Taurus: «Nous voulons doubler chaque année»

Emmanuel Garessus

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La start-up genevoise lève 65 millions de dollars. Lamine Brahimi, co-fondateur, présente ses priorités.

De gauche à droite, Sebastien Dessimoz, Jean-Philippe Aumasson, Lamine Brahimi, Oren-Olivier Puder.

Taurus, leader des infrastructures d’actifs numériques, fait un pas de géant. La start-up genevoise, créée en 2018, lève 65 millions de dollars auprès d’investisseurs institutionnels, tels que Credit Suisse, Pictet et Deutsche Bank et des investisseurs privilégiés (Series A) Arab Bank Switzerland, Investis, selon un communiqué.Auparavant la société avait levé «entre 15 et 20 millions de dollars. Les quatre co-fondateurs de cette société d’une soixantaine d’employés demeurent les actionnaires majoritaires, à savoir Lamine Brahimi, Sébastien Dessimoz, Oren-Olivier Puder et Jean-Philippe Aumasson. Lamine Brahimi répond aux questions d’Allnews:

Est-ce que Taurus, quatre ans après sa création, est une licorne?

Lamine Brahimi: Nous ne sommes pas une licorne mais la valorisation est très satisfaisante compte tenu de l’âge de la société. Au total, la valorisation donnée par les nouveaux investisseurs représente quelques centaines de millions de dollars.

Une autre étape interviendra-t-elle avant un IPO?

Nous sommes devenus le leader en Suisse après quatre ans, avec une part de marché de 50 à 60%. Ce marché comprend toutes les banques entrées sur le segment des actifs numériques, donc qui utilisent nos solutions ou des solutions similaires pour la garde d’actifs numériques qu’il s’agissent de cryptomonnaies, d’actifs numérisés ou de monnaies numériques.

Nous sommes représentés dans huit pays et trois continents. Si nous parvenions à reproduire dans d’autres pays notre performance suisse, nous serions très satisfaits. Avec effet immédiat, en vertu des approbations des autorités, nous ouvrirons un bureau à Paris pour desservir le marché européen. Le responsable a été identifié. Nous allons répéter ce type d’opération à Dubaï, dans nos activités de technologie, pour le marché du Moyen-Orient et de l’Afrique.

Jusqu’à quand les fonds obtenus actuellement vous permettent-ils de financer votre développement?

L’investissement pourrait se suffire à lui-même sur la base de nos plans financiers. Nous entendons avancer sur trois priorités. Nous voulions nous développer à l’international, continuer à investir dans la technologie et les produits, et potentiellement utiliser une partie des fonds dans des opérations d’acquisitions.

Dans la tokénisation, nous sommes passés de 3-4 transactions par an à 15 en 2022.
Quel est le poids relatif de vos trois activités?

Plus des trois quarts des revenus proviennent des logiciels et moins d’un quart des places de marchés, où nous avons obtenu la licence Finma en mai 2021. L’ambition est d’équilibrer ces deux lignes de métier.

Pour que cette industrie passe d’un trillion de dollars aujourd’hui à 10, 20 ou 40 trillions, il faut numériser les actifs, en particulier les actifs non-cotés. C’est la raison d’être de cette place de marché. Nous serons prêts au moment du véritable décollage de ce marché.

L’affaire FTX a-t-elle modifié vos plans?

Absolument pas. Le scandale FTX a renforcé deux points fondamentaux de notre thèse. Premièrement, mieux vaut avoir son coffre numérique chez soi plutôt que chez un tiers. Nos logiciels répondent à ce besoin. Deuxièmement, il y a une vraie prime à oeuvrer avec des entités réglementées, notamment des banques.

Vos clients ont-ils changé leur comportement à la suite de FTX?

Au contraire. Nous avons assisté à un afflux net significatif de clients institutionnels qui avaient des capitaux dans des entités non réglementées vers des clients bancaires. Le marché est en train de se nettoyer, ce qui profite aux acteurs solides et réglementés.

Quel a été votre développement en 2022?

Pour nous, l’année 2022 a été très bonne. Nous avons doublé notre activité dans l’activité des logiciels, où nous travaillons avec cinq banques systémiques. Dans la tokénisation, nous sommes passés de 3-4 transactions par an à 15 en 2022.

Quels sont vos objectifs pour 2023?

Nous voulons doubler nos revenus chaque année. Nos effectifs devraient passer d’une soixantaine actuellement à une centaine à la fin 2023, sans compter les forces de vente à l’étranger.

Quel segment de marché devrait se développer le plus nettement entre les cryptomonnaies, les actifs tokénisés et les actifs numériques?

L’évolution des cryptomonnaies est cyclique. Le marché traverse ce que l’on qualifie de cinquième hiver. Il se réajustera tôt ou tard à la hausse.

La tokénisation d’actifs dispose d’un formidable potentiel de croissance. Environ 70% de nos clients bancaires utilisent nos solutions de tokénisation, contre 5% il y a un an. Nous espérons pouvoir annoncer de belles transactions à ce sujet ces prochains mois, en Suisse et à l’étranger.

Sur la partie numérique, nous lançons en Amérique un système de paiements qui utilise la blockchain. Les réflexions portent ici sur la tokénisation des dépôts bancaires. La fin des taux d’intérêt négatifs est très positive à ce sujet.

Nous sommes très confiants parce que le cadre réglementaire se clarifie sur toutes les grandes places financières.

Vous allez à Paris et à Dubaï. Est-ce que le cadre réglementaire est meilleur qu’en Suisse?

Nous analysons toutes les places financières. Une banque entre dans notre secteur uniquement si le cadre réglementaire est clair et solide. En France, nous avons quatre clients, acquis en 2022, et le pipeline est riche. A partir de Paris, il sera aussi possible d’offrir nos services dans d’autres pays de l’UE. A Dubaï, le cadre réglementaire change et nous voulons profiter de l’expansion attendue.

Je ne peux pas affirmer que le cadre est plus favorable dans l’un ou l’autre des trois pays. La Suisse a la chance d’avoir fait le premier pas, mais les autres suivent. A nous d’accompagner ces développements.

A quoi ressemblera Taurus dans quatre ans?

Nous voulons être le leader européen des infrastructures d’actifs numériques. Sur la place de marchés réglementés, nous voulons être le partenaire privilégié des PME en Suisse.

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