Good Morning, Taïwan – La semaine des marchés par Landolt & Cie

Arthur Jurus, Landolt & Cie

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Statu quo des tensions géopolitiques. Neutraliser le conflit est primordial pour les États-Unis.

Qu’est-ce qui oppose Taïwan et la Chine? Un détroit, mais surtout un modèle de société différent. Taïwan est la 20e économie au monde. La richesse par habitant à Taïwan est 3 fois supérieure à celle chinoise et 11 fois plus élevée qu’au Vietnam. A l’opposé de sa voisine Hong Kong, la liberté d’expression persiste encore et le pays dispose de sa propre armée. Une prospérité, une liberté et une sécurité qui se traduit par un sentiment d’appartenance élevé. Seulement 4% de la population se considère désormais d’origine chinoise et la majorité comme pro-démocrate. Taïwan est la 11e démocratie au monde. Dès lors, nulle surprise que la remise en cause du statut spécial d’Hong Kong («1 pays, 2 systèmes») en 2020 et la militarisation accélérée de la Chine depuis 2015 augmentent la méfiance des Taïwanais vis-à-vis de Pékin. Un contexte qui favorise la résurgence d’un risque géopolitique historique après les crises du détroit de Taïwan de 1954, 1958 et 1996.

Faut-il craindre un conflit armé? Non, ce scénario est peu probable. Le statu quo persistera. La perte d’autonomie de Taïwan remettrait en cause l’engagement stratégique américain de neutraliser les tensions dans le Détroit de Taïwan pour assurer la stabilité de la région. Cela mettrait un terme à la Pax Americana et plus largement à la prédominance américaine. En somme, l’événement aurait un effet équivalent au retrait britannique de Hong Kong en 1997 qui avait marqué la fin de trois siècles d’influence britannique en Asie. Un revirement potentiel qui justifie pourquoi les États-Unis et leurs soutiens régionaux (Japon, Corée du Sud, Philippines, Thaïlande, Australie) ne favorisent ni le projet d’une Chine unifiée, ni l’indépendance totale de Taïwan, entretenant un statu quo structurel dans le Détroit de Taïwan.

Taïwan n’est en fait qu’un conflit diplomatique parmi d’autres entre la Chine et les États-Unis. La militarisation accélérée de la Chine est la conséquence d’une politique étrangère plus affirmée grâce à une puissance économique inédite. Nul doute que la fibre nationaliste sera aussi un levier de cohésion et de soutien populaire au parti unique, face à la moindre croissance économique à venir dû au vieillissement accéléré. Au cours de la dernière décennie, les conflits diplomatiques se sont ainsi multipliés avec tous les grands alliés américains : le Japon, l’Australie, l’Inde, et aujourd’hui Taïwan. Ces tensions géopolitiques persisteront, car les Américains soutiennent, voire attisent la contestation civile et les protestations de masse. Cette lutte d’influence interne a contraint le pouvoir exécutif à restreindre davantage, cette semaine, la liberté de la presse à Hong Kong.

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