Malgré l’incertitude politique, surpondérer les actions suisses

Emmanuel Garessus

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L’impasse politique française ne remet pas en cause le potentiel des actions suisses, selon Christian Gattiker, de Julius Baer, lequel cite ses préférées.

 

Les actions suisses poursuivent leur mouvement haussier. Avec un gain de 12% depuis le début de l’année (indice SPI), elles se rapprochent de la performance de l’indice S&P 500 (+17%). Tandis que les résultats trimestriels des entreprises commencent à être publiés, qu’en sera-t-il des prochains mois? Dans sa lettre mensuelle, Julius Baer se révèle modérément optimiste et plaide en faveur d’une surpondération des valeurs suisses, notamment des small & mid caps. Christian Gattiker, responsable de la recherche à la Banque Julius Baer, répond aux questions d’Allnews:

Vous proposez, dans votre lettre mensuelle, de «profiter de vacances reposantes». N’attendez-vous pas de grands mouvements à court terme?

Nous prévoyons effectivement que les marchés entrent dans une forme d’accalmie estivale. Il faudrait que de grandes surprises surviennent pour sortir de cette torpeur. Celles-ci sont naturellement possibles à tout moment, par exemple sur le plan politique. Les personnalités politiques ne partent pas toutes en vacances. Ensuite, vers la mi-août, la campagne électorale américaine devrait battre son plein. Comme le veut la formule, un été électoral est un été raccourci.

La performance boursière n’est-elle pas historiquement décevante en août et septembre?

C’est particulièrement le cas en septembre. Les chartistes estiment que le rally de fin d’année débute en mai lors d’une élection présidentielle américaine. Il est vrai que ce sont des années particulières.

«Les marchés seront sans doute mis à l’épreuve à un moment donné, sans doute sous la forme d’un net repli avant les élections américaines».

Vous attendez-vous à une tendance haussière au deuxième semestre, notamment pour les actions suisses?

Oui. Après un aussi bon début d’année et en raison de la vigueur du mouvement haussier, les marchés seront sans doute mis à l’épreuve à un moment donné, sans doute sous la forme d’un net repli avant les élections américaines. La confiance des investisseurs pourrait alors être ébranlée. Mais, dans l’ensemble nous sommes confiants. Les taux d’intérêt sont en baisse. La croissance économique se maintient. Des pressions incitent le gouvernement chinois à soutenir l’économie. Et le scepticisme des investisseurs demeure encore très présent. Il n’y a aucune euphorie sur les marchés. La hausse des indices est nourrie par un très petit nombre de titres, surtout aux Etats-Unis. Un élargissement de la participation à la hausse devrait se produire.  

Quels devraient être les moteurs du deuxième semestre, la politique monétaire ou les bénéfices des entreprises?

Les deux vont de pair. Cette combinaison de baisse des taux et d’augmentation des bénéfices soutient la hausse actuelle. La baisse de l’inflation devrait conduire à une diminution des taux d’intérêt et soutenir la croissance. Au 2e trimestre, nous nous attendons à une hausse des bénéfices de 8,8% aux Etats-Unis par rapport à la même période de l’an dernier.

Est-ce que la concentration de la hausse sur la Big Tech va se poursuivre?

L’Europe industrielle sort d’une phase de récession et la Chine d’une période difficile. Après la forte progression des Etats-Unis, la croissance mondiale pourrait mieux s’équilibrer dans le monde. La situation est favorable. Le choc énergétique appartient au passé. Les stocks sont bas et doivent être ré-alimentés. Les Etats-Unis ne sont plus le seul moteur de croissance.

Cette étroitesse de la hausse de la bourse est, à mon avis, le signal d’une profonde transformation économique. C’est une force et non pas une faiblesse. L’intelligence artificielle crée un réel boom. Les yeux des investisseurs se fixent maintenant sur le 23 août et la publication des prochains résultats de Nvidia afin d’estimer si ce boom se prolongera ou non.  

«Nous prévoyons effectivement que les marchés entrent dans une forme d’accalmie estivale».

Vous surpondérez les valeurs suisses. Pensez-vous aux mid caps industrielles ou aux trois leaders, Nestlé, Roche et Novartis?

Le marché suisse a déçu l’an dernier en raison de la force du franc et du rôle déterminant des trois leaders. Nous pensons que les opportunités existent surtout au sein des mid caps membres de l’indice SMIM. En cas de correction des marchés, les trois grandes capitalisations souligneront leurs capacités défensives, mais pour profiter de la hausse à venir, nous préférons des autres titres.

Quelles actions suisses appartiennent à vos favoris?

Nous aimons bien Georg Fischer, Sika, Stadler Rail, Alcon, Sandoz.

Vous avez évoqué le risque politique. En Europe, il semble élevé. La France est dans une impasse. Est-ce un problème pour les marchés?

L’environnement politique n’est pas subitement devenu difficile du fait de l’impasse politique en France. Qu’il suffise de rappeler la guerre en Ukraine, la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, les distorsions sur les marchés de l’énergie. 

La situation en France n’est pas une raison pour remettre en cause les perspectives des actions suisses. Elle fait partie des défis que les entreprises doivent gérer. Que le futur gouvernement soit technique ou pas, il ne faudra en attendre ni un marasme économique ni une forte croissance. La situation est incertaine mais stable. Il ne faut pas exagérer ce type de risque. D’ailleurs aux Etats-Unis, une cohabitation ou un blocage crée généralement un environnement assez stable et favorable aux entreprises.

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