Fissures dans l'edifice

César Pérez Ruiz, Pictet Wealth Management

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Toujours des tensions sur le marché chinois du haut rendement. Regards braqués sur les résultats du troisième trimestre.

La crise du haut rendement chinois s’est poursuivie la semaine dernière: le taux de l’indice ICE BofA des obligations chinoises à haut rendement libellées en dollars a franchi la barre des 18%, son plus haut niveau depuis dix ans. Un émetteur immobilier a jeté de l’huile sur le feu en décidant de ne pas rembourser 200 millions de dollars de dette en USD malgré des réserves de trésorerie de 4 milliards de dollars. Cela suggère que l’entreprise en question privilégie les investisseurs locaux et ses propres besoins de trésorerie aux créanciers étrangers. Les investisseurs ont désormais le regard braqué sur les émetteurs chinois, et tout particulièrement sur Evergrande, qui s’approche de la fin de la période de grâce de 30 jours au terme de laquelle ses actionnaires étrangers peuvent déclarer un événement de défaut. Au Japon, le nouveau Premier ministre a évoqué la possibilité de taxer plus fortement les plus values mobilières. Quand bien même il a botté en touche par la suite, la déclaration a poussé les bourses japonaises à la baisse. L’agence de notation Moody’s a relevé la note de crédit de l’Inde de «négative» à «stable». Parallèlement, les banques centrales de Pologne et du Pérou (ainsi que celle de la Nouvelle-Zélande) ont relevé leurs taux directeurs, emboîtant le pas à plusieurs autres banques centrales. Ces resserrements des taux directeurs dans le but de lutter contre l’inflation et de protéger leurs devises, en parallèle avec des rendements qui étaient déjà plus élevés, expliquent pourquoi nous sommes positifs sur certaines devises des marchés émergents.

La semaine dernière, le Sénat américain a prolongé la limite sur la dette fédérale jusqu’au début du mois de décembre, évitant ainsi une paralysie du gouvernement, au grand soulagement des investisseurs. Quand bien même le problème du plafond de la dette pourrait bientôt revenir sur le devant de la scène et que les chiffres de l’emploi américain publiés vendredi dernier donnent matière à réflexion (les chiffres se sont révélés décevants pour le deuxième mois consécutif et la pression sur les salaires a augmenté), nous pensons que la Réserve fédérale ne changera pas de cap et qu’elle annoncera officiellement la réduction de ses achats obligataires en novembre. Parallèlement, les coûts du fret maritime de la Chine vers les États-Unis semblent enfin se normaliser, comme en atteste la baisse de 50% du tarif au comptant entre septembre et octobre. On peut espérer que le pic des coûts de transport est désormais derrière nous, ce qui devrait aider à atténuer certains problèmes d’approvisionnement globaux.

En revanche, les problèmes d’énergie persistent, à l’instar de la pénurie de gaz naturel. Mais sur ce front aussi, la situation semble évoluer. Vladimir Poutine a déclaré que la Russie pourrait accroître sa production de gaz pour éviter une crise de l’énergie (tout en remettant la Russie au centre de la géopolitique européenne). Ses propos ont permis d’atténuer la pression sur les prix du gaz européen. Dans le même temps, les autorités chinoises ont enjoint aux producteurs de charbon d’accroître leur production, ce qui pourrait contribuer à régler le problème du rationnement qui affecte les sites de production de la deuxième puissance économique mondiale. Il faudra toutefois un certain temps avant que les dernières annonces produisent leurs effets. La saison des résultats du troisième trimestre qui va commencer cette semaine devrait montrer l’impact de la hausse des prix de l’énergie et des problèmes d’approvisionnement sur les marges des entreprises. Bien qu’optimistes à moyen terme, nous conservons une opinion neutre vis-à-vis des actions mondiales car nous attendons plus de clarté sur la voie qui s’ouvre.

 

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