L’envolée du S&P face à un risque événementiel à court terme

Philippe G. Müller, UBS

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Alors que l'économie mondiale et la croissance des bénéfices restent solides, certains risques ne sont pas encore pris en compte par les marchés.

Nouvelle semaine, nouvelle étape. Le S&P 500 a évolué à un niveau record la semaine dernière, dépassant le sommet de janvier. D'après certaines métriques, le marché haussier actuel est à présent le plus long enregistré, dépassant la durée de celui vécu entre 1990 et 2000.

Les marchés haussiers ne meurent pas de vieillesse et il y a peu de signes de récession imminente ou d'accélération du rythme de resserrement des taux par la Réserve fédérale, ce qui pourrait mettre fin à court terme au rallye boursier. 

La saison des résultats du second trimestre étant presque terminée, les bénéfices des sociétés américaines devraient afficher une augmentation de 26%. Cette saison, plus de 81% des entreprises ont battu les estimations de bénéfices, soit le pourcentage le plus élevé jamais enregistré, selon des données remontant jusqu’à 1998. 

Le marché ne semble pas refléter les impacts potentiellement
importants des tarifs douaniers de second ordre.

Et les valorisations ne sont pas excessives. Les actions américaines se négocient actuellement à un multiple de 19x le ratio cours / bénéfices glissant, soit seulement 3% au-dessus de la moyenne à vingt ans. Mais, bien que justifiés par les fondamentaux, certains risques à court terme ne sont pas encore pris en compte par les marchés.

Les tensions commerciales: aggravation avant l'amélioration

La semaine dernière, les derniers tarifs douaniers américains et chinois sont entrés en vigueur avec des prélèvements sur 16 milliards de dollars supplémentaires sur les importations, mis en œuvre par les deux parties. 

Les Etats-Unis sont toujours partis pour imposer des droits de douane de 10-25% sur 200 milliards de dollars supplémentaires sur les importations en provenance de Chine. Les négociations commerciales entre les deux pays, qui ont récemment repris après une pause de plus de deux mois, se sont achevées sans progrès substantiel. 

Le marché ne semble pas non plus refléter les impacts potentiellement importants des tarifs douaniers de second ordre, tels que les perturbations de la chaîne d'approvisionnement, la réduction des embauches et la baisse des investissements. 

Dans le procès-verbal de sa dernière réunion, la Fed a prévenu que si, jusqu'à présent, les inquiétudes commerciales n'avaient pas miné l'investissement des entreprises et leurs embauches, elles pourraient le faire si le conflit n'était pas résolu rapidement, entraînant des «effets négatifs significatifs sur la croissance économique».

Economies émergentes plus vulnérables

La vigueur du dollar et la hausse des taux d'intérêt américains révèlent des faiblesses dans le complexe des marchés émergents, contribuant à une plus grande volatilité, comme l'a récemment montré la faiblesse des actifs turcs. 

Dans ce contexte, les économies émergentes plus vulnérables – celles qui ont un important déficit de la balance des paiements et des besoins de financement extérieurs élevés – risquent de subir des pressions à mesure que les entrées de capitaux s'affaibliront. Bien que ces pays ne soient pas assez importants pour nuire à la croissance économique mondiale, ils pourraient contribuer à accroître l'aversion au risque des investisseurs.

Le budget italien

L'Italie reste également un facteur de risque et pourrait raviver cet automne les tensions au sein de la zone euro. Les inquiétudes suscitées par les plans budgétaires du nouveau gouvernement transalpin ont élargi les écarts entre les rendements des obligations à dix ans italiennes et allemandes, passant de 115 points de base en avril à 279 points de base au 24 août. 

D'un point de vue stratégique, on peut imaginer
que les investisseurs devraient demeurer positionnés sur les actions.

L'Italie prévoit de dépenser 80 milliards d'euros pour reconstruire ses infrastructures, après l'effondrement tragique du pont routier à Gênes. Ce qui serait en contradiction directe avec les restrictions budgétaires du traité de Maastricht. Mais abandonner ce plan pour respecter les règles de la zone euro serait aussi très controversé.

D'un point de vue stratégique, on peut imaginer que les investisseurs devraient demeurer positionnés sur les actions. L'économie mondiale et la croissance des bénéfices restent solides. Il n’y a pas de raison de prévoir une fin imminente de la reprise du cycle des affaires. 

D'un point de vue tactique, UBS conseille de rester largement exposé neutre en termes de risque, pour refléter le fort dynamisme du marché dans un contexte de collecte de risques. On y parvient grâce à une légère surpondération des actions mondiales, à une surpondération de la dette souveraine des marchés émergents libellée en dollars et à une sous-pondération des obligations à haut rendement en euros.

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