Les députés adoptent un amendement mettant la pression sur le gouvernement pour présenter un «plan B» en cas d’échec du texte pour la sortie de l’UE.
La Première ministre conservatrice britannique Theresa May a essuyé mercredi un cuisant revers au Parlement, où l’examen de l’accord de retrait de Brexit a repris, les députés adoptant un amendement mettant la pression sur le gouvernement pour présenter un «plan B» en cas d’échec du texte.
La cheffe du gouvernement avait donné des gages aux députés pour tenter de les convaincre d’adopter l’accord de sortie de l’UE, avant un vote décisif le 15 janvier.
Mais preuve de leur défiance, ceux-ci ont adopté à 308 voix pour et 297 contre un amendement déposé par le conservateur Dominic Grieve qui oblige le gouvernement à présenter sous trois jours - contre 21 jours selon la législation actuelle - un plan alternatif sur le Brexit en cas de rejet du texte par les députés.
«Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour remporter le vote qui se déroulera mardi. Mais il est également dans notre intention, si cela ne se produit pas, de réagir rapidement et de donner des assurances quant à la suite, après le vote,» avait déclaré un porte-parole de Downing Street mercredi matin.
Le gouvernement avait déjà essuyé une première défaite la veille avec le vote d’un amendement à une loi budgétaire visant à limiter son pouvoir de mettre en oeuvre un Brexit sans accord. Vingt députés conservateurs avaient voté pour cet amendement.
Malgré ce revers, mauvais présage pour le vote de mardi, David Lidington, le numéro deux du gouvernement britannique, a encore écarté mercredi toute réécriture du texte, âprement négocié avec Bruxelles. «Le choix qui se présente est cet accord, ou pas d’accord, ou, comme certains députés le souhaitent, d’annuler complètement le résultat du référendum de 2016», a-t-il affirmé sur la BBC.
Le vote, initialement prévu en décembre, avait été reporté à la dernière minute par Mme May pour éviter une défaite annoncée, l’accord liguant contre lui à la fois par les Brexiters qui craignent une forme d’arrimage permanent à l’UE et les europhiles qui espèrent encore pouvoir faire machine arrière.
Mercredi, la dirigeante a tenté de cajoler les députés pour les convaincre de soutenir le texte.
Elle a annoncé que, dans le cas où les discussions sur la future relation entre Londres et Bruxelles n’auraient pas abouti en décembre 2020, le Parlement voterait sur une éventuelle prolongation de la période de transition, ou sur la mise en place du dispositif du «filet de sécurité» (ou «backstop» en anglais), qui prévoit la création d’un «territoire douanier unique» englobant l’UE et le Royaume-Uni, avec un alignement plus poussé pour l’Irlande du Nord.
Cette disposition est particulièrement décriée chez les eurosceptiques, qui estiment qu’elle contraindra le Royaume-Uni à accepter les normes européennes sans avoir son mot à dire, pendant une période indéterminée.
La proposition de Mme May a été vivement rejetée par le chef de l’opposition travailliste, Jeremy Corbyn, qui l’a qualifiée de «poudre aux yeux».
Le gouvernement a aussi présenté de nouvelles dispositions visant à offrir un «rôle important» au parlement nord-irlandais dans le cas où le «filet de sécurité» devait entrait en vigueur. L’exécutif cherche ainsi à convaincre son allié, le parti ultra-conservateur nord-irlandais DUP, de voter en faveur de l’accord.
Mais le député du DUP Nigel Dodds a qualifié ces mesures de «cosmétiques» et «insensées», soulignant que le traité de divorce «supplante toute disposition légale interne» au Royaume-Uni.
Face aux inquiétudes des députés, Theresa May a soutenu qu’elle obtiendrait des «assurances» et des «précisions» de la part de ses homologues européens sur le caractère «temporaire» du filet de sécurité, et ce «avant la fin du débat et le vote» sur le texte.
Même si Bruxelles martèle que l’heure n’est plus aux négociations, le Premier ministre irlandais Leo Varadkar a assuré qu’il y avait des «contacts étroits» pour savoir «si une série supplémentaire de garanties écrites, explications et assurances pourrait faire la différence».
Côté européen, certaines sources n’excluent pas un report de la date du Brexit, prévu le 29 mars, pour éviter un divorce sans accord. «Nous sommes convaincus que Theresa May demandera un report après le rejet de l’accord au Parlement britannique, mais elle ne le dit pas, ni publiquement ni dans ses contacts avec les interlocuteurs européens», a confié à l’AFP une source diplomatique à Bruxelles.
«Il est clair que tout le monde a en tête que cette possibilité existe», a indiqué une autre source diplomatique européenne, avertissant toutefois que c’était «une option très hypothétique».
A Londres, un porte-parole du gouvernement a cependant fermement démenti cette possibilité.