Pétrole: l’Opep+ rassure sur la solidité de son alliance

AWP

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Pour parvenir à l’accord de ce dimanche voulu par l’Arabie saoudite et la Russie, le souhait des Emirats Arabes Unis d’augmenter leur volume de production de référence a été exaucé.

L’accord trouvé dimanche par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (Opep+) pour augmenter leur production dès août a rassuré les observateurs qui voyaient l’alliance en mauvais état.

L’ouverture des vannes annoncée intervient toutefois à l’heure où les craintes liées au COVID-19 repartent de plus belle, une combinaison qui faisait chuter les cours lundi.

A partir du mois prochain, les 23 producteurs de l’Opep+ ajouteront 400’000 barils par jour chaque mois à leur objectif de production pour répondre à la soif de brut des consommateurs, en pleine relance économique mondiale.

Pour parvenir à cet accord, voulu par les deux piliers de l’alliance, l’Arabie saoudite et la Russie, le souhait des Emirats Arabes Unis d’augmenter leur volume de production de référence a été exaucé.

«C’est un compromis, mais un bon compromis», résume pour l’AFP Eugen Weinberg, analyste matières premières chez Commerzbank.

Une absence d’accord aurait eu «un effet désastreux sur la crédibilité de l’Opep», juge-t-il.

Pour que l’alliance de producteurs agisse sur le marché, elle doit en effet présenter un front uni et montrer qu’elle peut à loisir inonder le marché ou au contraire l’assécher.

«C’est le principe même de l’Opep, éviter la surproduction», commente Bjarne Schieldrop, analyste matières premières chez SEB.

Contrôle du marché

Contrairement à cette philosophie de production limitée, les Emirats ont investi pour pouvoir extraire plus, et voulaient que leur quota reflète ces capacités accrues.

Mais Ryad avait dans un premier temps refusé de laisser un autre producteur augmenter son quota, au risque de voir d’autres pays réclamer des mesures similaires, et une réunion début juillet avait été annulée.

Ces débats houleux de deux semaines avaient suffi à mettre le marché du brut sous pression: au lendemain de la réunion annulée, le prix de la référence américaine, le WTI, avait flambé à son plus haut depuis 2014, à 76,98 dollars.

Une réaction qui prouve le poids de l’Opep+ sur le marché, alors que l’alliance est ressortie renforcée de la dernière guerre des prix.

Les producteurs américains de pétrole de schiste, aux coûts d’extraction plus élevés, investissent beaucoup moins qu’il y a quelques années.

«Ils avaient compris le message en avril-mai» 2020, estime M. Schieldrop: en pleine pandémie de COVID-19, l’Arabie saoudite et la Russie avaient inondé le marché, poussant même le prix du baril américain à un niveau négatif, du jamais vu, ce qui avait mis en difficulté nombre de producteurs outre-Atlantique.

Pour l’instant, la situation est plutôt favorable à l’Opep+, confirme Giovanni Staunovo, analyste chez UBS: «la demande de pétrole augmente et la production hors Opep+ ne suit pas, donc l’alliance garde le contrôle du marché».

Environnement contre Opep

Mais le duel entre l’Arabie saoudite et les Emirats est un «avant-goût» de conflits à venir au sein de l’alliance, estime M. Schieldrop.

«La Russie et le Kazakhstan comptent tous deux augmenter graduellement leur production» dans les années à venir, rappelle-t-il.

«Nous avons plus de pétrole que ce que l’environnement peut absorber», juge-t-il, prévoyant des tensions entre producteurs alors que le marché est réduit par les mesures environnementales des importateurs.

«Plus les gouvernements agissent pour limiter l’utilisation d’énergie fossile, moins les prix du pétrole ont de potentiel de hausse», écrit Jim Krane, chercheur au Baker Institute.

Il estime que Abou Dhabi «veut vendre son brut avant qu’il ne soit bloqué sous terre (...). Si cela veut dire qu’il faut accepter des prix plus bas, tant pis».

L’argument ne convainc pas tous les observateurs: «la mauvaise réputation des compagnies pétrolières va donner un avantage aux groupes contrôlés par des Etats», prévoit M. Weinberg.

Par ailleurs, le marché du pétrole n’est pas à l’abri d’événements que les producteurs ne peuvent pas contrôler.

Après l’annonce de l’accord dimanche, les prix du pétrole plongeaient lundi de plus de 5%, à moins de 70 dollars pour la première fois depuis un mois et demi, à cause d’un regain d’inquiétudes sur la très forte remontée des cas de coronavirus.

A court terme, les cours du brut pourraient rester volatils «en raison de la propagation du variant Delta du COVID-19», préviennent les analystes de Goldman Sachs dans une note.

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