L’appétit chinois pour le blé réveille un marché des céréales somnolent

AWP

2 minutes de lecture

Les cours font «du yo-yo», la tonne de blé oscillant depuis des semaines entre 230 et 240 euros sur le marché européen. Mercredi, elle s’échangeait autour de 233 euros pour l’échéance la plus rapprochée.

Sans «bouleverser» les équilibres existants, le retour de la Chine aux achats de blé a favorisé ces derniers jours un bref rebond du prix de la céréale du pain, dans un marché mondial toujours dominé par la Russie.

«La Chine achète du blé» européen et américain, constate Sébastien Poncelet, analyste au cabinet Agritel (groupe Argus Media). Une nouvelle en soi, alors que la demande chinoise avait nettement ralenti ces derniers mois.

Premier producteur et importateur mondial de blé, la Chine a «acheté 18 à 20 bateaux» de grains français ces trois dernières semaines, «soit 1 à 1,2 million de tonnes de blé»: un soulagement pour les exportateurs français après des mois de vache maigre dans un marché largement dominé par l’offre russe, abondante et peu chère, selon l’analyste.

Mardi, c’est du blé d’hiver américain de variété SRW (Soft Red Winter Wheat) qui a trouvé preneur: le ministère américain de l’Agriculture (USDA) a annoncé une vente exceptionnelle de 220’000 tonnes à la Chine.

«Yo-yo»

Le géant asiatique privilégie habituellement l’Australie pour ses achats de blé en automne. Mais «les farmers australiens, en pleine sécheresse, ne proposent pas encore à la vente leur nouvelle récolte (qui s’achèvera fin décembre), ce qui raffermit les prix en Australie», explique Sébastien Poncelet.

La Chine cherche donc un blé moins cher, mais correspondant à ses exigences phytosanitaires: «c’est pour cela qu’elle achète français et américain» et pas russe, a-t-il ajouté.

En dépit de ces achats, le marché reste «atone», la demande faible au regard d’une offre abondante, ce qui maintient une «tendance baissière des prix», relève Edward de Saint-Denis, courtier en céréales chez Plantureux & Associés.

Les cours font «du yo-yo», la tonne de blé oscillant depuis des semaines entre 230 et 240 euros la tonne sur le marché européen. «La bonne dynamique chinoise apporte un soutien aux cours, mais n’est pas de nature à bouleverser le marché», souligne Sébastien Poncelet.

Le prix du blé américain de variété SRW pour livraison en décembre était tombé vendredi à son plus bas niveau depuis trois ans, descendant jusqu’à 5,40 dollars le boisseau (environ 27 kg) après une révision à la hausse de la production américaine de blé pour cette année.

Le mouvement baissier a été suivi lundi par les marchés européens, toujours sous la «pression» de la concurrence du blé russe, même si, souligne Damien Vercambre, la Russie a récemment «un peu ralenti» le rythme de ses exportations.

Après un rebond dès lundi à la Bourse de Chicago, essentiellement «lié à des rachats de positions» par des fonds d’investissement, habituels en début de mois, les cours sont repartis partout à la baisse.

Mercredi, la tonne de blé s’échangeait autour de 233 euros en séance sur Euronext pour l’échéance la plus rapprochée.

Cette orientation à la baisse s’explique aussi par la capacité de l’Ukraine à sortir ses grains du pays: tant par la voie fluviale danubienne que par la route - un accord a été trouvé mardi entre Varsovie et Kiev pour accélérer le transit des céréales ukrainiennes - et de nouveau par la mer Noire.

Cabotage

Depuis le 19 septembre, des cargos transportant des céréales quittent la région d’Odessa, en dépit de la menace répétée de Moscou de prendre ces bateaux pour cibles, la Russie ayant dénoncé en juillet l’accord qui permettait le transport sécurisé de ces grains.

Dimanche, le ministre ukrainien des Infrastructures, Oleksandre Koubrakov, a annoncé sur X (ex-Twitter) que cinq nouveaux vaisseaux attendaient d’être chargés de grains dans des ports ukrainiens, à destination de l’Afrique et de l’Europe.

Mercredi, trois d’entre eux étaient en chemin, selon leur géolocalisation sur le site MarineTraffic, cabotant le long de la côte ukrainienne jusqu’à gagner les eaux roumaines et reprendre la route du Danube.

«Même si les quantités transportées ne sont pas très importantes, on a l’impression que l’Ukraine a relancé le corridor maritime, sans la Russie», ce qui est de nature à faire refluer les prix, relève Damien Vercambre.

Le maïs suivait la même tendance: la tonne de grain jaune s’échangeait mercredi autour de 205 euros la tonne sur l’échéance la plus rapprochée sur Euronext, la baisse des cours étant favorisée par les bons rendements annoncés en Europe, dans un marché mondial servi par l’abondante production brésilienne.

A lire aussi...