La suppression progressive en 2021 de mesures de soutien prises par les Etats pendant la crise «pourrait augmenter le risque d’effets de falaise».
La Banque centrale européenne a encouragé jeudi les grandes banques de la zone euro à davantage anticiper les pertes potentielles sur leurs crédits, avant que n’expirent les moratoires sur leurs remboursements accordés pendant la crise du COVID-19.
La suppression progressive en 2021 de mesures de soutien prises par les Etats pendant la crise «pourrait augmenter le risque d’effets de falaise», en clair une dégradation brutale de la qualité des portefeuilles de prêts, prévient le superviseur des banques logé au sein de la BCE.
Pour amortir un tel choc, les banques sont encouragées à «utiliser toutes les possibilités d’absorption des pertes mises à leur disposition» et à «ne pas s’abstenir de mettre en oeuvre une stratégie de gestion des risques précoce en raison de craintes sur leur capital», a souligné le président du superviseur, Andrea Enria, dans un discours.
Les moratoires sur les crédits accordés par les autorités en 2020 n’ont fait que décaler dans le temps leur remboursement, générant «une sorte de cécité sur les paiements», a expliqué M. Enria devant la presse.
Alors que les banques avaient le temps pour se préparer à des pertes sur leurs portefeuilles de prêts, la plupart ont négligé de le faire pour ne pas amputer leurs bénéfices déjà plus maigres que leurs rivales américaines.
De fait, neuf banques seulement ont puisé en 2020 dans le «coussin» de fonds propres qui leur a été octroyé par le superviseur pour absorber des pertes liées à la crise du COVID-19, alors que d’amples pertes sur les crédits semblent inévitables dans la période actuelle.
Dans un courrier envoyé en décembre aux 115 banques sous sa férule, parmi elles BNP Paribas et Deutsche Bank, le superviseur les encourageait à regarder de près les cas de clients en difficultés.
Or, «nous ne voyons pas beaucoup cela se produire», a regretté M. Enria.
Il existe donc «un niveau de détresse enraciné dans les livres de prêts (des banques) qui n’est pas encore tout à fait évident» à évaluer, a-t-il souligné.
En 2020, les banques ont absorbé l’essentiel du coût du risque lié à la pandémie lors du deuxième trimestre.
Avec les politiques de restrictions fin 2020, et toujours en vigueur, des «efforts supplémentaires» en termes de provisions des risques sont attendus au «quatrième trimestre de 2020 et courant 2021».
Les banques de la zone euro ont pu jusqu’à présent résister au choc économique sans précédent causé par la pandémie grâce à des niveaux de fonds propres «nettement plus élevés» que ce ne fut le cas lors de la grande crise financière de 2008-2009, note aussi la BCE.
La surveillance du risque de crédit va rester sa priorité en 2021, comme la robustesse du capital des banques, la durabilité de leur modèle et leur gouvernance.