La BCE cherchera à ramener ses taux d'intérêt en territoire neutre assez rapidement

Konstantin Veit, Pimco

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Nous nous attendons à ce que la BCE continue d'explorer les options permettant de mieux contrôler les taux du marché monétaire, potentiellement sur le modèle du «reverse repo» de la Fed.

Nous nous attendons à ce que la Banque centrale européenne continue de relever ses taux de manière agressive cette année, mais en les modérant par rapport au niveau de 75 points de base.

Nous pensons que la Banque centrale européenne (BCE) cherchera à ramener ses taux d'intérêt en territoire neutre assez rapidement, après sa décision de relever son taux directeur de 75 points de base (pb) lors de sa réunion de septembre. La hausse du taux directeur signifie que le taux de la facilité de dépôt s'établit désormais à 0,75%, à mi-chemin de la plupart des estimations concernant le niveau de neutralité de la politique à long terme (1,5%).

Lors de la conférence de presse, la présidente de la BCE, Christine Lagarde, a déclaré qu'il y aurait d'autres hausses de taux à venir et que la BCE n'a pas actuellement de position arrêtée sur le point d’arrivée de cette trajectoire. Mme Lagarde a également précisé que le resserrement quantitatif ne sera à l'ordre du jour qu'à un stade ultérieur du cycle de normalisation de la politique monétaire. Elle a ajouté que la BCE est absolument déterminée à ramener l'inflation vers son niveau cible et que le Conseil des gouverneurs veut éviter le désancrage des anticipations inflationnistes et ses possibles effets de second tour.

Le marché a pris note, les taux d'intérêt ont augmenté pendant la conférence de presse et le taux directeur final est passé d'environ 2,15% à 2,25%.

Dans quelle mesure la BCE sera-t-elle restrictive?

La question du point d'arrivée est plus importante que celle de la trajectoire précise. L'économiste en chef de la BCE, Philip Lane, a récemment réaffirmé que des facteurs conjoncturels pourraient nécessiter un relèvement des taux directeurs au-dessus ou au-dessous du niveau neutre afin de stabiliser l'inflation au niveau visé.

Une incertitude considérable demeure quant à la définition d'un taux directeur neutre pour la zone euro, mais un taux d'environ 1,5% en termes nominaux semble raisonnable, notamment par rapport à d'autres pays développés tels que le Royaume-Uni ou les Etats-Unis. Les prix actuels du marché suggèrent donc un territoire quelque peu restrictif pour la BCE, avec un taux directeur maximal de 2,25% vers le milieu de l'année prochaine.

Conformément à sa nouvelle approche, la BCE n'a pas fourni beaucoup d'indications sur la destination possible des taux d'intérêt. Mais la présidente Lagarde a indiqué qu'une politique neutre pourrait ne pas être appropriée dans toutes les conditions, en particulier si elle est confrontée à une inflation ponctuelle élevée qui, comme nous l'avons dit, menacerait de désancrer les anticipations inflationnistes à moyen terme et augmenterait le risque d’effets de second tour.

Une question de plomberie

La normalisation des taux directeurs, dans un contexte d'excès de liquidités de 4’500 milliards d'euros et de rareté de collatéraux, risque de gêner la transmission de la politique monétaire. C'est pourquoi le marché attendait avec impatience des orientations sur un certain nombre de points, tels que la rémunération des réserves excédentaires des banques et des dépôts publics à la banque centrale. Avec sa décision de rémunérer les réserves excédentaires des banques au taux de la facilité de dépôt et de suspendre temporairement le plafond de 0% sur la rémunération des dépôts publics, la BCE a réussi à apaiser les inquiétudes concernant une vague de demande de collatéraux de haute qualité dans un contexte d'offre limitée.

Nous nous attendons à ce que la BCE continue d'explorer les options permettant de mieux contrôler les taux du marché monétaire, potentiellement sur le modèle du «reverse repo» de la Fed. Les options à moyen terme comprennent un nouveau véhicule garanti, ou non, disponible aux participants du marché n'ayant pas accès à la facilité de dépôt de la BCE, ou l'émission à grande échelle de certificats de dette à très court terme de la BCE.

La trajectoire à moyen terme de la politique monétaire

Nous pensons que la BCE sera réticente à ralentir sensiblement le rythme des hausses de taux tant que le pic d'inflation ne sera pas passé. Ayant commencé les hausses à un niveau plus haut que l'incrément traditionnel de 25 points de base, il y a peu de raisons de changer ce rythme de manière significative tant que l'orientation de la politique monétaire reste accommodante.

Nous pensons que la BCE cherchera à ramener ses taux directeurs en territoire neutre assez rapidement, et nous prévoyons en conséquence des hausses supplémentaires de 50 points de base en octobre et décembre. Ensuite, nous prévoyons des hausses de 25 points de base l'année prochaine, le cycle de hausse passant de manière plus décisive d’une phase de normalisation à celle de la rigueur de la politique monétaire.

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