Haut rendement européen: meilleure gestion des risques de refinancement

Tom Southon, Columbia Threadneedle Investments

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L'endettement net devrait rester stable pour le reste de l'année fiscale 2023, puis baisser en 2024.
  • Nous tablons toujours sur une croissance des bénéfices modérée pour l'exercice 2024 ainsi que sur des flux de trésorerie robustes dans l'ensemble
  • Le coût moyen de la dette devrait augmenter de 100 pb, mais le rebond des rendements sous-jacents observé dernièrement contribue à maintenir des niveaux gérables dans l'ensemble
  • Sur le plan sectoriel, les TMT, l’industrie du jeu, les voyages ainsi que les loisirs tirent relativement bien leur épingle du jeu, alors que l’immobilier et certains segments de l'industrie de base traversent toujours une zone de turbulences. La santé devrait renouer avec la croissance fin 2024, bien que les prévisions de croissance eussent été revues à la baisse.

En 2024, nous nous attendons à une amélioration de la croissance des revenus et de l’EBITDA (bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement) sur le marché du haut rendement européen. Dans l’ensemble, nous tablons sur une hausse de 2,6% de l’EBITDA pour 2023 et de 6,7% pour 2024. L'endettement net devrait rester stable pour le reste de l'année fiscale 2023, puis baisser en 2024.

Les flux de trésorerie disponibles et le ratio de couverture des intérêts devraient se maintenir à un bon niveau, même si un certain fléchissement du ratio de couverture des intérêts est attendu en raison de l'augmentation des coûts de financement. Dans l'ensemble, nous prévoyons une augmentation de 4,9% du coût moyen de la dette au sein de notre univers en 2024, contre 3,8% en 2022, témoignant d'une hausse sensible des refinancements.

Si l'activité de refinancement devrait continuer à exercer des pressions haussières sur les coûts de financement, le rebond récent des rendements sous-jacents a permis d'atténuer ce risque et de maintenir un niveau qui semble gérable dans l'ensemble. 

Si l'on suppose une augmentation d'environ 100 pb du coût de la dette pour 2024 en tant qu'indicateur pour les rendements des titres notés BB/B, le ratio flux de trésorerie disponible/endettement net ressortirait tout de même à un niveau relativement robuste de 4 à 7%.

Point sectoriel

Industrie de base 

En 2023, la demande sur certains marchés finaux de la construction et de la consommation a continué à se dégrader, ce qui a entraîné un important cycle de déstockage et une baisse sensible des taux opérationnels dans les secteurs de la chimie et des matériaux de construction. Par conséquent, nous avons réduit nos prévisions pour l'ensemble de l'année 2023 par rapport à nos anticipations mi-2023. Par ailleurs, nous pensons désormais que les bénéfices devraient rester faibles jusqu'à mi-2024.

Automobile 

Le secteur automobile a connu une année 2023 robuste, grâce à la quasi-fin du Covid et des perturbations au niveau de la chaîne d'approvisionnement, du ralentissement de l'inflation des coûts des matières premières et d'une demande toujours soutenue. Les commandes en attente et la demande des consommateurs devraient diminuer en 2024, ce dont témoigne la croissance plus faible, quoique toujours positive, par rapport à 2023. Les valorisations et plans de restructuration des coûts, la baisse des prix des matières premières et la normalisation de la production devraient soutenir l'EBITDA des équipementiers automobiles en 2024, ce qui devrait permettre un léger désendettement. Les dépenses discrétionnaires des consommateurs ainsi que les coûts de financement automobile demeurent incertains, et les prévisions pourraient être trop optimistes si les taux demeurent élevés en 2024. La prédominance des titres BB de grande qualité, la liquidité élevée et les refinancements importants effectués avant 2023 ont plafonné les coûts de financement.

Santé 

Nous avons revu à la baisse nos prévisions de croissance globales dans les secteurs des laboratoires en raison de la baisse de la demande de tests. Le secteur devrait renouer avec une croissance à deux chiffres en 2024.

TMT 

Le secteur est toujours promis à une évolution relativement stable sur le plan des bénéfices. Ceci rejoint notre perspective : il est possible de gérer l'inflation des coûts au moyen de légères hausses de prix, actuellement en cours d'application au sein du secteur. Aussi anticipons-nous une reprise des marges en 2024 et une croissance connexe de l'EBITDA. Les dépenses d'investissement, pour ainsi dire à leur plafond actuellement, devraient permettre un certain désendettement en 2024.

Industrie du jeu 

Le secteur a fait preuve d'une résilience marquée en dépit des inquiétudes concernant une baisse de la consommation, et la croissance, bien qu'elle ralentisse, devrait se poursuivre en 2024. Les opérations de fusion-acquisition (F&A) conservent leur effet relutif sur le plan financier, les flux de trésorerie disponibles jouant généralement en faveur du désendettement, un point d’attention toujours prioritaire aux yeux des équipes dirigeantes. L’échéance des obligations est typiquement plus longue, mais nous avons observé une demande forte pour une émission récente, ce qui a fait contrepoids à la hausse des coûts de financement.

Voyages et loisirs 

Les salles de sports ont connu une forte reprise après la pandémie, et ont investi leurs liquidités pour élargir leur réseau. Le nombre d'abonnements a ainsi continué de croître, tandis que la répercussion de l'inflation sur les clients a fait grimper le rendement par membre. Ces derniers mois, le secteur a dépassé les attentes, et n'a montré aucun signe de faiblesse pour 2024. Au sein des voyages, la demande refoulée continuera d'alimenter les revenus et les bénéfices en 2024. Les secteurs qui affichent les cycles de réservation les plus longs, à l'instar des croisières, s'en sortent encore mieux qu'en 2023.

Distribution 

La distribution alimentaire a continué d'enregistrer une croissance des ventes relativement robuste en 2023, sur fond d'inflation élevée contrebalancée par des volumes moins importants. La croissance devrait ralentir en 2024, pour atteindre un niveau de 1 à 3%, et les marges d'EBITDA s'améliorer quelque peu (d'environ 20 pb). Dans le reste du secteur, la croissance des ventes pour l'année 2023 devrait être supérieure à nos précédentes prévisions, dans la mesure où la consommation se maintient malgré l'inflation. Cela se vérifie particulièrement pour les émetteurs axés sur les voyages et la beauté/les cosmétiques. Le secteur qui est ressorti en deçà des attentes est celui du luxe (International Design Group), dont la croissance du chiffre d'affaires est passée dans le rouge et les marges ont été mises sous pression. Ces tendances devraient se poursuivre en 2024.

Immobilier 

Si l’immobilier a en majorité profité des perspectives de taux d'intérêt plus favorables, nous restons prudents vis-à-vis des émetteurs à haut rendement fortement endettés. Le ratio d'endettement net demeure très élevé (environ 25% pour certaines entreprises), mais devrait baisser. De même, le ratio de couverture des intérêts reste très faible, soit 1,9x en 2023 et 2024 selon les prévisions. Les entreprises profitent encore largement de structures de capital à taux fixe, qui n'ont toujours pas intégré les conséquences de la hausse des taux. Ces structures ne seraient pour la plupart pas viables si elles devaient être refinancées aujourd'hui. Sur une note plus positive, les opérations sous-jacentes devraient globalement se maintenir au sein de notre univers, avec de faibles taux de vacance et une poursuite des hausses de loyers à périmètre constant.

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