Wall Street continue de faire son enfant gâté. Les intervenants sont déçus des propos tenus par le patron de la Fed, Jerome Powell, qui maintient comme prévu sa ligne directrice en affirmant qu’une hausse de taux n’est pas dans les cartes, malgré un pic d’inflation temporaire à venir. Mais de quoi donc le marché a-t-il peur? Probablement que la Fed se laisse piéger par sa propre stratégie en laissant l’inflation décoller, croyant que cette dernière ne sera que temporaire. Et pourquoi donc Wall Street serait-elle un enfant gâté? Well… la réaction des marchés ces derniers jours laisse penser que ces derniers voudraient que la Fed contrôle l’inflation mais sans relever les taux d’intérêts. Ah le capitalisme glouton…C’est donc dans ce contexte d’une équation quasi insoluble que les volumes d’échanges décollent significativement avec 18,3 milliards de titres traités sur le NYSE. Les indices reculent, entrainés vers le bas par la technologie, les semi-conducteurs en particulier. On récupère une partie des pertes à la cloche, c’est à noter, mais un certain dommage technique est fait hier. Le Nasdaq100 (NDX) casse sa moyenne mobile à 100 jours, le S&P500 (SPX) et le Dow Jones font de même avec leurs 50 jours et le Russell2000 (RTY) se pose sur sa 50 jours à la cloche. La volatilité décolle de 7%, le VIX s’approchant de 32 en séance pour clôturer légèrement en-dessous de 30.

L’évolution des indices d’actions est sans conteste dictée par celle des taux obligataires avec, dans le rôle du chef d’orchestre, le 10 ans US, qui décolle juste après le discours de Jerome Powell, pour se maintenir à 1,56% ce matin. Rappelons ici que le rendement du dividende du SPX est actuellement de 1,53%. Le dollar ne laisse pas passer une si belle occasion et décolle, la paire eur/usd à 1,1955 ce matin. Les matières premières en souffrent (or -1,1%, argent -2,7%, cuivre -4,8%). Ce matin le métal jaune teste le niveau de 1700 dollars par once. Le MOVE index, le pendant obligataire du VIX, continue sa hausse et martèle sans fléchir à Jerome Powell que les taux obligataires vont continuer de monter, la pression s’intensifie considérablement sur la Fed.

Et heureusement que l’OPEP+ décide de maintenir sa production en l’état, ce qui n’était pas prévu et permet au baril de WTI Light Crude de décoller à 64,80. Du coup, les titres de l’énergie montent de 2,5% en moyenne, ce qui sauve quelque peu la mise du SPX hier. Ceci dit, le NDX entre en territoire de correction (10% de baisse ou plus depuis le plus haut récent) alors que le SPX, le Dow et le RTY n’y sont pas du tout. C’est donc bien la technologie qui déguste en ce début d’année 2021. Enfin disons plutôt qu’elle rend une partie des gains faramineux enregistrés ces derniers trimestres, le NDX est toujours en hausse de 44% depuis le premier janvier 2020. Warren Buffet l’a dit mille et une fois, on doit pouvoir garder un titre dix ans au moins si on décide de l’acheter. Si on ne s’en sent pas capable, il ne faut même pas le garder dix secondes.

Et donc, la question qui taraude tout un chacun dans les salles de marchés, est bien sur «quid de la suite à court terme?». Well, la première étape a lieu aujourd’hui avec le très important rapport sur l’emploi aux Etats-Unis. Les économistes s’attendent à 198'000 créations de postes au mois de février et à un taux de chômage de 6,3%. Je vous rappelle que le marché, fort altruiste comme à son habitude, souhaite que ces deux chiffres soient mauvais, afin de s’autoriser à penser que les taux pourraient ne pas monter aussi vite que cela finalement… tout le monde sur le pont à 14h30 donc! Ensuite il y aura le weekend, durant lequel Nouriel Roubini nous dira probablement que la fin du monde est en train de se produire. Et la semaine prochaine sera potentiellement agitée car le Trésor américain doit lever 120 milliards de dollars d’obligations, des tranches à 3, 10 et 30 ans. C’est très important car le rendement du 10 ans US a décollé juste après une émission décevante à 7 ans la semaine passée. Regardez donc le bid to cover ratio de ces émissions.

Enfin notons que, comme à chaque occasion d’un marché nerveux, les petits porteurs se font laminer comme l’illustre la performance d’hier des valeurs du cannabis, notamment.

Au Japon, Haruhiko Kuroda met  un frein à la spéculation selon laquelle la BoJ pourrait élargir sa fourchette cible pour les rendements du JGB à 10 ans. «Nous n'en sommes pas du tout à un stade» d'ajustement de la fourchette actuelle d'environ 0,2 point de pourcentage de part et d'autre de zéro, déclare le gouverneur de la Banque du Japon.

La Chine a ouvert sa réunion annuelle du parti communiste sur un ton prudent, en fixant pour 2021 un objectif de croissance économique supérieur à 6%, bien en deçà du consensus. Pékin va créer 11 millions de nouveaux emplois et réduire le déficit budgétaire à 3,2% du PIB, ce qui est un peu plus que ce que les économistes attendaient. La PBOC (banque centrale chinoise) fera baisser les taux de prêt réels. Les autorités vont mettre en œuvre des plans visant à réviser les règles électorales pour Hong Kong et à augmenter les dépenses de défense de 6,8%.

La France prévoit de renforcer les restrictions et d'accélérer les vaccinations. Chypre permettra aux touristes britanniques entièrement vaccinés d'entrer dans le pays sans restrictions à partir du 1^er mai, rapporte le Guardian. Plus d'une douzaine d'États américains ont fait état de nouvelles hospitalisations, menaçant d'inverser la tendance nationale. L'état d'urgence à Tokyo sera probablement prolongé de deux semaines. Wells Fargo encourage ses employés à se faire vacciner et leur offre des congés payés pour cela.

Deux événements d'importance aujourd'hui. D'abord les commandes d'usines allemandes (8h00), ensuite les données mensuelles sur l'emploi aux Etats-Unis (14h30).

Boeing négocie un nouveau crédit revolving de 4 milliards de dollars. Roche obtient la mise sur le marché américain d'Actemra en injection sous-cutanée. Rome a bloqué l'expédition de vaccins AstraZeneca produits en Italie vers l'Australie, une première en Europe.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices reculent légèrement. Tokyo abandonne 0,23% à la cloche, Hong Kong et Shanghai traitent toutes deux juste en-dessous de leur point d’équilibre alors que Séoul recule de 0,57%. Le future SPX abandonne 10 points et l’Europe est indiquée en recul de 0,70% à l’ouverture de 9 heures, bien qu’ayant récupéré une partie des pertes de la nuit. Le 10 ans US est quasiment le seul indicateur à suivre aujourd’hui.