En 2022, le marché global des ETF thématiques a bénéficié d’un flux de 3 milliards de dollars, en majorité orienté vers des thématiques liée à la sécurité: énergétique, alimentaire et digitale. Cette tendance de fond reflète les préoccupations du monde réel et la hausse significative des risques géopolitiques suite à la guerre en Ukraine. Elle illustre également l’influence de la réalité vécue sur la composition des portefeuilles d’investissement thématiques, ce qui n’est pas forcément le cas lors d’une allocation d’actifs traditionnelle régionale ou nationale par exemple.

Si ces tendances ont été accélérées par les événements récents, nous ne les considérons pas comme des opportunités tactiques en 2023 mais plutôt comme des thématiques qui devraient se prolonger dans l’avenir. Par exemple, le thème de la sécurité énergétique était déjà d’actualité avant la guerre en Ukraine. La baisse des investissements dans les secteurs traditionnels du pétrole et du gaz, les nouvelles décisions politiques concernant la transition énergétique, et de la hausse des prix des matières premières avaient contribué à mettre ce sujet sur le devant de la scène. De même, le thème de la cybersécurité n’est pas nouveau car il ne cesse de progresser au fur et à mesure de la digitalisation de nos modes de vie.

L’année 2023 a démarré dans l’incertitude entre inflation, crise géopolitique ou croissance faible. De nombreux domaines semblent échapper à tout contrôle et laissent présager d’un marché difficile. Dans ce contexte, nous nous basons sur plusieurs nouvelles «poches» de résilience, qui sont des thématiques basées sur le monde réel, et ayant la capacité de traverser des vents contraires.

Le nombre d'annonces d'emplois suite aux relocalisations des chaînes de production aux Etats-Unis a atteint un niveau record. Parmi les facteurs principaux qui ont incités les entreprises à y réinstaller leurs usines, les guerres commerciales, les fermetures brutales lors de la crise du Covid en Asie du Sud-Est et les coûts de transports ont été déterminants. Ce phénomène a été fortement amplifié par le gouvernement américain qui a engagé des politiques publiques renforcées par des incitations fiscales et budgétaires comme La loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act ou IRA) ou le CHIPS and Science Act. Dans les deux cas, des milliards de dollars de déductions fiscales et de subventions ont été octroyées, sous conditions de relocalisations des activités d’extraction, de fabrication ou d’assemblage industriel.

La relocalisation de la main-d’œuvre intervient alors que les Etats-Unis connaissent une période de plein emploi et de hausse des salaires, causées structurellement par le vieillissement de la population. Il est donc nécessaire d’accroître les investissements dans l’automatisation et la robotique afin d’optimiser les processus technologiques et la résilience des chaînes d’approvisionnement.

L'impact du changement climatique est de plus en plus évident tant au niveau mondial que local. Les scénarios météorologiques traditionnels ne se réalisent plus. Les vagues de chaleur et de froid extrêmes, les sécheresses et les inondations deviennent de plus en plus fréquentes et graves, certaines régions alternant d’un extrême à l’autre.

Cette situation exerce une pression sur le coût et la disponibilité de ressources essentielles, telles que la nourriture et l'eau. Des investissements accrus dans ces secteurs sont indispensables face aux incertitudes à venir et afin d’en mitiger les risques.

Par ailleurs, la hausse des prix des produits agricoles de base aide les agriculteurs à investir dans de nouveaux équipements et technologies leur permettant d’augmenter leurs rendements et leur efficacité au profit des entreprises agroalimentaires. Les politiques environnementales, comme par exemple la loi sur les infrastructures et l'emploi aux Etats-Unis, ou le Green Deal européen, devraient stimuler les investissements dans le secteur du traitement ou du transport de l’eau.

Notre troisième secteur de résilience se base sur les difficultés potentielles auxquelles le secteur technologique pourrait continuer à être confronté cette année. Dans un contexte de ralentissement de la croissance et de baisse des bénéfices, qui touche particulièrement les entreprises technologiques, où considérer un potentiel de résilience?

Le segment de la sécurité numérique, qui couvre les logiciels de cybersécurité ainsi que le hardware, pourrait rester porteur. La différence entre les dépenses en cybersécurité, estimées à quelque 150 milliards de dollars par an, et le coût engendré par les cyberattaques, estimé à plusieurs milliers de milliards, donne une idée de la taille du marché non traité et de sa capacité à résister à un ralentissement.

Une fois encore, la politique reste un facteur déterminant. La numérisation croissante de notre économie, du consommateur à l'infrastructure, combinée à la montée des tensions géopolitiques, ont provoqué la hausse des cyberattaques. Considérées désormais comme un nouveau genre de guerre, les gouvernements du monde entier renforcent et modernisent leurs capacités de cyberdéfense. Ainsi, la cybersécurité est passée en peu de temps du département informatique à la direction générale et, plus récemment, à un niveau national.

Sélectivement, nous voyons des opportunités apparaître au sein du secteur de la fintech dans des entreprises bénéficiant d’une croissance de revenus résiliente. Le niveau des taux plus élevé devrait contribuer à soutenir la rentabilité du secteur.