Le Japon se réaffirme en leader mondial de la fabrication de puces électroniques.
Le Japon mise sur son expertise en matière de fabrication de semi-conducteurs et en robotique pour gagner en leadership dans le domaine de l'intelligence artificielle générative. La combinaison des deux thèmes de marché les plus puissants de cette année, les actions japonaises et l’IA, est porteuse d'une vague d'opportunités.
Leader de la fabrication de processeurs dans les années 1980, le Japon conserve une position clé dans certains secteurs tels que les puces NAND et les capteurs. Les autorités japonaises ont pour ambition de rétablir le leadership du pays en matière de production locale, avec l’objectif d’en tripler les ventes d'ici à 2030. Le secteur des semi-conducteurs avancés sont particulièrement concernés. Ces composants stratégiques sont essentiels à la sécurité économique et aux progrès technologiques du Japon et notamment au développement de l’intelligence artificielle générative.
Face aux inquiétudes qui pèsent sur l'industrie taïwanaise, les autorités japonaises ont pris des initiatives dans le but de produire localement des semi-conducteurs de nouvelle génération gravés en 2 nanomètres. Le consortium «Rapidus», mis en place en 2022, regroupe huit entreprises japonaises, dont Sony, Toyota ou Softbank, qui prévoient d’investir chacune 36 milliards de dollars sur 10 ans en plus de subventions étatiques de 500 millions. En outre, le gouvernement s'est engagé à soutenir financièrement les nouvelles usines d’entreprises basées au Japon comme TSMC ou Kioxia Holdings. Des entreprises américaines se développant au Japon telles que Micron ont récemment annoncé de nouveaux programmes de collaboration en matière de R&D qui intéressent des sociétés locales telles que Tokyo Electron.
Grâce à son passé de leader en matière de recherche et d'innovation technologiques, le Japon a le potentiel de combler les lacunes et d'aider les entreprises mondiales de semi-conducteurs à réduire leurs risques alors qu'elles tentent de déplacer leurs activités en dehors de la Chine et de Taïwan. L'augmentation des investissements japonais correspond bien au besoin mondial de diversification des chaînes d'approvisionnement et pourrait présager d’un retour du Japon en tant que géant technologique.
Les entreprises japonaises sont traditionnellement à la pointe de la robotique. L'intégration des robots dans l'industrie a été particulièrement populaire et facile à mettre en œuvre en raison de la diminution de la main-d'œuvre due au vieillissement de la société japonaise et à l'absence d'immigration. Des entreprises telles que FANUC, Kawasaki Heavy Industries, Sony et Yaskawa Electric Corporation ont ouvert la voie.
La réussite du Japon dans le domaine de la robotique et son implication dès le début de l'IA laissent présager un fort potentiel de réussite dans le domaine de l'IA générative. Les entreprises japonaises restent fortement ouvertes aux nouvelles technologies en raison des contraintes démographiques et de la facilité d'accès aux puces. Environ 60 % des entreprises japonaises disposent de liquidités nettes et d'un très faible niveau d'endettement, ce qui leur permettra également d'investir dans l'IA, contrairement à leurs concurrents internationaux qui pourraient être confrontés à des taux d'intérêt élevés. En outre, le Japon dispose d'une main-d'œuvre très qualifiée dans ce domaine.
La combinaison du succès de la robotique japonaise aux nouvelles potentialités de l’IA pourrait créer une technologie entièrement nouvelle qui changerait le visage de l'économie mondiale. Cette application de l’IA offre aux robots (logiciels) une nouvelle façon d'exécuter les commandes ou les tâches qui leur sont confiées. Ces derniers pourraient devenir plus indépendants, capables d'apprendre, de comprendre, de résoudre, de raisonner et de réagir, tout en étant moins dépendants des commandes humaines. Dans le secteur industriel, des robots naviguant dans un entrepôt très fréquenté, s'adaptant pour changer d'itinéraire en cas d'événements imprévus, ou comprenant les chaînes d'approvisionnement et rationalisant les stocks, tout en analysant les données pour déceler tout problème éventuel sont à l’étude.
Nombreuses sont les entreprises japonaises à adopter l’IA dans tous les secteurs. Par exemple, l'unité mobile de SoftBank développe un équivalent japonais de ChatGPT. CyberAgent ou NTT ont annoncé la publication de leur propre modèle de langage étendu (LLM). Le conglomérat industriel Hitachi a créé un organisme interne appelé Generative AI Center afin d'améliorer la productivité de ses employés et de fournir des services de conseil sur l'IA à d'autres entreprises.
Bien que le potentiel de compétitivité du Japon dans le secteur manufacturier soit immense, les entreprises cherchant à diversifier leurs chaînes d'approvisionnement en dehors de la Chine hésiteront probablement à le faire, compte tenu de la faiblesse de l'offre de main-d'œuvre et de l'augmentation des pressions salariales au Japon. La délocalisation des entreprises au Japon pourrait rester limitée à la production de produits haut de gamme à plus petite échelle. La faiblesse du yen se répercute également sur le coût des importations de matières premières, inversement, une forte appréciation pourrait réduire la demande de produits fabriqués au Japon. Par ailleurs, les gains importants enregistrés récemment par les actions du secteur des semi-conducteurs pourraient signifier que les attentes en matière de progrès technologiques ont déjà été intégrées dans les prix.
L'apaisement des tensions entre les États-Unis et la Chine pourrait ralentir voir inverser le réalignement des chaînes d'approvisionnement mondiales. Le Japon a également annoncé des restrictions sur les exportations de puces à semi-conducteurs, ce qui pourrait avoir une incidence sur les bénéfices des principales entreprises japonaises de ce secteur. En outre, les progrès liés à l'IA pourraient être interrompus par des risques réglementaires ou des contraintes d'approvisionnement en énergie.