américain Donald Trump de manipulation de la devise pour soutenir la croissance en zone euro et alimentera les contentieux avec les Etats-Unis.