La prise de conscience des effets de l’agriculture sur le climat modifie les habitudes alimentaires et créent de nouvelles opportunités.
Alors que les problèmes environnementaux prennent une importance croissante, il est intéressant de souligner que l’élevage et la consommation de viande jouent un rôle considérable dans les émissions anthropiques, et donc, dans le changement climatique. En effet, la production animale représente 5% des émissions liées aux activités humaines, mais jusqu’à 44% des émissions de méthane, ce qui en fait le deuxième facteur d’émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine. De plus, l’élevage d’animaux contribue fortement à la destruction d’habitats naturels, entraînant perte de biodiversité, déforestation et pollution de l’air et de l’eau. Chaque année, 70 milliards d’animaux sont élevés pour la consommation humaine, pour une population mondiale de 7,8 milliards d’individus.
Alors que la prise de conscience augmente et que les options alimentaires se multiplient, les consommateurs modifient leurs habitudes de nombreuses manières. A mesure que les pays en développement deviennent plus riches, leurs consommateurs souhaitent souvent augmenter leur consommation de protéines, imitant le mode de vie occidental et favorisant les aliments traditionnellement associés à la richesse. Cependant, dans de nombreux pays industrialisés ou en développement, les consommateurs sont aussi de plus en plus nombreux à réduire leur consommation de viande, à ne plus consommer ni viande ni poisson pour devenir végétariens, voire véganes pour ceux qui éliminent tous les produits d’origine animale. Si l’on se penche sur les dernières statistiques nationales disponibles (qui varient au niveau des données annuelles), le pourcentage de végétariens dans la population diffère significativement d’un pays à l’autre. En Chine, ils représentent 4 à 5% de la population, alors qu’en Inde, ils sont 31% à choisir ce mode d'alimentation, également pour des raisons religieuses et culturelles. Dans les pays plus développés, la part des végétariens s'étend de 5% en France à 10% en Allemagne. Les véganes représentent un pourcentage plus faible de la population, mais leur nombre augmente plus rapidement.
ont progressé de plus de 10% de 2018 à octobre 2019.
Souhaitant satisfaire le désir de ces consommateurs d’éviter les produits animaux, les entreprises agroalimentaires et d’aliments protéinés mettent au point de nouveaux produits, tandis que restaurants et supermarchés étendent leur offre. Aux Etats-Unis, les ventes de substituts à la viande à base de protéines végétales ont progressé d’un peu plus de 10% de 2018 à octobre 2019, portant le marché à un niveau proche de 1 milliard de dollars. En 2019, divers produits très médiatisés ont été lancés. L’Impossible Whopper lancé par Burger King dans certains de ses restaurants est certainement le plus connu d'entre eux et a entraîné une hausse immédiate des ventes de 6%. Les fournisseurs de produits protéinés américains Tyson Foods et Smithfield Foods lancent et conçoivent des produits de substitution à plusieurs catégories de viande, notamment au poulet, au porc et aux fruits de mer, alors que Nestlé a lancé son Incredible Burger en avril en Europe et à l’automne aux Etats-Unis.
Les deux start-up dans ce secteur sont américaines: Beyond Meat et Impossible Foods. Les investisseurs qui envisagent une exposition à des acteurs 100% spécialisés dans les substituts végétaux aux produits carnés peuvent acquérir l'action Beyond Meat, qui est cotée au NASDAQ depuis le 1er mai 2019, à un prix initial de 25 dollars US. Fin juillet, elle a atteint un sommet à 240 dollars, multipliant ainsi par près de 10 son prix d’introduction en bourse en trois mois. Cette hausse était due à un enthousiasme initial exagéré, l’action ayant reculé sous les 80 dollars fin 2019. L’action traite traite actuellement autour de 120 dollars, ce qui correspond à une valorisation superieure à 7 milliards de dollars. Selon les analystes, l’entreprise devrait être rentable en 2020.
Impossible Foods n’est quant à elle pas cotée, mais vise une valorisation de 3 à 5 milliards de dollars. L’entreprise pourrait être introduite en Bourse l’an prochain, ce qui fournirait aux investisseurs une autre possibilité d’accès au secteur. Elle suit une stratégie axée en priorité sur les restaurants, contrairement à Beyond Meat, qui cible les supermarchés, même si elles cherchent désormais toutes les deux à s’étendre dans les différents segments.
En ce qui concerne les perspectives à plus long terme, les fabricants de produits carnés ne se sentent pas menacés à l’heure actuelle, percevant ces substituts à la viande comme de nouvelles catégories de produits plutôt que comme des aliments qui vont cannibaliser les ventes. Les produits non carnés représentent seulement 3,5% du marché du burger, une part qui devrait passer à 5% au cours des prochaines années. Si les marges dégagées sur ces produits sont actuellement inférieures en raison de leur prix de fabrication plus élevé, les coûts unitaires diminuent et devraient converger avec ceux des produits carnés dans les années qui viennent. Restaurants et supermarchés les considèrent comme des secteurs de croissance importants, mais sont encore en train de mettre au point leur stratégie. Un grand nombre de ces aliments ne sont pas encore prêts à être produits à une échelle assez grande pour permettre à de grandes chaînes, comme McDonald’s, de les proposer dans tous leurs restaurants.
de ses produits ne contient d’OGM.
Cependant, il apparaît clairement que les consommateurs des pays industrialisés sont toujours plus nombreux à vouloir diminuer leur impact sur l’environnement, une démarche qui inclut les aliments qu’ils choisissent de consommer. Beyond Meat affirme qu’aucun de ses produits ne contient d’OGM, une déclaration susceptible de constituer un argument de vente supplémentaire dans des régions comme les Etats-Unis et l’Europe. Un récent documentaire intitulé The Game Changers, consacré aux bénéfices des régimes à base de végétaux pour les athlètes, a fait couler beaucoup d’encre.
Bien que cela puisse inquièter ou devenir un sujet à controverse, il est encourageant de constater que la technologie et l’opinion publique peuvent contribuer à faire évoluer l’une des industries humaines les plus anciennes. Etant donné l’impact de l’agriculture sur le changement climatique potentiel, il est évident que l’humanité a besoin d’autres choix alimentaires, moins dommageables pour la planète.