MayDay ou «l’incertitude du Brexit»

Alan Mudie, Société Générale Private Banking

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Le Brexit a pris beaucoup de temps et d’énergie ces 30 derniers mois, et l’UE pourrait souhaiter désormais s’attaquer à d’autres priorités.

© Keystone

«L’incertitude du Brexit». Ces derniers trimestres,l’expresssion «l’incertitude du Brexit» a été largement reprise dans les documents de recherche et la presse pour expliquer la dégradation de la confiance des entreprises et la faiblesse du sterling. La situation est-elle aussi incertaine que les analystes et les journalistes le laissent entendre? Cette semaine, il est apparu que oui. Que se passe-t-il donc, et qu’adviendra-t-il par la suite?

Après avoir annulé le vote prévu de l’accord sur le retrait de l’UE et avoir remporté le vote de confiance lancé par le Parti conservateur mercredi, la Première ministre Theresa May devra désormais tenter de sortir du labyrinthe du Brexit. D’après le site «britanniquewhatukthinks.org», un nouveau référendum ne changerait guère la donne. Les intentions de vote (52% pour le maintien dans l’UE et 48% pour la sortie) sont identiques aux chiffres publiés avant le référendum, et la proportion des indécis, à pratiquement un tiers, ne cesse d’augmenter.

Theresa May va tenter une nouvelle fois d’arracher des concessions aux dirigeants des 27 mais ces derniers, assez naturellement, se montrent peu enclins à reprendre les discussions. Le Brexit a pris beaucoup de temps et d’énergie ces 30 derniers mois, et l’UE pourrait souhaiter désormais s’attaquer à d’autres priorités: union bancaire, politique fiscale commune pour la zone euro, «gilets jaunes», succession d’Angela. Merkel ou approbation du budget de l’Italie, entre autres.

Il n’existe pas de solution alternative à l’accord
sur le retrait obtenu par Theresa May.

Malgré une croissance ralentie du PIB ces deux dernières années (précédemment en tête du G7, l’économie britannique a reculé vers le bas du classement), l’activité reste solide. La confiance des entreprises dans le secteur manufacturier s’est améliorée récemment, les ventes au détail ont progressé de 2,7% en glissement annuel en octobre... et le chômage de 4,1% reste proche de son seuil le plus bas enregistré depuis 43 ans.. Nos économistes prévoient que la croissance du PIB en glissement trimestriel annualisé touchera un point bas à 1,0% au T1 2019 avant de stabiliser et progresser de 1,3% sur l’ensemble de l’année. Cependant, un Brexit sans accord entraînerait des révisions à la baisse des prévisions, comme l’a indiqué récemment la Banque d’Angleterre.

Si aucune concession majeure n’est obtenue lors du Sommet européen cette semaine, il est peu vraisemblable que Theresa May parvienne à faire ratifier par Westminster l’accord sur le retrait avant les vacances parlementaires le 21 décembre. Et avec une opposition toujours aussi vive à cet accord, le temps manquera pour dégager un consensus (même avec des concessions modestes de l’UE) d’ici la rentrée parlementaire le 7 janvier et la date limite d’approbation fixée au 21 janvier. Pour ces raisons, une demande de prolongation du délai prévu par l’Article 50 pourrait offrir un répit bienvenu.

Conclusion. Le pays et le Parlement restent profondément divisés sur le Brexit. Cependant, il n’existe pas de solution alternative à l’accord sur le retrait obtenu par Theresa May, et les dirigeants des 27 ne seront pas disposés à reprendre les négociations. Le risque d’un Brexit sans accord a augmenté ces derniers jours, mais un Brexit «doux», comme prévu par cet accord, semble toujours l’option la plus vraisemblable. Avec une nouvelle hausse des «incertitudes du Brexit», le sterling (1,26 cette semaine) pourrait rester sous pression à court terme avant de repartir à la hausse pour s’établir à 1,32 dans douze mois, d’après nos estimations.

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