Légère hausse des prix des céréales, après révision des productions ukrainiennes

AWP

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Descendue sous les 280 euros le 23 janvier sur le marché européen, plus bas qu’à la veille de l’invasion russe en Ukraine en février 2022, la tonne de blé tendre s’échangeait à 286 euros mercredi après-midi sur Euronext.

Les prix du blé, du maïs et du soja sont légèrement remontés ces derniers jours sur les marchés mondiaux, sensibles à une révision drastique à la baisse des productions agricoles en Ukraine et aux incertitudes climatiques en Amérique latine.

Descendue sous les 280 euros le 23 janvier sur le marché européen, plus bas qu’à la veille de l’invasion russe en Ukraine en février 2022, la tonne de blé tendre s’échangeait à 286 euros mercredi après-midi sur Euronext, entraînant dans son sillage le maïs, qui s’approchait des 278 euros la tonne.

«Cette progression des prix reste modeste, mais le marché tend à se consolider», estime Gautier Le Molgat, analyste au cabinet Agritel.

Trois facteurs expliquent ce léger rebond, selon lui: «des interrogations sur la demande» des pays importateurs qui étaient revenus aux achats à la faveur de la baisse des prix, des doutes «sur les perspectives des nouvelles récoltes» et «des inquiétudes sur le marché ukrainien».

Un temps rassurés par la profusion annoncée de blé en 2023 en provenance de Russie et d’Australie, les marchés ont réagi aux sombres perspectives de production en Ukraine présentées par l’Association céréalière ukrainienne (Ukrainian Grain Association, UGA), lors d’une conférence organisée jeudi et vendredi derniers par Argus Media à Paris.

Après les 106 millions de tonnes récoltées en 2021, un record historique, et une récolte estimée à environ 65 millions de tonnes pour 2022, le président de l’UGA, Nikolay Gorbachov, a évalué à «53 millions de tonnes» la production de céréales et d’oléagineux (tournesol, colza) en 2023.

La campagne de semis 2022 a été entravée du fait des combats, du manque de carburant et de la destruction d’une partie des machines et infrastructures agricoles, qui ont conduit à la réduction d’environ un quart de la surface cultivée, selon l’UGA.

Doute sur le blé russe

L’ouverture d’un corridor maritime a permis de sortir quelque 20 millions de tonnes de produits agricoles d’Ukraine. Encore «insuffisant» pour l’UGA, qui s’inquiète du rythme des exportations pour la prochaine campagne.

Si l’Ukraine ne parvient pas à exporter au moins 40 millions de tonnes, a affirmé Nikolay Gorbachov, «les prix vont augmenter: l’Europe peut se le permettre, mais pas les pays en développement».

Des pays comme le Liban, la Jordanie ou la Tunisie, qui se fournissaient massivement en Ukraine, peinent à remplir leurs greniers faute de trésorerie suffisante.

En Tunisie, où le ministre de l’Agriculture a été limogé lundi, l’inflation est supérieure à 10% et le lait est rationné du fait d’une chute de la production. Les vaches laitières produisent 35% de lait en moins faute de recevoir assez de fourrage et de complément de maïs et soja, dont les prix ont augmenté de «40% sur un an», selon l’UTAP, qui regroupe syndicats et associations du secteur agricole tunisien.

Autre élément notable, le doute sur l’ampleur exacte de la récolte russe de blé en 2022-23: le ministère américain de l’Agriculture (USDA) maintient son estimation à 91 millions de tonnes, alors que Rosstat (service russe des statistiques) table sur 104,4 millions de tonnes (+37%).

Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting, juge raisonnable l’estimation américaine, parce que «pour faire mieux que 90 millions de tonnes, il faudrait une récolte parfaite. Et elle ne l’a pas été» partout.

A contrario, le cabinet russe SovEcon relève que les stocks russes de blé encore dans les exploitations sont supérieurs de 42% à la moyenne quinquennale, ce qui augure d’exportations en hausse début 2023.

SovEcon estime donc que les exportations russes exerceront «une pression importante sur les prix mondiaux du blé». Même analyse pour Jake Hanley de la société Teucrium Trading, qui voit dans les mois à venir les prix du blé, maïs et soja redescendre et «se rapprocher de leurs coûts de production».

Pour l’heure, la prudence reste de mise, car après deux semaines de pluie en Argentine, le temps sec revient et avec lui l’inquiétude sur la durée du phénomène climatique La Niña, qui prive depuis trois ans la région de précipitations suffisantes.

Le maïs peine à sortir d’une fourchette de cours assez resserrée en partie à cause des mauvais chiffres d’exportation américains, en baisse de 31% par rapport à l’an dernier.

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