Les raisons de surpondérer SGS, VAT ou SIG Group

Philippe Rey

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Ces entreprises sont très bien positionnées dans leurs métiers respectifs, selon Urs Beck, gérant chez Arfina Capital.

 

Le commencement de 2025 a été tonitruant, notamment avec l’entrée en fonction de Donald Trump, l’irruption du chinois DeepSeek dans l’intelligence artificielle et ses implications sur l’industrie des semi-conducteurs, ainsi que  VAT, Comet et Inficon. SGS et Arbonia ont aussi fait parler d’eux. L’indice suisse des small & mid cap, SPI Extra Total Return, a gagné 8% depuis le début de l’année. Urs Beck, qui gère avec Franco Cortesi, le fonds de petites et moyennes capitalisations suisses Arfina Selection Swiss Small & Mid Cap ESG (à fin janvier 2025 une performance cumulée de 9,65% depuis ses débuts, en mars 2021, contre 1,26% pour le SPI Extra), revient sur ces aspects.

Comment ressentez-vous l’impact de DeepSeek?

Son lancement soudain a secoué l’industrie des semi-conducteurs et en particulier le trio de sous-traitants suisses VAT Group, Comet et Inficon. Avec un peu plus de 10 milliards de francs, la valeur boursière de VAT correspond à deux fois celle combinée des deux autres firmes.

Nous avons profité du recul du cours de l’action VAT. Le premier choc a été digéré, si bien que VAT a retrouvé ses niveaux d’avant DeepSeek. Pourquoi privilégions-nous VAT? En raison de sa position mondiale dominante dans le domaine des soupapes à vide et de sa rentabilité élevée à travers les cycles. Enfin, nous comprenons mieux ce que fait VAT que Comet ou Inficon.

SGS constitue votre plus grosse position avec 10% du portefeuille. Pourquoi?

L’arrivée de Géraldine Picaud, d’abord au poste de CFO, puis de CEO pour mettre en oeuvre une nouvelle stratégie donne une nouvelle impulsion au leader mondial de la certification, du testing et de l’inspection. La structure d‘organisation a été simplifiée, avec des objectifs et responsabilités clairement déterminés désormais. Nous saluons le fait que les discussions sur une éventuelle fusion avec Bureau Veritas n’ont pas abouti.

SGS évolue dans des métiers porteurs, soutenus par une réglementation croissante, la sécurité numérique et le développement durable. Sa rentabilité et son potentiel de croissance s’avèrent attractifs. Nous tablons sur une évolution favorable de la croissance organique, qui est renforcée par des acquisitions complémentaires (bolt-on) à marges élevées et de croissance, ainsi que de l’excédent brut d’exploitation et du cash-flow libre. SGS a pour objectif un taux de conversion supérieur à 50% de l’EBITDA (bénéfice d’exploitation avant intérêts, impôts, dépréciations et amortissements) en free cash-flow.

SGS représente une forte surpondération au regard de l’indice de référence. Quelle place accordez-vous à l’indexation?

Elle s’élève à 50% environ, ce qui explique la présence de Straumann et Sandoz parmi les dix plus importantes positions. Le reste étant naturellement une gestion active. Nous menons une approche bottom-up basée sur une analyse fondamentale approfondie. Avec pour but d’identifier des entreprises de qualité, qui sont sous-valorisées et soucieuses d’un développement durable.

«Dottikon ES appuie ses clients dans une exécution parfaite de leur stratégie et l’obtention de marges élevées, avec l’objectif de créer plus de valeur que ses concurrents.»

Quelles sont vos autres convictions fortes?

SIG Group est un autre cas intéressant à nos yeux. Ce groupe est un «suiveur intelligent» du leader mondial Tetra Pak dans le domaine des emballages asceptiques. Il existe des concurrents outsiders, tel Elopak, mais Tetra Pak et SIG forment un quasi-duopole.

La rentabilité de SIG et son cash-flow demeurent attractifs. A notre avis, le management n’a cependant pas bien communiqué les bienfaits des acquisitions en 2022, dont celle de Scholle IPN dans les caisses-outres et les gourdes. SIG accroît progressivement sa base installée dans le monde, particulièrement en Inde; ce qui signifie un cash-flow croissant dans la durée.

Une autre conviction forte est Dottikon ES, sous-traitant de l’industrie pharmaceutique, qui est dirigée avec brio par Markus Blocher, l’actionnaire majoritaire. Les dissociations géopolitiques rapprochent la production d’actifs pharmaceutiques (API) et de médicaments de leurs marchés finaux. Par conséquent, les besoins et la demande de capacités de développement et de production de haute qualité augmentent. Ce dont bénéficie Dottikon ES, qui doit se révéler irréprochable en termes de réactions chimiques dangereuses.

Qu’est-ce qui vous rend optimiste au sujet de Dottikon ES, alors que ce titre est peu liquide?

Le marché des petites molécules biopharma (API) demeure le principal débouché de Dottikon ES. Son potentiel de croissance est énorme. Certes, cette entreprise doit fortement investir, un programme de 700 millions de francs, dont 475 millions ont été accomplis jusqu’ici. Dottikon appuie ses clients dans une exécution parfaite de leur stratégie et l’obtention de marges élevées, avec l’objectif de créer plus de valeur que ses concurrents.

Pour l’heure, Dottikon, qui dégage une marge EBITDA de plus de 30%, ne génère pas de cash-flow libre du fait de ses investissements élevés. Il en récoltera pleinement les fruits plus tard sur ce plan. Au reste, Markus Blocher, dans sa volonté d’augmenter le flottant à 30%, a placé en 2024 un bloc de 75’000 actions auprès d’un investisseur à long terme au prix unitaire de 260 francs. Or notre prix moyen d’achat est bien inférieur à celui-ci.

Quel est votre avis au sujet d’Arbonia?

Arbonia va enfin pouvoir céder son activité climat, après avoir reçu l’aval des autorités de concurrence de l’UE; ce qui permettra de verser un remboursement de valeur nominale de 4 francs par action et un rachat d’actions. Ces opérations mettront en lumière la faible valorisation des multiples de l’activité restante des portes, qui atteint une marge opérationnelle à deux chiffres. Et dont dont nous n’excluons pas la vente non plus.

Vous vous montrez positifs à l’égard de Valiant, n’est-ce pas?

Cette banque reste sous-estimée par la communauté financière. D’aucuns jugent le rendement (RoE) de ses fonds propres trop bas. Ce dernier a atteint 7,7% en 2024. Mais c’est oublier que la valeur comptable par action a progressé  d’environ 3% par an depuis 1997. Et qu’elle s’élevait à 170 francs à fin 2024, soit bien au-dessus du cours de l’action; cela signifie que le RoE effectif est de l’ordre de 10% et sensiblement au-dessus du coût du capital. Et ce avec une solide dotation en capital. De plus, il y a la perspective de progression du résultat opérationnel ainsi que d’un dividende élevé et stable.

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