Critiquée tant pour ses hausses d’impôts que pour l’état général de l’économie, la ministre britannique des Finances, Rachel Reeves, est mise sous pression par l’opposition, qui réclame son départ. Mais elle garde la confiance du Premier ministre Keir Starmer, qui s’épargne pour l’instant une crise majeure.
«Rachel Reeves fait un travail fantastique. Elle a toute ma confiance. Elle a toute la confiance de l’ensemble du parti», a assuré lundi le chef du gouvernement, pressé de questions sur l’avenir de la Chancelière de l’Echiquier --son titre officiel.
Le départ après à peine six mois de l’un des principaux visages de l’exécutif ne serait pas sans risque: Keir Starmer serait confronté à une crise politique d’envergure et, peut-être plus grave encore, le marasme économique dans lequel est englué le Royaume-Uni risquerait de s’aggraver.
«A un fil»
Le pays fait déjà face à une croissance atone et les augmentations d’impôts sans précédent annoncées fin octobre par Rachel Reeves dans son budget sapent le moral des entreprises, qui ne cessent d’alerter sur leurs conséquences en matière d’emploi et d’inflation.
Répercussion concrète: la perte de confiance des marchés, une livre au plus bas et un taux d’emprunt de la dette à un niveau plus vu depuis 25 ans, qui va contraindre les travaillistes à faire un choix entre augmenter encore les impôts, réduire les dépenses ou limiter les emprunts.
Rachel Reeves n’a pas encore eu l’occasion de s’exprimer sur le sujet: elle était en Chine ce week-end, un déplacement prévu de longue date qui lui a également valu des critiques.
«Elle s’accroche mais ne tient plus qu’à un fil», a estimé lundi Kemi Badenoch, cheffe de file des conservateurs, pour qui Keir Starmer et elle ont «mis l’économie britannique à terre».
Plus indulgents, les libéraux démocrates, troisième force politique à la chambre des Communes, se sont limités à appeler la ministre à «annoncer un plan sérieux pour la croissance», supprimer ses hausses d’impôts et reconstruire la relation économique avec l’Union européenne.
«Il faudra du temps»
«Nous n’avons jamais prétendu (...) qu’après 14 ans d’échec (des conservateurs au pouvoir, ndlr), il était possible de redresser notre économie et nos services publics avant Noël», a répété lundi Keir Starmer. «Avant les élections, j’ai dit qu’il ne serait pas possible de le faire en six mois. Il faudra du temps».
Le Royaume-Uni n’est pas le seul pays concerné par l’augmentation du coût de la dette, qui touche d’autres pays occidentaux dont les Etats-Unis.
Keir Starmer semble cependant pris entre deux feux, contraint de choisir la solution qui inquiètera le moins les marchés entre le renvoi ou le maintien de sa ministre.
Sur le plan politique, un départ de Rachel Reeves constituerait aussi un incontestable revers pour les travaillistes, qui font déjà face aux appels à la démission d’une autre ministre, Tulip Siddiq, citée dans des enquêtes au Bangladesh pour corruption visant sa tante, l’ex-Première ministre Sheikh Hasina.
La lune de miel entre le gouvernement et les Britanniques après leur retour en juillet n’aura duré que quelques semaines. La multiplication ces derniers temps de «plans» de toutes sortes --sur la santé, l’immigration, les énergies vertes et ou encore lundi l’intelligence artificielle--, souvent des promesses sans concrétisation immédiate, semblent sans effet sur l’opinion.
Le milliardaire Elon Musk, bras droit du président élu Donald Trump, a bien senti cette vulnérabilité, lui qui tente depuis des jours de déstabiliser un peu plus les travaillistes.
«Personne ne fait confiance à Starmer (...) Il a créé une crise financière en Grande-Bretagne», a récemment soutenu le propriétaire de X sur son réseau.
Un autre péril à moins de dix jours du retour aux affaires de Donald Trump.