L’économie allemande va encore rouler à petite vitesse les deux prochaines années, l’ancienne locomotive de l’Europe restant enlisée dans une séries de problèmes structurels pénalisant son modèle de croissance, a prévenu vendredi la Banque fédérale d’Allemagne.
Les nouvelles prévisions de l’institution très respectée en Allemagne douchent les espoirs d’un rebond rapide de la première économie européenne: la «Buba» prévoit une hausse de 0,2% du produit intérieur brut l’an prochain, contre 1,1% dans ses dernières estimations en juin.
Pour 2026, elle table sur une croissance de 0,8%, contre 1,4% précédemment.
Ces prévisions, également révisées à la baisse cette semaine par plusieurs instituts économiques nationaux, s’éloignent de celles du ministère de l’Économie, qui attend une croissance de 1,1% en 2025 et de 1,6% en 2026.
Pour cette année, l’affaire est déjà entendue : le PIB devrait reculer de 0,2% d’après le gouvernement et la Bundesbank, soit une deuxième année de récession consécutive, plaçant le pays en queue de peloton des Etats de l’Union européenne
Problèmes structurels
«L’économie allemande lutte non seulement contre des vents contraires conjoncturels persistants, mais aussi contre des problèmes structurels», déclare le président de la Bundesbank, Joachim Nagel, dans un communiqué.
Le vieillissement démographique et les pénuries de main d’oeuvre qualifiée qui en découlent, les faibles gains de productivité et les tensions commerciales mondiales justifient pour l’essentiel ces prévisions moroses, explique l’insitution.
Dans des secteurs d’ordinaire fortement contributeurs à la croissance, tels que les producteurs de biens d’investissement et les industries énergivores, le déclin est encore marqué fin 2024 «en raison de la faiblesse des commandes, d’une concurrence accrue et de défis structurels», abonde une note du ministère de l’Economie également publiée vendredi.
La chimie-pharmacie, fortement pénalisée par les prix élevées de l’énergie, n’a utilisé ses installations de production en Allemagne qu’à 75 % en moyenne cette année, trop peu pour qu’elles soient rentables, indique vendredi la fédération du secteur VCI.
Cette organisation voit la branche pharmacie se reprendre de 0,5% l’an prochain, tandis que la chimie stagnera.
Les perspectives pour l’économie allemande orientée vers l’exportation «sont mauvaises», selon Volker Treier, responsable du commerce extérieur à la Chambre allemande de commerce et d’industrie (DIHK).
Les impulsions de croissance venant de l’étranger font défaut en raison du manque de compétitivité des entreprises allemandes, un chantier auquel devra s’atteler d’urgence la prochaine équipe gouvernementale qui va diriger le pays au printemps prochain, après des élections législatives anticipées en février, selon M. Treier.
Montée du protectionnisme
Symbole du désarroi de l’industrie germanique : la déroute de Volkswagen qui se prépare à fermer des usines en Allemagne et à supprimer des milliers d’emplois, en plein virage électrique.
Dans le secteur automobile, mais pas seulement, les annonces de plans sociaux se multiplient ces derniers mois.
Le marché du travail, traditionnellement robuste, montre des signes de ralentissement, ce qui affecte la consommation privée qui, contrairement aux anticipations d’il y a quelques mois, ne jouera pas un rôle moteur dans la reprise économique espérée.
Les économies émergentes grappillent pendant ce temps du terrain : la Chine «a considérablement progressé dans des secteurs clés de l’industrie allemande, notamment l’automobile, la chimie et les machines», et a acquis des «parts de marché significatives», note la Bundesbank.
Ses prévisions restent en outre incertaines notamment en raison de la «possible montée du protectionnisme mondial», a souligné M. Nagel.
La nouvelle présidence de Donald Trump pourrait entraîner un «changement radical» dans la politique commerciale des États-Unis, notamment avec de fortes hausses de droits de douane, prévient la Bundesbank.
Cela affecterait particulièrement l’économie allemande, pour qui les Etats-Unis sont le premier marché pour les exportations.